Le Private Equity conserve-t-il tout son potentiel ? (NextStage AM, VIP Conseils, Magnacarta Group)

À l’occasion de Patrimonia 2025, Jean-David Haas, Directeur Général de NextStage AM a répondu aux questions de François Meziere, Directeur Général de VIP Conseils et de et Julie Compagnon, Présidente de Magnacarta Group.
Comment rendre le Private Equity plus accessible ? L’afflux de capitaux sur ce marché impact-il les opportunités d’investissement ? NextStage investit il de façon minoritaire ou majoritaire ? Comment les valorisations des entreprises évolue-t-elle ?
Julie Compagnon : Nous parlons souvent de capital investissement sur le long terme, mais en quoi véritablement les solutions de NextStage se différencient-elles par rapport aux autres investissements de long terme ?
Jean-David Haas : C'est une excellente question, Julie. Et le long terme, tu nous connais maintenant depuis plus de 20 ans. Et tu sais que c'est important pour nous pour une raison simple : il y a dix ans, nous avions une énorme frustration avec Grégoire et tous les associés de NextStage. Quand tu accompagnes un entrepreneur, quand tu accompagnes une PME dans un fonds classique, au bout d'un moment, généralement cinq ans, il faut vendre. C'est comme si tu étais très heureux dans ton mariage et qu'on te dit qu'au bout de cinq ans, tu es obligé de divorcer. Et donc, dans certains cas, ce n'est pas mal. Mais dans 30 % des cas, nous nous sommes dit que c'était quand même très triste parce qu'il y a une vraie relation. Il y a de vraies choses que nous pouvons continuer à faire, à apporter à l'entrepreneur. Donc, nous avons décidé il y a dix ans de lancer NextStage Evergreen, notre solution de long terme pour pouvoir continuer l'aventure avec les meilleurs entrepreneurs et ceux qui ont encore de l'énergie pour les années à venir. C'est ce que nous avons appelé finalement un mariage à durée déterminée, mais avec tacite reconduction. Et donc, tant que les deux parties sont heureuses, nous continuons l'aventure.
Valorisation et cycles du non coté : un regard de long terme
François Meziere : J'ai une question concernant les valorisations des entreprises, parce qu'il y a beaucoup d'attrait sur le marché du non coté. Les sociétés sont, me semble-t-il, assez chères. Et en parallèle, nous avons des sociétés cotées dont les multiples d'EBITDA sont faibles. Qu'est-ce que tu penses de ça ? Est-ce que tu penses que nous ne payons pas trop cher aujourd'hui les entreprises qui sont non cotées ?
JDH : Alors, ce qui est intéressant depuis 25 ans, c'est que nous nous apercevons qu'il y a deux cycles : il y a le cycle des valorisations boursières et il y a le cycle des valorisations non cotées. Et ce sont deux cycles qui ne sont pas parallèles, qui s'intercroisent. Donc effectivement, tu as raison, il y a des moments où les sociétés cotées sont plus attractives que les sociétés non cotées. Ce qui est intéressant dans la période actuelle, c'est que nous nous apercevons qu'il y a quand même de très, très belles sociétés qui profitent de la crise que nous sommes en train de vivre. Et est-ce que c'est normal qu'elles valent un petit peu plus cher qu'en Bourse ? Ce n'est pas normal. Puisqu'en fait, finalement, nous nous apercevons que la Bourse aujourd'hui, parce qu'il y a des contraintes de liquidité également pour les petites PME, est plus décotée. Mais finalement, il n'y a pas une liquidité qui est très forte. Alors que sur les sociétés non cotées, elles vont pouvoir consolider. Et donc, si tu peux rentrer dans ces sociétés-là, en fait, tu t'aperçois que dans la durée, tu es gagnant. Donc, je pense qu'il faut prendre un peu de recul par rapport à cette histoire de valorisation. La clé, c'est quoi ? La clé, c'est quand même de trouver en premier lieu une affaire bien gérée avec des entrepreneurs de qualité, qui ont la vision, qui ont des opportunités de consolidation de leur secteur et qui n'ont pas envie de s'embêter avec les contraintes boursières qui, aujourd'hui, créent ces décotes.
Rendre le capital investissement plus accessible
JC : L'accessibilité, c'est souvent un frein sur le capital investissement. Pour les épargnants, le ticket d'entrée est quand même un peu important. Avez-vous fait, vous, des innovations pour rendre cela un peu plus accessible ?
