Budget 2026 : un texte entre rigueur budgétaire et compromis fiscal

Mi-Novembre 2025 : un calendrier parlementaire sous haute tension avant la fin de l’année
Le calendrier parlementaire du budget 2026 s’est précisé, confirmant un enchaînement de débats particulièrement resserré pour l’examen des textes financiers. Les projets de loi de finances (PLF) et de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), déposés le 14 octobre, doivent être adoptés définitivement avant le 23 décembre 2025 et promulgués avant le 31 décembre afin d’entrer en vigueur au 1er janvier 2026. Le gouvernement, qui a confirmé son renoncement à l’article 49.3, confie donc au Parlement la pleine responsabilité de ce marathon législatif. Le vote sur la partie « recettes » du PLF est attendu le 17 novembre, suivi de la partie « dépenses » avant le 23 novembre, avant un passage au Sénat dès le 25 novembre. Les sénateurs devront achever leurs travaux au plus tard le 12 décembre pour permettre une adoption finale avant Noël. Ce calendrier, rappelé par Le Monde le 11 novembre 2025, laisse peu de marge de manœuvre : un retard pourrait conduire à l’adoption d’une loi de finances spéciale ou d’ordonnances afin d’éviter tout vide juridique au 1er janvier.
Source : Le Monde
14 octobre 2025 : présentation du projet de budget 2026 en Conseil des ministres
Le gouvernement a présenté ce mardi 14 octobre 2025 au matin, en Conseil des ministres à l’Élysée, les projets de loi de finances (PLF) et de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2026.
Cet exercice budgétaire du gouvernement Lecornu 2 formé le 10 octobre 2025 intervient dans un contexte politique et économique délicat, alors que la France doit impérativement adopter un budget avant la fin de l’année.
Déficit 2026 : un objectif de réduction limité à 4,7 % du PIB
Le projet 2026 affiche un déficit public compris entre 4,6 % et 5 % du PIB. L’objectif initial, fixé à 4,6 %, semble difficile à atteindre. Le gouvernement évoque désormais un déficit « en dessous de 5 % », soit environ 153 milliards d’euros.
Cet effort reste modeste au regard du déficit 2025 (5,4 %), mais il traduit la volonté de stabiliser les comptes tout en préservant les leviers de relance. Le ministère de l’Économie a confirmé que la France devait encore réaliser environ 30 milliards d’euros d’économies pour atteindre cet objectif.
Le Haut Conseil des finances publiques a qualifié ces hypothèses de « volontaristes », estimant que la croissance attendue en 2026, autour de 1,3 %, reste incertaine dans un environnement international tendu.
30 milliards d’euros d’économies, dont 7 milliards sur la santé
L’effort budgétaire global s’élève à environ 30 milliards d’euros, dont près d’un quart portera sur la Sécurité sociale.
Le PLFSS prévoit une réduction du déficit de 23 milliards en 2025 à 17,5 milliards en 2026, grâce à une progression des dépenses d’assurance maladie limitée à 1,6 %.
Les économies reposeront sur une rationalisation des dépenses de santé (7,1 milliards d’euros), un ralentissement des revalorisations de prestations et une gestion plus stricte des dépenses sociales.
Le gouvernement mise aussi sur la suppression de 3 119 postes dans la fonction publique d’État et au sein des opérateurs publics, dont 1 735 emplois dans les agences. Ces réductions de postes doivent contribuer à contenir la masse salariale sans remettre en cause le fonctionnement des services essentiels.
Fiscalité 2026 : prolongation des taxes sur les grandes entreprises et les hauts revenus
Le projet de loi de finances maintient plusieurs dispositifs introduits en 2025, avec quelques ajustements.
La contribution exceptionnelle sur les bénéfices des grandes entreprises, instaurée l’an dernier, est prolongée d’un an, mais allégée. Elle devrait rapporter 4 milliards d’euros en 2026, contre 8 milliards en 2025. Cette taxe vise les 400 plus grandes entreprises dont le chiffre d’affaires dépasse un milliard d’euros.
En parallèle, le gouvernement prolonge la contribution différentielle sur les plus hauts revenus (CDHR). Ce mécanisme impose un taux minimal d’imposition de 20 % aux ménages dont les revenus excèdent 250 000 euros pour une personne seule ou 500 000 euros pour un couple.
