L'importance des semi-conducteurs pour la révolution de l'IA (Square Capital)

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L'importance des semi-conducteurs pour la révolution de l'IA (Square Capital)

Les puces de semi-conducteur

En novembre 2022, le monde découvre et se fascine pour ChatGPT, un assistant virtuel (« chatbot ») qui ressemble à un moteur de recherche et qui a réponse, bonne ou mauvaise, à tout. Derrière ChatGPT se cache une avancée majeure, pour ne pas dire une révolution, sous le nom d’intelligence artificielle générative. Le terme d’intelligence artificielle n’est pas nouveau et il faut remonter aux années 1950 pour retrouver sa première utilisation. En revanche, l’ajout de l’adjectif « générative » créé une différence fondamentale. L’IA générative ne se contente pas de résoudre des problèmes qui nécessitent généralement une intelligence humaine, elle est capable de générer un contenu nouveau et original, que ce soit un texte, une image, un son ou autre. Le potentiel de l’IA générative semble sans limite et illustre le concept de « création destructrice » développé par l’économiste Joseph Schumpeter. Le moteur de l’IA générative réside dans des puces de semi-conducteur ultra puissantes, qui jouent le rôle des pelles dans la ruée vers l’or.

Ces puces de semi-conducteur sont l’objet de notre note de recherche. Nous commençons par définir une puce de semi-conducteur (1) et son processus de fabrication (2) avant de nous focaliser sur les acteurs majeurs du secteur (3). Enfin, nous partageons notre thèse d’investissement (4).
 

1. Qu’est-ce qu’une puce de semi-conducteur ?

Une puce de semi-conducteur est un dispositif électronique composé de transistors. Un transistor est un interrupteur qui laisse passer ou bloque le courant, ce qui produit une information binaire, 1 ou 0. Ces interrupteurs mis ensemble et connectés entre eux génèrent une capacité de calcul importante, à l’origine de progrès majeurs dans le domaine de l'informatique et des machines depuis le début du XXème siècle. Plus le nombre de transistors est élevé, plus la capacité de calcul est importante, permettant la réalisation de tâches de plus en plus complexes, plus rapidement et plus efficacement. Pour accroitre la puissance de calcul sans augmenter la taille des machines, la prouesse technologique est de fabriquer des transistors de plus en plus petits. Le nombre de transistors sur une puce de semi-conducteur est passé de 10 mille en 1975 à 58 milliards en 2021. La miniaturisation des transistors, suivant la Loi de Moore, est donc à l’origine des progrès technologiques. Gordon Moore, co-fondateur de l’entreprise américaine Intel, avait en effet correctement prédit en 1965 que le nombre de transistors sur les puces de semi-conducteur doublerait tous les deux ans. Aujourd’hui, le plus petit transistor mesure 2 nanomètres.


2. Quel est le processus de fabrication d’une puce de semi-conducteur ?

La fabrication de puces de semi-conducteur est un processus d’une grande complexité. Nous revenons ci-dessous sur les étapes principales.

Le point de départ est le sable, principalement composé de dioxyde de silicium (SiO2). Le silicium qui en est extrait est un matériau semi-conducteur, c’est-à-dire avec des propriétés électriques entre celles d’un conducteur et d’un isolant. Le silicium extrait du sable subit ensuite un processus de purification pour pouvoir être exploitable. Le terme « semi-conducteurs » est souvent utilisé comme un raccourci pour désigner les puces de semi-conducteur et non pas seulement le matériau semi-conducteur.

Une fois purifié, le silicium est fondu puis refroidi lentement pour cristalliser en un lingot monocristallin. Ce lingot est ensuite tranché en fines galettes (wafers), qui constituent le substrat sur lequel seront intégrés les circuits électroniques.

L’impression des circuits sur ces galettes s'effectue grâce à la photolithographie. Cette méthode extrêmement précise consiste à graver des motifs de circuit, grâce à une source lumineuse, sur la galette de silicium revêtue d'une couche photosensible. Pour donner une idée de leur précision, les lasers des machines de photolithographie pourraient viser une balle de golf sur la Lune. Les composants tels que les transistors sont intégrés et interconnectés à l'aide de couches métalliques pour former un circuit intégré complet.

Avant de procéder à la découpe, les galettes complètes sont soumises à des tests électriques pour détecter les puces défectueuses. Les galettes sont ensuite divisées en puces individuelles, grâce à une découpe au diamant, chacune représentant une puce de semi-conducteur finie. Ces puces sont placées dans un boîtier protecteur qui permet leur intégration dans des dispositifs électroniques extérieurs, grâce à des contacts ou des broches pour la connexion.

3. Quels sont les acteurs de la chaine de valeur ?

Le processus de fabrication de semi-conducteurs mobilise une multitude d'acteurs, chacun jouant un rôle spécifique dans la chaîne de production.

En amont de la chaine de valeur, nous trouvons les designers, responsables de l'élaboration des schémas des puces de semi-conducteur. Leur mission est de concevoir des circuits électroniques innovants pour maximiser la performance et minimiser la consommation énergétique. Ils s'appuient sur des logiciels spécialisés, tels que Cadence et Synopsys. Les leaders dans le design des puces de dernière génération sont Nvidia et AMD. Certains acteurs comme Apple ont fini par internaliser le design des puces de leurs propres produits, au lieu de déléguer cette mission à d’autres entreprises.

