Amplegest : "Greenwashing" : méfiez-vous des effets d’annonce !

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Amplegest : "Greenwashing" : méfiez-vous des effets d’annonce !

Comment repérer les fausses promesses et les mensonges des entreprises se vantant d’intégrer les enjeux ESG ? Par une démarche d’investisseur professionnel évaluant concrètement les actes au-delà des déclarations d’intention.
 
Depuis bientôt un an, la réglementation ESG applicable aux entreprises (cotées et non cotées) progresse à marche forcée. La « taxonomie environnementale » oblige désormais les entreprises européennes à classifier leurs activités économiques selon leur impact sur l’environnement et à publier leur niveau d’alignement. Dès 2024, de nouvelles obligations de reporting de durabilité (directive CSRD) vont contraindre les sociétés à publier des informations très détaillées (en matière environnementale, sociale et de gouvernance) en suivant des normes européennes. Et la taxonomie sociale est déjà largement en préparation…
 
Dans ce contexte de plus en plus contraignant, de nombreuses entreprises, profitant de l’attrait grandissant pour la finance durable et d’une réglementation encore floue, exercent encore des pratiques de communication trompeuses. Car, entre l’affichage des bonnes intentions et la réalité, il y a parfois un gouffre. Ainsi, la chasse au « greenwashing » est devenue un enjeu crucial pour tous les investisseurs désireux de sélectionner des émetteurs vraiment respectueux des critères ESG (environnement, social, gouvernance).
 
L’Agence de la transition écologique (ADEME) attire ainsi l’attention des investisseurs sur l’utilisation de mots vagues, de visuel confus, et sur la mise en avant de données reposant sur des preuves inexistantes ou d’auto-certifications contestables alors même que leurs actions contredisent les belles promesses prononcées. Par ailleurs, le manque d’informations ou la mise en avant de points hors sujets doit alerter l’investisseur scrupuleux.
 


Neutralité carbone : la seule mesure des Scope 1 et 2 est insuffisante


Les Etats et les entreprises sont aujourd’hui engagés dans une course de fond : atteindre la neutralité carbone à horizon 2050 pour respecter les engagements pris lors de l’Accord de Paris en 2015. Cette neutralité signifie simplement que l’émetteur en question ne doit pas émettre davantage de gaz à effet de serre (GES) que ce qu’il absorbe. Or, le calcul des émissions de carbone reste sujet à contestation.
 
En effet, de quel « scope » parle-t-on ? Si on se limite aux émissions scope 1 (émissions directes de gaz à effet de serre d’un émetteur) et scope 2 (émissions indirectes de GES liées à la consommation d’énergie nécessaire à la fabrication d’un produit ou service), on ne prend pas en compte le scope 3 qui permet d’évaluer les émissions directes et indirectes dans leur intégralité, pour chaque étape de la chaîne de valeur. Cela suppose de disposer des données nécessaires pour être en mesure de calculer les émissions en amont (upstream) et en aval (downstream).
 
Or, le montant du scope 3 peut s’avérer largement supérieur à celui des scope 1 et 2. En outre, l’utilisation abusive de mesures de compensation d’émission de carbone permet de détourner le concept de neutralité carbone et de tromper le public. Ainsi, telle major pétrolière affiche des objectifs de neutralité carbone (en plantant des arbres en Asie) tout en continuant de développer de nouveaux projets pétroliers et gaziers (en Afrique).
 
Par ailleurs, les agrocarburants vantés comme des énergies de transition sont aujourd’hui contestés si l’on prend en compte l’ensemble des émissions de gaz à effet de serre tout au long de leur cycle de vie.
 

Promesses environnementales : le diable est dans les détails
 

La promesse de protection de l’environnement affichée par de nombreux groupes industriels cache souvent une réalité bien différente. Prenons l’exemple d’un producteur d’acier qui met en avant dans son rapport annuel 2022 sa volonté de réduire sa consommation d’eau et de protéger la biodiversité et les écosystèmes. Problème: aucun objectif quantitatif n’est avancé et aucun programme concret mis en œuvre. On découvre au contraire que la consommation d’eau par tonne d’acier produit par cet aciériste a augmenté, passant de 2,7 m3/tonne d’acier en 2021 à 3,7 m3/tonne d’acier l’an dernier.
 
Tel autre groupe chimique d’envergure internationale clame haut et fort sa volonté de réduire son impact environnemental et de développer des techniques de production bénéfiques pour la planète. Mais, dans le même temps, le groupe doit répondre d’une condamnation aux Etats-Unis dans le cadre d’une affaire de contamination des eaux usées aux PCB, une substance cancérigène et nocive pour l’environnement, officiellement interdite en 1979.
 
Enfin, citons telle marque de vêtements célèbre se vantant d’utiliser du coton biologique et du polyester recyclé. Aucun label indépendant ne vient pourtant certifier le caractère biologique du coton utilisé. Par ailleurs, le lavage du polyester recyclé relâche des microparticules de plastiques dans l’eau, ce que se garde bien de nous préciser l’entreprise.
 

La trajectoire climatique : un effort forcément collectif
 

Les entreprises qui se veulent engagées doivent donc dépasser les effets d’annonce et définir des objectifs lisibles et concrets, certifiées par des labels indépendants pour ne plus être accusées de pratiquer le « greenwashing ». Elles doivent aussi expliquer clairement comment des objectifs climatiques ambitieux (réduction d’émission, trajectoire…) pourront être atteints grâce à aux actions entreprises avec les principales contreparties (fournisseurs, clients).
 
Le groupe Schneider Electric s’est par exemple fixé des objectifs à court et long terme de réduction de ses émissions en absolu (et non en relatif) sur tous ses scopes (1, 2 et 3). Pour permettre la réalisation de ces objectifs ambitieux, il a décidé d’accompagner ses 1.000 premiers fournisseurs pour réduire leurs émissions de CO2 de 50% d’ici 2025. C’est ainsi la preuve que certaines entreprises jouent le jeu et que le rôle des investisseurs est justement de discerner les émetteurs vraiment engagés (oui, ils existent !) de ceux qui profitent des contours encore flous de la réglementation.
 
Pourtant, celle-ci avance et si la disparition du « greenwashing » n’est pas pour demain, il va devenir de plus en plus difficile pour les entreprises dévoilant des informations mensongères ou incomplètes de passer entre les mailles du filet de la finance responsable. Investisseurs, analystes, associations engagées (ONG) ou épargnants veillent désormais au grain.
 
A l’avenir, les entreprises qui ont trop axé leurs efforts sur la communication et non sur la mise en œuvre de mesures concrètes risquent de perdre toute crédibilité auprès de la communauté financière et de la société dans son ensemble.

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