JDH : En fait, nous vivons une période qui est exceptionnelle. C'est-à-dire que nous voyons l'arrivée des fonds de pension français. La force du capitalisme anglo-saxon, ce sont ces fonds de pension. La fragilité du système en France, c'est le système de retraite que nous connaissons avec toute la crise que nous vivons à cause de cela. Et nous, la chance que nous avons, c'est que nous avons poussé en France pour que l'assurance-vie et le PER, qui sont les deux outils aujourd'hui préférés des Français pour préparer leur retraite, puissent s'ouvrir à la classe d'actifs du capital investissement. Donc, si vous avez souscrit tous les deux à notre UC NextStage Croissance, vous avez raison de le faire et faites-le pour votre retraite. Alors toi, Julie, c'est pour dans 50 ans. Toi, François, c'est pour dans 40 ans. Mais ce qui est intéressant, c'est que l'innovation ne vient pas que de nous. Elle vient aussi des pouvoirs publics qui ont pris conscience de cela et surtout des assureurs-vie. Et nous pouvons remercier AXA, Spirica, Generali, Suravenir, AGEAS qui nous aident et qui assurent la liquidité. Donc aujourd'hui, vous pouvez acheter du non coté et avoir la liquidité qui est assurée par votre assureur-vie. Donc c'est extraordinaire. Vous avez le meilleur des deux mondes sans la décote que vous avez sur les marchés cotés.
Le non coté : un placement pour tous les épargnants
FM : Mais justement, est-ce que tu crois que ça s'adresse à tout le monde ? Est-ce que n'importe qui, qui a un contrat d'assurance-vie ou un PER, doit ou peut souscrire un fonds de non coté ?
JDH : Non seulement j'en suis convaincu. Après, en fonction de ton patrimoine, tu vas en mettre plus ou moins. C'est-à-dire que si tu es la plus grande fortune française, tu peux avoir 80 % de non coté. Si tu es en train de constituer une épargne, et nous le voyons bien chez les jeunes à long terme, eh bien commencez par en mettre 10 %, ça me semble être une bonne solution. Et en fonction de tes besoins de liquidité, tu vas pouvoir augmenter progressivement cette allocation si tu as l'argent pour le faire. Probablement que le PER est un bon moyen, puisque le temps est long, pour investir dans du non coté, plus que dans l'assurance-vie. Mais non seulement c'est un super moyen, mais moi, je vais même un peu plus loin : c'est que c'est une obligation morale. Parce que, finalement, aujourd'hui, qui crée l'emploi en France ? Est-ce que ce sont les grands groupes ? Non, parce que quand tu regardes les charges patronales qui sont payées en France, pour un grand groupe, c'est souvent moins cher d'embaucher à l'étranger. Est-ce que c'est l'administration ? De moins en moins. Donc, en fait, ce sont les PME qui créent les emplois. Et donc, si nous voulons que nos jeunes restent en France, il faut que ces PME-là les accueillent. Et nous avons besoin de fonds d'investissement qui investissent dans ces PME non cotées, puisque 99 % de ces PME sont non cotées. Pour justement alimenter en emploi notre pays.
Le marché du non coté et le potentiel des PME françaises
JC : J'ai quand même une interrogation. Le marché du coté est très large. Si je veux acheter du Air Liquide, c'est facile d'en acheter. Pour toi, en tant que gérant, c'est facile de pouvoir me rendre service et trouver des titres. Il y a beaucoup d'afflux, il y a beaucoup de capitaux qui arrivent sur le marché du non coté. Est-ce qu'il y a autant de cibles, pour vous, de qualité à saisir ?
JDH : Alors ça, c'est une excellente question. Et je dis souvent que la France, c'est un pays avec un terreau exceptionnel, mais mal irrigué. Et le problème, c'est que si tu irrigues trop fort un terreau qui a été mal irrigué, bah en fait, qu'est-ce que tu fais ? Tu fais de la boue. Et nous n'avons pas envie de faire de la boue chez NextStage. Donc, là où je tiens à relativiser quand même les choses, c'est que les montants qui arrivent en Private Equity via les CGP et les banques privées sont encore très raisonnables. Donc, nous n'avons pas encore d'afflux. Ce n'est pas comme dans les produits structurés ou dans l'immobilier à la grande époque où il y avait des flux conséquents et énormes. En revanche, notre métier, c'est bien de recevoir à peu près 500 dossiers par an et de choisir les meilleurs dossiers. Et ce qui est intéressant avec notre solution Evergreen, c'est que nous avons vu des sociétés qui avaient des besoins limités il y a 5-10 ans, mais qui maintenant deviennent internationales. Je prends un exemple : Adopt' Parfums, qui est une de nos pépites, qui était une toute petite PME bordelaise, qui opérait autour de Bordeaux, qui faisait à peine 20 M€ de chiffre d'affaires. Maintenant, elle fait plus de 200 M€ de chiffre d'affaires au bout de neuf ans. Et elle, ses besoins ont grandi avec elle. Donc, là où c'est intéressant et là où, dans vos allocations, vous devez être vigilants, c'est bien évidemment de trouver des stratégies où nous pouvons déployer du capital. Il faut toujours que nous ayons plus de projets que de capital à investir. Et peut-être qu'à un moment donné, si jamais les vannes s'ouvrent en grand – on en est loin –, nous vous dirons, un peu comme Moneta à une époque, qu’on ferme un peu la vanne, le temps de nous laisser faire grandir nos équipes. Mais pour l'instant, nous en sommes très, très loin, François et Julie, donc vous pouvez y aller.
