Stablecoins : pourquoi la BCE alerte sur les risques pour la stabilité financière ?

Économie

Une vigilance accrue de la BCE face à un marché en croissance rapide

La Banque centrale européenne met en garde contre les risques que les stablecoins pourraient faire peser sur la stabilité financière à mesure que leur usage progresse. Dans une publication préliminaire à son rapport complet, l’institution rappelle que leur croissance rapide et leur adoption possible dans de nouveaux usages pourraient introduire des risques à l’avenir. La BCE souligne que les stablecoins restent aujourd’hui surtout utilisés dans le trading de crypto-actifs et ne provoquent pas de sorties massives de dépôts bancaires dans la zone euro. Leur usage réel dans les transactions du quotidien demeure marginal, tandis que leur pénétration auprès des ménages reste inférieure à 1 %. Cependant, en cas d’adoption massive, une substitution des dépôts bancaires par les stablecoins pourrait réduire une source essentielle de financement pour les banques et accroître leur dépendance à des ressources plus volatiles.

Une capitalisation en forte expansion et un risque de fragmentation réglementaire

Le marché des stablecoins dépasse désormais 280 milliards de dollars, soit environ 8 % du total des crypto-actifs, avec une domination très nette du dollar et un poids marginal de l’euro. Cette asymétrie soulève une inquiétude stratégique pour la BCE. Entre 2019 et 2025, la capitalisation totale a été multipliée par plus de cent selon la Banque des règlements internationaux. Un émetteur souligne que les stablecoins peuvent renforcer la domination internationale du dollar en créant une demande massive pour les bons du Trésor américains.

Un autre risque identifié concerne les modèles multi-juridictionnels. Si un même stablecoin est émis dans l’Union européenne et hors d’Europe, les réserves détenues dans l’UE pourraient ne pas suffire à satisfaire l’ensemble des demandes de rachat, créant un risque de panique. L’Autorité bancaire européenne rappelle que les émetteurs doivent disposer d’un volume suffisant d’actifs liquides pour répondre aux rachats, condition qui doit fonctionner à l’échelle mondiale. Le règlement MiCA fixe un cadre mais les disparités entre juridictions créent une fragilité, particulièrement dans un modèle multi-émission.

Des usages encore concentrés sur le trading mais une interconnexion croissante

Les auteurs du rapport soulignent que, pour l’heure, le trading de cryptomonnaies reste de loin le principal cas d’usage des stablecoins. Les paiements transfrontaliers ne jouent qu’un rôle mineur et les transactions de détail sont limitées, Visa estimant que seulement 0,5 % des volumes correspondent à des transferts organiques de faible montant. Les flux demeurent majoritairement transfrontaliers selon une étude du FMI mais sans preuve qu’ils soient systématiquement liés aux transferts de fonds.

Même si les stablecoins indexés sur le dollar dominent le marché avec près de 84 %, leurs interconnexions avec les marchés financiers de la zone euro restent limitées. Toutefois, l’interconnexion croissante entre émetteurs de stablecoins et finance traditionnelle attire l’attention de la BCE. Ces émetteurs détiennent des volumes importants de bons du Trésor américain et deviennent des acteurs significatifs d’un marché essentiel pour la stabilité financière mondiale.

Un enjeu stratégique pour l’Europe et la question de la souveraineté monétaire

La montée en puissance de stablecoins essentiellement adossés au dollar soulève un enjeu de souveraineté pour l’Europe. Les membres du comité exécutif de la BCE, dont Piero Cipollone, rappellent qu’ils peuvent constituer une menace pour l’autonomie européenne en matière de paiements. L’introduction d’un euro numérique, dont un projet pilote est prévu en 2027 et une première émission possible en 2029, s’inscrit dans cette réflexion. L’Europe peut également soutenir l’émission de stablecoins en euros conformes à MiCA et moderniser ses infrastructures financières fondées sur des registres distribués.

L’alerte de la BCE dépasse donc la seule dimension financière immédiate. Dans des infrastructures de paiement en transformation rapide, la devise la plus liquide tend à s’imposer comme actif de règlement. Aujourd’hui, c’est le dollar et l’Europe cherche à éviter un décrochage durable dans les futures architectures financières mondiales. Même si les risques actuels sont jugés limités dans la zone euro, la BCE appelle à une surveillance étroite et à une harmonisation mondiale des cadres réglementaires pour réduire les arbitrages transfrontaliers et renforcer la résilience financière.

Source : ABCbourse, actufinance, journalducoin

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