Neutraliser la CSM (PUMA) en 2025 : mode d’emploi pour investisseurs privés et professionnels du patrimoine


La Protection universelle maladie (PUMA), issue de la loi n° 2015-1702 du 21 décembre 2015, garantit la continuité des droits à l’assurance maladie pour toute personne résidant de façon stable et régulière en France. Concrètement, la réforme a supprimé les « trous de couverture » lors d’une perte d’emploi, d’un changement familial ou d’une période sans activité.
Pour financer ce droit, a été créée la cotisation subsidiaire maladie (CSM) : une contribution qui cible les foyers vivant principalement de revenus patrimoniaux (placements financiers, immobilier, plus-values) quand les revenus professionnels sont faibles ou inexistants. Point important rappelé par la Cour de cassation (2ᵉ civ., 11 déc. 2023, n° 21-18.650) et le Conseil d’État (17 janv. 2024, n° 470112) : la CSM est une cotisation, pas un impôt. Cela entraîne des conséquences très pratiques : déductibilité, contrôles URSSAF, prescription de trois ans.
Quand vos clients basculent-ils dans la CSM ?
Tout se joue autour du PASS 2025, fixé à 47 100 €.
Deux seuils, à apprécier simultanément, déclenchent l’assujettissement :
Revenus d’activité < 9 420 € (soit 20 % du PASS) ;
Revenus du capital > 23 550 € (soit 50 % du PASS).
L’examen se fait au niveau du foyer : pour un couple marié ou pacsé, le dépassement du seuil d’activité par un seul conjoint suffit à écarter la CSM. C’est un point clef d’optimisation : un mandat social faiblement rémunéré ou quelques honoraires de conseil peuvent suffire, s’ils permettent d’atteindre les 9 420 €.
Que met-on dans l’assiette ?
Le socle, ce sont les revenus patrimoniaux au sens de l’article L.136-6 du Code de la Sécurité sociale :
loyers (nu, et parfois meublé selon les cas), intérêts et dividendes, jetons de présence, plus-values mobilières et immobilières, ainsi que des distributions réputées (par exemple liées à certains trusts ou sociétés étrangères).
À l’inverse, restent exclus de l’assiette notamment les gains exonérés du PEA après 5 ans et la plus-value sur la résidence principale.
Deux garde-fous encadrent le calcul :
Un abattement forfaitaire de 0,5 PASS (23 550 €) pour neutraliser les patrimoines modestes.
Un plafond d’assiette fixé à 8 PASS (376 800 €) pour éviter une charge disproportionnée.
Comprendre la formule (sans la subir)
La relation de calcul peut s’écrire ainsi :
CSM = 6,5% × (A – 0,5 × PASS) × (1 - R / (0,2 × PASS)), avec 0 ≤ R < 0,2 PASS
A désigne l’assiette patrimoniale brute (avant abattement) ;
R représente les revenus d’activité du foyer.
Lecture métier : plus R est proche de zéro, plus le coefficient réducteur est faible et plus la CSM est élevée. Quand R atteint 20 % du PASS (9 420 €), la contribution tombe à zéro. L’intuition à donner à vos clients est simple : un peu d’activité peut peser beaucoup sur la facture finale.
Exemple rapide
Couple percevant 150 000 € de dividendes et 15 000 € de loyers, pour 7 000 € de revenus d’activité.
Assiette après abattement : 165 000−23 550 = 141 450 €.
Modulateur d’activité : 1−(7 000/9 420) =0,2571
CSM 2025 = 2 364 €.
Moralité : un revenu d’activité encore trop court (7 000 € < 9 420 €) allège la note mais ne l’annule pas.
Comment la CSM est-elle appelée ? Quel est le calendrier ?
La mécanique est rodée :
3ᵉ trimestre de N+1 : la DGFiP transmet les informations fiscales à l’URSSAF.
Novembre : un avis est déposé dans l’espace en ligne du cotisant, avec une seule échéance à 30 jours.
Au-delà : majoration de 5 % et possibilité de mesures d’exécution (saisie sur compte, avis à tiers détenteur).
Prescription : 3 ans à compter de la mise en recouvrement ; la CSM due au titre des revenus 2022 n’est plus réclamable après le 31 décembre 2025.
Côté contentieux, le redevable dispose de 2 mois pour déposer une réclamation auprès de l’URSSAF. En cas de désaccord, la procédure se poursuit devant la Commission de recours amiable, puis le pôle social du tribunal judiciaire.
Cas fréquents en clientèle internationale : affiliation et A1
Le principe européen (règlement CE n° 883/2004) est celui de l’unicité de législation : on ne cotise qu’à un seul régime. Dans la pratique, l’URSSAF demande chaque année un certificat A1 (ou équivalent). La jurisprudence a confirmé que l’absence ou la production tardive de ce document peut déclencher la CSM en France, avec un risque de double prélèvement (Cass. 2ᵉ civ., 19 mai 2022 ; CE, 7 juil. 2022).
Nuance importante : un arrêt du 27 février 2025 admet que des revenus frontaliers ayant déjà supporté des prélèvements sociaux à l’étranger soient exclus de l’assiette française.
