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Faire plaisir à ses proches à Noël : présent d’usage ou don manuel ? Par Audrey Ferry, Responsable de l’ingénierie Patrimoniale, Bordier & Cie (France)

21
Dec
2021

Noël est le moment de l’année pour offrir des cadeaux à ses proches. Mais attention à ne pas tendre vers un excès de générosité, au risque de basculer du simple cadeau vers une donation.

Cette difficulté de qualification se rencontre souvent pour des personnes disposant d’un patrimoine significatif, car la tentation peut être forte de vouloir faire un cadeau d’une certaine valeur. Or l’administration fiscale ou les héritiers pourraient considérer qu’il s’agit d’une donation, avec ses conséquences civiles et fiscales.

Le présent d’usage est un cadeau offert à l’occasion d’un évènement particulier conformément à un usage social ou familial, n’excédant pas une certaine valeur. Aucun droit de donation n’est dû. N’étant pas assimilé à une libéralité, il n’est pas soumis à la règle du rapport civil des donations imposant aux héritiers de rapporter ce qu’ils ont reçu du défunt, afin de rétablir l’égalité entre eux.

Le don manuel est une donation réalisée par la simple remise de l’objet de la main à la main (par exemple, une somme d’argent, une montre, un tableau) ou de manière dématérialisée (tels qu’un virement d’argent ou d’actions). Le don manuel comme toute donation pourra subir une fiscalité selon son montant, et sa valeur sera prise en compte dans les opérations de partage au décès du donateur.

Il est difficile d’établir une frontière précise entre ces deux notions.

Tout d’abord, un présent d’usage doit être fait pour un événement spécifique, qui justifie qu’un cadeau soit offert. Noël est donc une parfaite occasion.

De plus, la loi précise que le caractère de présent d’usage s’apprécie à la date où il est consenti et compte tenu de la fortune du disposant. A titre d’exemple, un père qui avait offert à sa fille pour son mariage des aquarelles valorisées à cette époque environ 11 000 €, revendues 10 ans plus tard à un prix presque 80 fois plus élevé, a été jugé comme présent d’usage en considération de la fortune du père et de la valeur du cadeau au jour du mariage, car c’est à cette date que devait s’analyser la situation et non au jour de la vente.

Il faut également respecter la valeur modique du présent d’usage : critère relatif car apprécié selon les le patrimoine et les revenus de celui qui l’offre. Ce critère est difficile à appliquer puisque ni l’administration fiscale, ni la loi, n’indiquent de règle quantitative.

L’appréciation se fera au cas par cas, en fonction de l’ensemble des circonstances de fait. C’est la raison pour laquelle l’administration ne fixe aucun pourcentage du présent par rapport à la fortune ou aux revenus du disposant.

Dernière différence entre présent d’usage et don manuel : la notion d’appauvrissement du donateur qui constitue une condition essentielle de la donation. Pour rester un présent d’usage il faut donc que la personne qui l’offre ne s’appauvrisse pas, elle utilisera par exemple une partie de ses revenus non nécessaire au financement de son train de vie.

En pratique, on constate qu’un présent d’usage ne doit pas dépasser 2% du patrimoine et des revenus de celui qui l’offre. Aussi, une personne disposant d’un patrimoine estimé à 1 000 000 € et 250 000 € de revenus, pourrait-elle glisser sous le sapin une enveloppe avec 5 000 euros (soit 2% de ses revenus) sans prendre trop de risques. Un virement bancaire proche du jour J avec un libellé clair « cadeau de Noël 2021 » sera à privilégier, pour se ménager la preuve de l’occasion célébrée.

Enfin, rappelons que l’administration fiscale pourrait ne pas être la seule à s’interroger sur la notion de présent d’usage. Les autres membres du cercle familial pourraient aussi interpréter un cadeau de Noël d’une valeur significative comme une donation et donc une part d’héritage reçue de manière anticipée. Sujet se présentant en général au moment du décès d'un parent, lorsqu’un enfant évoque les différences de traitement dans la générosité parentale.

Vigilance également au sein des familles recomposées, pour les cadeaux en faveur du nouveau conjoint, vis-à-vis des enfants issus d’une précédente union. En effet les enfants pourraient, au moment du décès de leur parent, remettre en cause les différents cadeaux de Noël faits à leur beau parent. Il convient donc de rester raisonnable et d’être généreux avec tous ses proches, afin de maintenir la paix familiale. Sans oublier que si les époux sont exonérés de droits de succession, ils ne le sont pas à l’égard des droits de donation. Ce que l’administration ne manquerait pas de leur rappeler.

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