L’ESG, une démarche naturelle et ancrée dans l’ADN de NextStage AM
JC : Nous parlons beaucoup, Jean-David, d'impact, d'ESG. Comment faites-vous, dans les véhicules, pour vraiment respecter ça ?
JDH : Alors, l'ESG, pour nous, c'est quelque chose que nous ne connaissions pas il y a 20 ans, mais que nous avons fait naturellement. Dans ESG, il y a plusieurs choses. Il y a, un, tout ce qui touche à l'environnement. Nous avons commencé à investir dans l'environnement dès 2005. Nous avons fait les premiers véhicules électriques pour les villes et les municipalités avec Gruau en 2005. Après, nous avons fait, je ne vais pas tous vous les faire, parce que nous en avons fait une trentaine d'investissements autour de l'environnement. Donc ça, c'était quelque chose où nous nous sommes dit : ce n'est pas parce que nous sommes des ayatollahs de l'environnement… C'est juste que nous nous sommes dit que c'était un secteur hyper porteur, et que donc, notre métier, c'est d'accompagner les entrepreneurs qui sont sur ces tendances de fond. Le deuxième, c'est le S. Le S, c’est-à-dire qu'une PME, elle réussit parce que l'équipe autour de l'entrepreneur grandit, s'associe. Donc, nous avons mis en place les premiers programmes d'intéressement il y a plus de 20 ans pour nos entrepreneurs et pour leurs équipes. Et bien évidemment, quand un entrepreneur prépare sa transmission, c'est essentiel qu'autour de lui, il y ait des champions qui vont porter l'entreprise et des moteurs qui vont allumer la croissance de demain. Et puis, le troisième, c'est le G, c'est la gouvernance. Quand tu es au conseil d'administration de ta société, qu'est-ce que tu fais ? Tu es bien évidemment le copilote auprès de l'entrepreneur. Et donc, tu es un peu son régulateur de vitesse. C'est-à-dire que quand il va trop vite, tu essaies de le freiner. Quand il va trop lentement, tu l'encourages à accélérer un petit peu. Et donc, ça, c'est vraiment notre ESG, au fait, et au cœur de notre ADN. Et bien évidemment, nous n'avons pas encore en non coté, comme ce que vous avez réussi à voir en coté, des labels. Mais c'est vraiment ce que nous aimons faire et ce que nous faisons plutôt pas trop mal.
Une approche flexible : participation minoritaire ou majoritaire
FM : Globalement, quand vous investissez, vous investissez de façon minoritaire dans une entreprise ou majoritaire ?
JDH : Alors, nous faisons les deux. Historiquement, comme notre premier fonds en 2002 faisait 3 M€ et que nous mettions des investissements de 300 000 €, à l'époque, historiquement, nous avons effectivement fait beaucoup d'opérations minoritaires. Mais avec le temps, nous sommes aussi très contents d'aider des repreneurs d'entreprises qui veulent redonner du souffle à une entreprise. Nous sommes aussi très contents d'aider des équipes qui travaillent en entreprise pour prendre le contrôle de leur entreprise. Et puis, quand il faut consolider le secteur, il faut être majoritaire. Donc, nous savons faire les deux aujourd'hui. Je crois qu'un deal sur deux est l'un ou l'autre. En revanche, il y a une constante, c'est que nous sommes toujours bienveillants avec nos équipes. Si vous venez au bureau, vous verrez, nous avons toutes les photos de nos entrepreneurs au mur.
JC : Je confirme, je confirme.
JDH : Tu confirmes. Et la bienveillance, même si tu es actionnaire majoritaire, c'est essentiel, parce que finalement, ce n'est pas parce que tu as une grosse part du capital qu'il faut maltraiter tes équipes et être trop financier avec eux. Nous, nous sommes des gens humains. Nous avons d'ailleurs un écosystème entrepreneurial que nous aimons bien animer. Et je pense que c'est ça aussi la force de NextStage.
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