Les designers sous-traitent ensuite la production physique des puces de semi-conducteur aux fonderies. Ces dernières matérialisent les conceptions des designers, avec lesquels elles collaborent étroitement. Le taiwanais TSMC, l’américain Intel et le coréen Samsung sont les trois princpaux fabricants de puces de semi-conducteur.

La complexité des usines est remarquable, nécessitant une précision et une organisation exceptionnelles. Les lignes de production doivent être exemptes de toute particule de poussière, surpassant même la propreté des salles d'opération médicale, car la moindre impureté peut compromettre un semi-conducteur.

Les fonderies nécessitent des machines de photolithographie extrêmement sophistiquées pour fabriquer les puces comme expliqué précédemment. L’entreprise néerlandaise ASML a le monopole dans les machines de dernière génération dites EUV (« extreme ultraviolet ») indispensables pour fabriquer les puces les plus performantes. Ces machines coûteraient plus de 300 millions de dollar l’unité.

Enfin, concernant les matières premières, les fonderies s'approvisionnent en galettes de silicium auprès de producteurs spécialisés, incluant le français Soitec.

Il existe également des groupes présents à plusieurs niveaux de cette chaîne de valeur, du design à la production. Parmi eux figurent Intel, Samsung, Texas Instruments, et STMicroelectronics, un consortium franco-italien.


4. Pourquoi et comment nous investissons-nous dans ce secteur ?

1.  Pourquoi ? Un secteur en croissance structurelle

Le marché global des semiconducteurs a dépassé 500 milliards de dollars en 2023 et pourrait franchir la barre des 1 000 milliards de dollars en 2030. La croissance annuelle moyenne de cette industrie devrait s’établir à 8% sur cette période, portée par la nouvelle ère de la digitalisation de l’économie et la croissance de la classe moyenne dans les pays émergents.

La digitalisation touche tous les secteurs et toutes les zones géographiques. En 2023, 2,6 milliards d’individus n’avaient toujours pas accès à internet, la plupart dans les pays émergents.

Les centres de données (« data centers ») et l’intelligence artificielle sont les principaux leviers de croissance de l’industrie des semi-conducteurs. En effet, seulement 12% des entreprises disposent de capacités de données et d’IA matures et le segment de l’IA générative pourrait croître à un rythme annualisé de 42% au cours des 10 prochaines années pour atteindre 1 300 milliards de dollars.

La transformation digitale est donc loin d’être achevée, et trouve un nouveau souffle avec l’IA. C’est une tendance structurelle forte, source d’opportunités pour des investisseurs de long-terme.


2. Comment ? Les champions de la chaine de valeur

Cette transformation digitale nécessite les puces de semi-conducteur les plus sophistiquées. En effet, le développement des modèles d’IA, leur apprentissage intensif et leur utilisation à grande échelle requièrent une capacité de calcul, de stockage et de réseau que seules certaines cartes graphiques et puces sont en mesure de produire.

Le designer Nvidia est le leader mondial des cartes graphiques, avec 80% des parts de marché. Les cartes graphiques sont des processeurs, conçus à l’origine pour des rendus visuels, conçus à partir de puces de semi-conducteur. L’entreprise développe des cartes graphiques depuis plus de 20 ans et dispose d’une avance technologique importante sur ses concurrents (Intel et AMD notamment). Son avance est protégée par une propriété intellectuelle colossale, avec plus de 8 000 brevets actifs. Les entreprises de design comme Nvidia n’ont pas d’usine (« fabless ») et ont donc une faible intensité capitalistique. Nvidia est extrêmement profitable avec une marge opérationnelle de 60% qui lui permet de réinvestir dans la recherche & développement et d’accentuer son avance.

Les cartes graphiques conçues par Nvidia sont produites par TSMC. Le géant taiwanais est le premier producteur mondial de puces de semi-conducteur, avec plus de 60% des parts de marché et 90% sur les puces de dernière génération. TSMC est le premier détenteur de brevets au monde avec plus de 52 000 brevets sur la production de puces. Contrairement à Nvidia, l’intensité capitalistique est gigantesque avec des coûts fixes colossaux pour bâtir les fonderies. La construction de la nouvelle usine de TSMC en Arizona devrait prendre 3 ans et coûter environ 40 milliards de dollars. Ces investissements représentent des barrières à l'entrée très élevées pour de nouveaux entrants. Samsung et Intel n’ont aujourd’hui pas les moyens financiers et technologiques pour suivre le rythme imposé par TSMC. La société a une marge opérationnelle supérieure à 40%.


TSMC fabrique les puces sur les machines de photolithographie ASML. L’entreprise néerlandaise a le monopole sur les machines EUV (« extreme ultraviolet ») capables de fabriquer des semi-conducteurs avec des tailles de transistor inférieures à 7 nanomètres. Sa situation de monopole lui donne un pouvoir de fixation des prix de ses machines très important. La génération des semi-conducteurs de 7 nanomètres et moins est celle qui permet de développer les modèles d’IA les plus performants. La marge opérationnelle d’ASML est supérieur à 35%.

S’il est encore trop tôt pour prédire les grands vainqueurs de la révolution de l’intelligence artificielle, nous sommes convaincus que celle-ci passera, entre autres, par ces trois acteurs, les pelles de la ruée vers l’IA.

 
Square Capital (Paris) investit dans les actions de Nvidia, TSMC et ASML pour le compte de ses mandats de gestion.

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