Création d’une taxe sur les holdings patrimoniales
Une nouvelle taxe sur les holdings patrimoniales figure également dans le texte. Inspirée de modèles américains et irlandais, elle doit cibler les sociétés qui thésaurisent leurs revenus non distribués, échappant ainsi à l’impôt.
Son taux serait de 2 % sur les actifs non professionnels, pour un rendement estimé entre 1 et 1,5 milliard d’euros.
Cette mesure symbolique vise à réduire les stratégies d’optimisation fiscale et à renforcer la contribution des structures patrimoniales au financement public.
Allègement de la CVAE pour soutenir les petites entreprises
Afin de compenser ces hausses ciblées, le gouvernement prévoit une baisse partielle de la CVAE, un impôt de production particulièrement pénalisant pour les PME et ETI.
Cette mesure, réclamée de longue date par les fédérations industrielles, vise à renforcer la compétitivité du tissu productif français.
Les plus petites entreprises devraient également bénéficier d’un accompagnement renforcé dans le cadre de la transition énergétique et numérique, via le maintien de crédits d’impôt spécifiques.
Retraités et ménages : abattement modifié et gel des pensions
L’une des mesures les plus sensibles du projet concerne la fiscalité des retraités.
Le gouvernement remplace l’abattement fiscal de 10 % sur les pensions par un abattement forfaitaire de 2 000 euros. Cette réforme aura un effet redistributif : les couples de retraités modestes verront leur situation s’améliorer, tandis que les foyers plus aisés seront davantage mis à contribution.
Le texte confirme aussi le gel du barème de l’impôt sur le revenu. L’absence d’indexation sur l’inflation se traduira mécaniquement par une hausse d’impôt pour certains ménages, estimée à 1,9 milliard d’euros.
Enfin, le gel des pensions de retraite et des prestations sociales est inscrit dans le projet. Aucune revalorisation n’est prévue en 2026, et une sous-indexation de 0,4 point est envisagée à partir de 2027.
Suppression de deux jours fériés : une mesure finalement abandonnée
Parmi les mesures les plus débattues de l’été, la suppression de deux jours fériés, envisagée sous le gouvernement Bayrou, a finalement été retirée du projet par Sébastien Lecornu.
Cette idée, qui devait générer plusieurs milliards d’euros d’activité économique supplémentaire, avait suscité une forte opposition syndicale et politique.
Le gouvernement a préféré écarter cette mesure symbolique, jugée « inapplicable et socialement explosive », pour se concentrer sur des leviers fiscaux plus ciblés et sur la maîtrise des dépenses sociales.
Baisse des dépenses de l’État et hausse du budget de la défense
Le gouvernement table sur une baisse globale des dépenses de l’État, hors charge de la dette, en 2026.
Les économies seront concentrées sur les dépenses de fonctionnement et les subventions, tandis que certains postes, comme la défense, verront leur enveloppe augmenter de 6,7 milliards d’euros.
Les crédits alloués à la transition écologique et à la recherche devraient, quant à eux, être préservés. Bercy insiste sur le fait que « la rigueur budgétaire ne doit pas signifier l’arrêt de l’investissement stratégique ».
Croissance et déficit : des hypothèses jugées trop optimistes
Le Haut Conseil des finances publiques a rendu un avis réservé sur les hypothèses macroéconomiques du budget.
La prévision de croissance de 1,3 % repose sur un scénario de reprise modérée, alors que les marchés européens restent fragilisés par les tensions politiques et la remontée des coûts de financement.
La charge de la dette française devrait continuer d’augmenter, dépassant 60 milliards d’euros en 2026, en raison du maintien des taux d’intérêt autour de 3,5 %.
Le gouvernement mise sur une décrue progressive à partir de 2027, liée à la stabilisation des marchés obligataires et à la maîtrise des dépenses courantes.
Un vote sous tension à l’Assemblée nationale
Le dépôt du budget au Parlement intervient dans un climat tendu.
Deux motions de censure ont été déposées par La France insoumise et le Rassemblement national.
Elles seront examinées jeudi 16 octobre, sans probabilité de succès immédiat, le Parti socialiste ayant annoncé qu’il ne les voterait pas.
