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Sécuriser l’exonération de sa résidence principale. Par Audrey Ferry, Responsable de l’Ingénierie Patrimoniale, Bordier & Cie (France)

18
Mar
2022

La résidence principale bénéficie d’un statut spécifique en qualité de logement de la famille. Protégée par le droit civil, elle profite également, d’un point de vue fiscal, de privilèges dont l’exonération de la plus-value en cas de cession en est une illustration. Le bénéfice de cette exemption est cependant bien encadré et surveillé tant par l’administration fiscale que par les juges. Pourquoi et comment ?

Pour ouvrir droit à l’exonération, des conditions cumulatives sont requises. Au jour de la cession, l’occupation du logement doit être :

-        habituelle, couvrant la majeure partie de l’année,

-        effective, s’opposant à une simple utilisation temporaire.

Il arrive fréquemment, toutefois, que le vendeur ait déjà quitté le logement au jour de la vente pour s’être installé dans une nouvelle résidence. Dans ce cas, l’administration tolère que le bien cédé ne constitue plus la résidence principale au jour de la cession, s’il a bien été occupé par le cédant jusqu’à la mise en vente et, sous la double condition suivante :

-        la cession est intervenue dans un délai normal. Ce critère doit s’apprécier au cas par cas selon l’ensemble des circonstances de l’opération : caractéristiques particulières du bien, situation du marché immobilier local, prix demandé, diligences effectuées par le vendeur ..., mais se situe généralement entre 12 et 24 mois,

-        le logement n’a pas été loué ou occupé par un membre de la famille du vendeur ou un tiers pendant cette période.

Au regard de l’avantage fiscal que présente ce dispositif, certains contribuables sont tentés de l’obtenir sans remplir réellement les conditions. Raison pour laquelle l’administration fiscale surveille strictement leur application.

Ces derniers mois, plusieurs jurisprudences sont intervenues sur ce sujet. A l’appui de la méthode du faisceau d’indices, le juge administratif détermine si le bien constitue ou non la résidence principale du vendeur.

Le premier angle d’étude de l’administration fiscale et du juge concerne l’effectivité de l’occupation du bien cédé. Plusieurs éléments peuvent être analysés à l’image de :

-        la consommation d’électricité et d’eau : examen des factures de l’année de la cession et de l’année précédente pour vérifier qu’elles ne sont pas trop faibles[1], un indice ayant une force probante déterminante,

-        la domiciliation fiscale et administrative : vérification de la cohérence de l’adresse indiquée sur la déclaration de revenus et sur la taxe d’habitation avec celle du bien vendu[2] , existence d’une attestation d’assurance habitation avec mention de la qualité de résidence principale, ou encore contrôle de l’adresse utilisée pour la domiciliation des comptes bancaires[3],

-        la durée d’occupation du bien cédé : une période de 3 mois a été jugée insuffisante car trop brève[4],

-        la location d’un logement par le vendeur[5] : une situation qui a entrainé l’exclusion de la qualification de résidence principale.

Le second angle d’analyse est le délai écoulé entre la mise en vente et la cession du bien.

Ainsi, a-t-il a été jugé qu’un délai de plus de 2 ans et demi entre la libération des lieux par le vendeur et la vente était anormal[6].

En revanche, l’écoulement de 16 mois entre le départ du logement et sa cession a été qualifié de raisonnable car les diligences nécessaires avaient été accomplies par le vendeur. Pourtant, dans cette affaire[7], le bien avait été libéré 4 mois avant sa mise en vente, alors que l’occupation jusqu’à la mise en vente est normalement exigée par la doctrine administrative.

En synthèse, pour s’assurer du bénéfice de l’exonération de la plus-value de cession de la résidence principale, il convient de pouvoir justifier d’une consommation normale d’électricité, d’eau ou de gaz, d’y être domicilié fiscalement et administrativement, d’avoir occupé le bien suffisamment longtemps (plus de 6 mois). Et par précaution, il est recommandé de conserver les preuves de la date de mise en vente et des démarches effectuées, en cas de départ du logement avant sa cession.

[1] CAA de Nantes 1er avril 2021 n°19NT03708, CAA de Versailles 28 septembre 2021 n°19VE02484 et CAA Versailles 25 janvier 2022 n°19VE02877 [2] CAA de Paris 3 novembre 2021 n°20PA01929 [3] CAA de Nantes 1er avril 2021 [4] CAA Nantes 1er avril 2021 et CAA Versailles 25 janvier 2022 [5] CAA Marseille 30 décembre 2021 n°20MA00667 [6] CAA Marseille 16 février 2021 n°19MA04636 [7] CAA Bordeaux 6 mai 2021 n°19BX04551

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