Black Wednesday au Palais Brongniart (Cogefi Gestion)

L'essor du Black Friday en Europe : une tradition américaine adoptée
Impossible de ne pas avoir entendu, reçu ou vu une publicité pour le Black Friday (vendredi noir), également appelé le « vendredi fou » chez nos cousins québécois.
Initialement d’une durée d'une journée, le Black Friday marque traditionnellement le coup d’envoi de la période des achats des fêtes de fin d'année, achats stimulés par des remises importantes. Cette « fête » commerciale a, comme bien d’autres, dépassé les frontières des États-Unis pour devenir, année après année, un rendez-vous incontournable du consommateur européen qui profite de prix (à priori) attractifs pour remplir, avant l’heure, sa hotte de Père Noël (lui aussi un peu américain).
En France, la journée s’est au fur et à mesure transformée en semaines de prix bradés avec, en point d’orgue, LE vendredi 29 novembre, LA journée de tous les achats.
Un lien inattendu entre le CAC40 et le Black Friday
Sur les marchés, le CAC40, souffrant de la situation politique française et de l’impasse budgétaire qui en découle, testait ses plus bas annuels depuis le 27 novembre. Hasard ou pas, observons qu’il a été pris d’un début de frénésie d’achats précisément le 29 novembre ! Un mouvement qui s’est accru ensuite le mercredi 4 décembre.
C’est précisément le jour où l’Assemblée nationale a voté la motion de censure déposée par le Nouveau Front Populaire (NFP) en réaction au recours à l’article 49.3 de la Constitution sur le budget de la sécurité sociale et donc, de facto, en faveur du renversement du gouvernement de Michel Barnier.
Analyse des mouvements de marché en réponse au contexte politique
Alors, Black Friday ou Black Wednesday au Palais Brongniart ? Parole d’experts de tous bords et de toutes maisons de gestion, voilà une réaction plutôt inattendue et pour beaucoup jugée difficilement compréhensible.
Comme souvent dans ces moments-là, observateurs et investisseurs sortent la carte du fait accompli et de l’anticipation des marchés pour acter d’une situation de fait déjà incluse dans les prix ou comme il se disait autrefois autour de la Corbeille : « On achète la rumeur, on vend la nouvelle ».
S’il est vrai que le spread OAT-Bund ne cessait de progresser parallèlement à la sous-performance du CAC40 contre les autres places boursières européennes, et notamment le DAX qui s’est pendant ce temps offert le luxe de dépasser les 20 % de hausse annuelle, avouons que la justification manque de consistance.
L’idée que l’abandon d’un budget 2025 restrictif au profit du prolongement d’un budget 2024 inchangé, et probablement inadapté mais moins pénalisant pour la croissance, est une explication plus plausible.
Bien sûr, cette situation n’est pas de nature à rétablir l’équilibre des finances publiques et ralentir l’expansion de la dette publique mais, à ce stade, on le voit avec les États-Unis notamment, les marchés attribuent plus de valeur à la croissance qu’à l’orthodoxie budgétaire.
La BCE et la Fed : deux trajectoires monétaires distinctes
Rappelons que la Banque centrale européenne va pouvoir baisser ses taux bien plus vite que la Réserve fédérale. La première va bénéficier d’un retour de l’inflation dans son cadre normatif et d’une croissance nécessitant d’être stimulée, alors que la seconde fait face à une inflation tenace et pouvant être réveillée par le programme du Président Trump mais également d’une croissance ne nécessitant aucun dopant, bien au contraire.
Allemagne : vers un assouplissement de la règle sur la dette ?
Ensuite, l’actualité politique allemande marquée, comme la nôtre, par des convulsions et des élections législatives anticipées, mais plus habituée au jeu des coalitions, pourrait permettre à la première économie européenne de se libérer d’une entrave votée en 2009, celle du « Schuldenbremse » (littéralement frein à l'endettement).
Une majorité des partis politiques semble y être favorable aujourd’hui, y compris fait rare la Bundesbank. Rappelons que cette règle qui de façon résumée limite entre autres le déficit budgétaire annuel à 0,35 % du PIB (produit intérieur brut) a été introduite à la suite de la crise financière mondiale afin de ramener les finances publiques sous contrôle. Cependant, elle est inscrite dans la Loi fondamentale (constitution) allemande et sa réforme ou son abolition nécessiterait toutefois une modification de la constitution approuvée par le Bundestag à la majorité des deux tiers, un exercice demandant une forte coalition ce que les marchés commencent à imaginer comme possible.
Ce verrou enlevé, l’économie allemande pourrait lancer d’ambitieux programmes d’infrastructures et de défense qui irrigueraient toute l’Europe.
L'espoir d’une paix en Ukraine : un catalyseur pour les marchés
Autre catalyseur qui semble apparaître et que les investisseurs commencent doucement à intégrer : celui d’une possible paix négociée entre l’Ukraine et la Russie concomitamment à l’arrivée au bureau ovale de Donald Trump le 20 janvier prochain.
Les mots régulièrement utilisés par le Président ukrainien lui-même semblent commencer à préparer l’opinion publique à cette éventualité que les marchés abordent sur le thème de la reconstruction et donc d’activité économique.
Fluctuations monétaires et ajustements anticipés par les marchés
Et si parallèlement les fameux tariffs (droits de douane) planent toujours au-dessus des capitales de tous les pays du monde, européens, chinois, voisins des États-Unis (Canada et Mexique), voire BRICS, les marchés des changes ont déjà effectué le travail correctif en propulsant le dollar très haut contre toutes les monnaies.
Ainsi, le peso mexicain a reculé de la surtaxation dont il pourrait souffrir, l’euro a reculé de près de 7 % et le yuan s’affaiblit lui aussi. Une autre façon de dire que la menace est déjà dans les cours.
En conclusion, il se pourrait que les investisseurs aient considéré les prix affichés lors du Black Friday européen comme une opportunité pour faire leurs premières courses de Noël, avec une petite exception française pour le mercredi !
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