Le Premier ministre a toutefois conscience que son texte devra être amendé. Il a insisté sur sa volonté de « laisser place au débat », reconnaissant que certaines mesures pourraient être ajustées, notamment celles relatives aux retraites et à la fiscalité des entreprises.
Le calendrier parlementaire prévoit une adoption du texte en première lecture avant fin novembre, afin de permettre son examen au Sénat début décembre.
Les marchés et Bruxelles attentifs à la trajectoire française
Les agences de notation, déjà critiques sur la trajectoire française, suivront attentivement la mise en œuvre de ces engagements.
Une nouvelle dégradation de la note souveraine pèserait sur la dette publique et renchérirait le coût du financement.
Parallèlement, la Commission européenne pourrait examiner de près la conformité de ce budget avec les nouvelles règles de discipline budgétaire réintroduites en 2025.
La France s’est engagée à ramener son déficit sous la barre des 3 % d’ici 2029. Le projet 2026 constitue une étape intermédiaire essentielle.
Un budget de rigueur, mais pas d’austérité
Ce projet se distingue par une approche pragmatique : il combine rigueur et ajustements ciblés plutôt qu’une austérité brutale.
Les ménages les plus aisés et les grandes entreprises seront davantage sollicités, tandis que les PME et les secteurs stratégiques bénéficieront d’allègements.
Les retraités, en revanche, figurent parmi les perdants du texte, entre gel des pensions et ajustements fiscaux.
Le gouvernement assume cette ligne, estimant qu’il s’agit d’un « effort collectif » nécessaire pour rétablir les équilibres.
Le budget 2026 se présente ainsi comme un compromis politique et économique : une tentative de restaurer la crédibilité budgétaire sans freiner la reprise, au prix d’arbitrages sociaux sensibles.
Sources :
Ouest-France,
Le Monde,
CNews,
Le Figaro,
Reuters,
Budget.gouv.fr
Retour sur la situation au 3 octobre 2025 : un renoncement au 49.3
Le Premier ministre Sébastien Lecornu a annoncé renoncer à l’utilisation du 49.3 pour faire adopter le budget 2026, préférant chercher un accord de non-censure avec les socialistes. Toutefois, le chef des députés PS a jugé ce geste insuffisant, estimant que d’autres leviers constitutionnels permettaient encore au gouvernement de « caporaliser » le Parlement. Les discussions politiques demeurent donc tendues alors que le calendrier budgétaire avance.
Des niches fiscales dans le viseur
Le rapporteur général du budget, Charles de Courson, a proposé de réduire quatre grandes niches fiscales, dont le coût pour l’État se chiffre en milliards. Ces recommandations s’inscrivent dans un contexte de forte pression pour réduire le déficit public, que Sébastien Lecornu entend diminuer de 20,5 milliards d’euros entre 2025 et 2026. La chasse aux niches fiscales, déjà annoncée par François Bayrou puis relayée par les socialistes, vise en particulier celles bénéficiant aux grandes entreprises.
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Le gel des pensions des retraités les plus aisés
Autre mesure sensible, l’exécutif envisage de geler les pensions des retraités les plus aisés dès 2026. Si une majorité de retraités devrait bénéficier d’une revalorisation limitée d’environ 1 %, les plus hauts revenus seraient exclus de cette hausse. Le gouvernement a prévu 6 milliards d’euros pour les retraites, contre les 8 milliards initialement anticipés par Bercy. Ce choix suscite des critiques, certains économistes plaidant plutôt pour une hausse ciblée de la CSG qui frapperait l’ensemble des revenus.
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Une réforme des donations intergénérationnelles
Matignon travaille également sur un allégement fiscal concernant les donations aux petits-enfants et aux jeunes. Actuellement, l’abattement applicable aux transmissions est beaucoup moins favorable que pour les enfants. L’exécutif souhaite encourager la circulation de l’argent vers les jeunes actifs, afin de renforcer leur pouvoir d’achat et leur accès au logement. Cette mesure viendrait compléter le dispositif introduit en 2025, permettant des dons exonérés jusqu’à 100 000 euros pour l’achat ou la rénovation d’une résidence principale.
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Sources : Le Monde, Boursorama, Le Parisien, Public Sénat
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