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Économie

Vega IM : Marché du travail américain - Un ajustement saisonnier ne fait pas une tendance

20
Feb
2023

Contre toutes attentes, même les plus élevées, l’économie américaine a créé 517 000 emplois en janvier. Si la solidité du marché du travail américain est de nature à alimenter la poursuite des resserrements monétaires de la Fed, certains indicateurs avancés sur l’emploi confirment pourtant un début de dégradation qui interroge.

La qualité des emplois se dégrade

Sujet récurrent des derniers mois, le marché du travail américain reste très dynamique mais la qualité des emplois se dégrade au profit des emplois précaires et du temps partiel. Depuis mars 2022, l’enquête menée auprès des ménages américains - Household Survey - révèle que l’économie américaine aurait même détruit 10 000 emplois à temps plein, alors que les créations d’emplois précaires accélèrent (environ 1,5 millions d’emplois à temps partiel créés pour 10 000 emplois à temps plein détruits).


Les entreprises moins optimistes

Lorsque l’on interroge les entreprises afin de dessiner une tendance prospective, les réponses sont teintées d’une nette prudence pour les créations d’emplois à venir. Si le secteur des technologies - avec des annonces de suppression de postes parfois massives - a largement capté l’attention des dernières semaines, il peine à se traduire dans les chiffres du chômage, à un plus bas de plusieurs décennies (3,4%). Cela s’explique par le poids limité de la technologie dans l’emploi total (bien loin de son poids en Bourse), mais aussi parce que le marché du travail est particulièrement fluide, avec encore de très nombreux emplois non pourvus (plus de 11 millions contre 6 millions en moyenne). Ainsi, beaucoup de salariés qui perdent leur emploi, en retrouvent très rapidement, sans solliciter d’allocations chômage.

Néanmoins, cette tendance semble se retourner progressivement. Selon la dernière étude de la National Fédération of Independant Business (NFIB) sur les PME, les velléités d’embauche des chefs d’entreprises américains sont aujourd’hui sur des plus bas, voisins des niveaux de la pandémie. Et bien que les millions d’emplois non pourvus constituent un matelas contre un retournement brutal du marché du travail, l’étude plaide également pour plus de prudence, indiquant que les difficultés à pourvoir des emplois vacants reculent.


Et les ménages ?

Aux États-Unis, la solidité du marché du travail a souvent constitué un facteur de confiance soutenant la consommation. C’est encore le cas aujourd’hui alors que le freinage de l’économie américaine se poursuit. La consommation a régulièrement surpris positivement malgré le choc inflationniste subi. Pour autant, le dernier rapport du Conference Board montre que la confiance des ménages à l’égard du marché du travail s’effrite.

Historiquement signe précurseur d’une remontée du taux de chômage, l’écart entre ceux qui considèrent qu’il est difficile de trouver un emploi et, à l’inverse ceux qui considèrent qu’il aisé de se faire embaucher, semble avoir franchi un point d’inflexion qui met en exergue une dégradation des conditions d’accès à l’emploi. Même tendance au travers du taux de démission qui avait atteint des sommets depuis la pandémie et revient progressivement à la normale.


Marché du travail et taux de chômage, des indicateurs retardés, mais pourquoi si importants ?

Habituellement, le marché du travail et le taux de chômage constituent des indicateurs retardés, confirmant l’ampleur des dégâts causés par les retournements de cycle, mais ne permettant pas de les anticiper. Alors que les données ont été considérablement perturbées par la pandémie, que des mutations profondes du fonctionnement du marché du travail sont peut-être à l’œuvre, celui-ci constitue la variable qui conditionne la poursuite du resserrement monétaire de la Fed, et donc l’ampleur du freinage du cycle à venir.

La théorie de la « récession sans chômage », qui repose sur la difficulté des entreprises à remplir les emplois laissés vacants, suite à la crise sanitaire, et qui les pousserait aujourd’hui à retenir à tout prix leur salariés, devrait prochainement être mise à l’épreuve. Il est vrai que les nombreuses annonces de destructions d’emplois contrastent avec les chiffres publiés par le Bureau Of Labor Statistics (BLS), mais ce n’est peut-être qu’une question de temps. Comme pour l’inflation, les perturbations inédites, conséquences de la pandémie, ne peuvent rentrer dans l’ordre rapidement.

Enfin, ces signaux d’une fragilisation du marché du travail sont aussi le talon d’Achille de la consommation américaine. Alors que les ménages ne peuvent plus autant compter sur l’épargne accumulée pendant la crise sanitaire (remontée de leur taux d’épargne depuis ses plus bas), ni sur le recours au crédit (remontée des taux et resserrement des conditions d’octroi de crédit), la facilité à trouver un emploi et les hausses de salaires deviennent les seuls moyens d’entretenir leur consommation.

NB : notre indicateur composite du marché du travail est constitué de différentes variables normalisées par rapport à leur moyenne historique dont ISM Employment (services et manufacturier), taux de démission, étude du moral des ménages du Conference Board et NFIB Small Business Survey.

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