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Économie

BCE : une nouvelle hausse de taux justifiée ? (Financière de la Cité)

20
Sep
2023

Ce 14 septembre, le Conseil des Gouverneurs de la Banque centrale européenne a décidé de relever une nouvelle fois ses taux directeurs, le taux de dépôt atteignant désormais 4%, soit un plus haut historique. Cette décision a été prise au regard des nouvelles projections économiques réalisées par le staff de la BCE, mais également au travers de l’interprétation des conditions qui avaient été fixées au préalable par le Conseil.

Selon les projections du staff de la Banque centrale européenne, la croissance de la zone euro a été abaissée à 0.7% pour cette année 2023, contre 0.9% auparavant, à 1.0% pour 2024 (au lieu de 1.5%) et à 1.5% pour 2026 (au lieu de 1.6%). Comme l’indique la BCE, cette révision est « substantielle » pour le profil de croissance économique du continent, et ce d’autant plus que la prévision de l’année 2023 incorpore le postulat d’une croissance de 0.3% pour le deuxième trimestre 2023, correspondant à la première estimation publiée par Eurostat. Or cette estimation a été révisée à la baisse le 7 septembre dernier, alors que la date de « cut off » du staff de la BCE était le 22 août. L’ajustement des anticipations aux données les plus récentes révèle alors une projection de croissance de 0.5% pour l’année 2023, contre 0.9% anticipé au mois de juin dernier, ce qui aura également des conséquences sur la croissance 2024.

Concernant l’inflation, les projections ont été revues à la hausse pour 2023 (5.6% au lieu de 5.4%) et pour 2024 (3.2% au lieu de 3.0%), mais à la baisse pour 2025 (2.1% au lieu de 2.2%). Cette révision haussière pour 2023 et 2024 est le résultat d’un ajustement à la hausse anticipée des prix de l’énergie. Cependant, il doit être noté que la prévision d’inflation HICP pour le Q4 2025 atteint désormais 1.9%, soit un chiffre inférieur à la cible de 2.00%. Concernant l’inflation excluant les prix de l’énergie et de l’alimentation, le staff de la BCE anticipe désormais un niveau de 5.1% pour 2023, de 2.9% pour 2024, et de 2.2% pour 2025 (contre, respectivement, de 5.1%, 3.0%, et 2.4%).

Selon le communiqué datant du 27 juillet dernier, la BCE annonçait que ses futures décisions dépendraient des données publiées, particulièrement concernant trois points : « Plus particulièrement, nos décisions relatives aux taux d’intérêt resteront basées sur notre évaluation des perspectives d’inflation compte tenu des données économiques et financières, de la dynamique de l’inflation sous-jacente et de la force de la transmission de la politique monétaire. ».

Concernant le premier point relatif aux perspectives d’inflation, les prévisions font désormais état d’une inflation plus élevée sur le court terme, en raison des prix de l’énergie, mais d’une inflation inférieure à 2% (1.9%) à la fin de la période (Q4 2025), et donc conforme à une inflation de 2% « sur le moyen terme ». Si l’évolution des prix de l’énergie ne peut que marginalement être orientée par ses décisions, la prévision d’une inflation inférieure à 2% en fin de période peut être considérée comme une bonne nouvelle pour les membres de la BCE.

Le second point relatif aux dynamiques d’inflation sous-jacente peut être analysé au regard des projections de l’inflation excluant l’énergie et l’inflation - qui sont inférieures à celles publiées au moins de juin dernier - mais également au regard de l’indice PCCI (Persistent and Common Component of Inflation) qui a atteint 2.63% en juillet contre 2.83% pour le mois de juin. Dans les deux cas, le développement de la « dynamique de l’inflation sous-jacente » peut être considéré comme positif par le Conseil des Gouverneurs.

Enfin, selon le communiqué de ce 14 septembre, les données relatives à la transmission de la politique monétaire sont également considérées comme « favorables » puisque Christine Lagarde a pu indiquer : « En ce qui concerne le canal de transmission, il semble que le cycle actuel de hausse des prix se répercute sur les conditions de financement plus rapidement que les précédents. » (…) « Je pense que nous avons tous partagé le même point de vue dans la salle plus tôt aujourd'hui, à savoir que ce canal de transmission est fort et plus fort que ce que nous avons vu dans les cycles précédents. »(…) , Il est donc clair que la transmission est effective et plus que par le passé. ».

Ainsi, au regard des critères retenus par la Banque centrale européenne : anticipations d’inflation, dynamique d’inflation sous-jacente et transmission de la politique monétaire, les données publiées depuis le mois de juillet dernier pourraient davantage apparaître comme favorables. Une telle interprétation laisserait entendre qu’une décision de politique monétaire « dépendante » des données aurait produit une pause de la hausse dans ce cycle de resserrement monétaire.

A l’inverse, le Conseil des Gouverneurs a choisi de resserrer sa politique en haussant ses taux de 25 points de base « à une solide majorité » comme cela a été indiqué par Christine Lagarde, et ce malgré une baisse « substantielle » des anticipations de croissance. Dans de telles circonstances, et alors que les conditionnalités posées par la BCE apparaissent déjà restrictives, il peut être considéré que l’approche de la BCE, dans son interprétation des critères, est elle-même particulièrement restrictive. La détermination du Conseil des Gouverneurs à relever ses taux - pourtant claire - se révèle encore plus forte que ne le suggère sa propre communication. Dans ce contexte, une nouvelle hausse des taux ne peut être totalement exclue lors des prochaines réunions du Conseil.

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