En parallèle, deux décisions du 27 février 2025 ont validé la transmission automatisée des données fiscales à l’URSSAF : finalité jugée légitime (percevoir une cotisation ouvrant droit à prestation), conservation limitée à trois ans et information des usagers.
Conseil opérationnel : pour tout client mobile, anticiper et archiver les A1 (un par année), consigner les périodes d’activité, le pays d’affiliation et les justificatifs de prélèvements sociaux à l’étranger. Cette discipline documentaire fait souvent la différence en cas de contrôle.
Stratégies d’optimisation : efficaces… et sûres
L’optimisation de la CSM reste une affaire de seuils et de timing :
Le plus puissant : sécuriser 20 % du PASS en revenus d’activité (9 420 € en 2025). Un mandat social (gérance/présidence) avec rémunération modeste, ou quelques missions ponctuelles peuvent suffire, sous réserve d’une réalité économique et d’une documentation solide.
Piloter le calendrier des revenus patrimoniaux pour éviter le dépassement de 50 % du PASS (23 550 €). Deux leviers simples : décaler une distribution de dividendes à l’exercice suivant, étaler des cessions de titres sur deux années.
Petites plus-values : les cessions de faible montant peuvent bénéficier d’exonérations ; le fractionnement des ventes est parfois pertinent, dans le respect des règles applicables et sans artifices.
Clients mobiles : sécuriser l’affiliation étrangère. Demander l’A1 dès le début de l’activité hors de France, puis archiver chaque document ; en cas de flux mixtes (France/étranger), cartographier précisément les périodes et juridictions.
Audit annuel (septembre-novembre) : faire un point patrimonial & social avant la fin de l’année civile pour vérifier les seuils, ajuster dividendes/cessions, valider l’atteinte des 9 420 €, et anticiper un éventuel appel URSSAF.
Ligne rouge : pas de montages « cosmétiques ». Les solutions doivent reposer sur des flux réels, une activité véritable, et une documentation claire (conventions, factures, PV, bulletins). C’est la meilleure protection en cas de contrôle.
Messages-clés à transmettre à vos clients
La CSM n’est pas un impôt, c’est une cotisation : déductibilité et procédure URSSAF à la clé.
Tout se joue sur deux seuils (9 420 € d’activité / 23 550 € de revenus du capital). Un seul conjoint au-dessus du seuil d’activité peut neutraliser la CSM pour le couple.
La formule est lisible : abattement 0,5 PASS, plafond 8 PASS, coefficient lié à l’activité.
Calendrier : avis URSSAF en novembre N+1, 30 jours pour payer, 5 % de majoration au-delà, prescription triennale.
International : A1 annuel indispensable ; sans lui, la CSM peut tomber même si l’on cotise ailleurs. Des revenus déjà ponctionnés à l’étranger peuvent être exclus de l’assiette française selon la jurisprudence récente.
Optimisation : viser 9 420 € de revenus d’activité, lisser les flux patrimoniaux, auditer en fin d’année, archiver soigneusement.
Pensée comme un mécanisme de solidarité, la CSM peut représenter plusieurs milliers d’euros pour les ménages qui vivent principalement de leur patrimoine. La bonne nouvelle, c’est que sa mécanique est prévisible : deux seuils faciles à piloter, une formule transparente et un calendrier connu. Pour le conseiller, la valeur ajoutée consiste à orchestrer les flux (dividendes, cessions) et à garantir un revenu d’activité suffisant, tout en bétonnant la preuve d’affiliation pour les clients mobiles. Avec un audit annuel, un suivi documentaire rigoureux et des choix de calendrier assumés, on peut annuler la CSM ou en réduire fortement l’impact, sans risque juridique inutile.
Par Amaury Demarta, Dirigeant, Millenium Gestion Privée
Références
Loi n° 2015-1702 du 21 déc. 2015, art. 59.
C. séc. soc. : art. L.380-2 et L.136-6.
PASS 2025 : 47 100 € (arrêté du 19 déc. 2024).
Cass. 2ᵉ civ., 11 déc. 2023, n° 21-18.650.
CE, 17 janv. 2024, n° 470112.
Cass. 2ᵉ civ., 19 mai 2022, n° 20-18.793.
CE, 7 juil. 2022, n° 457193.
Cass. 2ᵉ civ., 27 févr. 2025, n° 22-21.800.
CE, 27 févr. 2025, n° 469101 et 469102.
Chaque jour, nous sélectionnons pour vous, professionnels de la gestion d'actifs, une actualité chiffrée précieuse à vos analyses de marchés. Statistiques, études, infographies dans divers domaines : épargne, immobilier, économie, finances, etc. Ne manquez pas l'info visuelle quotidienne !
Ne loupez aucun événement de nos partenaires : webinars, roadshow, formations, etc. en vous inscrivant en ligne.

.webp)







.webp)


























