« Nous adaptons nos stratégies pour être en phase avec le cycle immobilier » Matthieu Navarre (PAREF Gestion), Jérôme Rusak et Antoine Cauchy
Vincent Touraine : Bonjour à toutes et à tous. Merci d'être avec nous pour cette table ronde spéciale Patrimonia 2024 consacrée à PAREF Gestion avec notre invité Matthieu Navarre. Bonjour Matthieu.
Matthieu Navarre : Bonjour Vincent.
VT : Merci d'être avec nous. Vous êtes le Directeur Commercial de PAREF Gestion. Vous allez nous dire ce que nous pouvons attendre de vos SCPI phares dans un marché chahuté. Comment gérez-vous leur liquidité ? Comment faites-vous face à la concurrence des jeunes SCPI aux taux élevés ? Que faut-il en penser ? Vous avez un avis très tranché sur la question. Pour vous interroger, nos deux experts : Antoine Cauchy, bonjour.
Antoine Cauchy : Bonjour.
VT : Vous êtes Co-fondateur Associé de Treeefle Gestion Privée. Et bonjour, Jérôme Rusak.
Jérôme Rusak : Bonjour.
VT : Vous êtes Président de L&A Finance. Merci d'être là. Matthieu, un mot de présentation de Paref Gestion. Que faut-il en retenir ?
Matthieu Navarre : Tout à fait succinctement. Nous existons depuis plus de 30 ans. Nous avons été créés en 1991. Nous sommes une société de gestion de portefeuille immobilier. Nous gérons 3Mds d'épargne pour le compte de 24 000 épargnants et répartis à moitié sur le territoire français et sur le sol européen. 5 SCPI à capital variable. Ce que nous pouvons retenir de Paref Gestion, c'est le temps long. 30 ans que nous existons. Nous étions là hier. Nous avons traversé les cycles. Et puis nous traverserons les cycles de demain. Voilà le temps long. C'est le propre de l'immobilier.
VT : Jérôme, première question.
Jérôme Rusak : Nous avons une rentrée qui ressemble un peu à celle de l'année dernière en SCPI et notamment en immobilier de bureau. C'est pas bon signe. Assez chahutée sur les valorisations, les rendements. Nous avons quand même une petite baisse de taux.
Comment cela va-t-il impacter vos SCPI ? Comment allez-vous vous adapter dans vos stratégies ?
MN : Les baisses de taux sont une bonne nouvelle pour le marché. Nous pouvons dire plusieurs choses. La première chose : nous voyons enfin plus clair sur le marché immobilier dans son ensemble. L'immobilier s'est progressivement repositionné, a retrouvé une prime de risque plus importante en Europe que sur le volet français, où nous avons encore une faiblesse dans les transactions que nous constatons sur l'immobilier professionnel, mais une Europe qui avait corrigé plus tôt et qui se repositionne plus tôt. Donc ça, c'est pour le volet immobilier. Et absolument qui se repositionne. Donc ça, c'est le premier volet. La baisse de taux qui s'est amorcée signifie que nous avons dépassé une période et que le temps de la démonstration est derrière nous. Nous avons tous eu besoin et nous, en tant que société de gestion, d'ouvrir le capot pendant un an et demi, d'oeuvrer avec transparence. Mais aujourd'hui, nous y voyons plus clair. Nous avons parlé de baisse de prix de part. Nous mettons les pieds dedans. Nous savons ceux qui ont baissé et ceux qui ne baisseront pas. Aucune de nos SCPI n'a baissé. Nous avons, non seulement augmenté nos taux de distribution sur tous nos fonds, mais nous n'avons eu aucune baisse de prix de part en 2023 et 2024. Et là à nouveau, sur les expertises à mi-année 2024, nous maintenons ces prix de part. Et avec ces baisses de taux directeurs, le temps de la démonstration est derrière nous et que s'ouvre un nouveau cycle pour le marché immobilier.
Vincent Touraine : Vous en avez la certitude ?
MN : En tout cas, une conviction très forte, appuyée par les politiques de taux.
Antoine Cauchy : Je vais rebondir sur la question de Jérôme. Nous avons toutes les sorties et les baisses de valorisation qui sont passées en 2023. Beaucoup ont semblé attendre,en tout cas dans la partie conseillers en gestion de patrimoine, cette fin d'année 2024, les baisses de taux pour y revenir. Les entrées, les sorties massives, dans ce contexte particulier ne créent-elles pas une distorsion sur le marché des SCPI ? Pouvons-nous dire qu'il y a vraiment des opportunités quand tout le monde entre ou sort en même temps ? Qu'est-ce que PAREF fait dans sa gestion ou dans sa stratégie d'acquisition pour s'en sortir ?
MN : Sur la liquidité, Antoine ?
AC :
Sur la liquidité, puis sur la gestion courante, de dire il y a des entrées, il y a des des flux qui arrivent, comment les gérer si tout le monde les gère en même temps ?
MN : Il y a plusieurs questions en une. Si nous nous sommes posés autant de questions par le passé, c'est parce que tous les fonds ne sont pas dans la même situation. Ils n'ont pas acheté en même temps. Ils n'ont pas été exposés aux mêmes catégories, aux mêmes classes d'actifs et pas sur les mêmes territoires. Les bureaux de grandes superficies ont pâti de la situation et continueront à en pâtir. L'Europe a déjà corrigé plus fortement que la France, mais s'est déjà repositionnée. Nous allons donc affronter ce cycle de deux manières. Les SCPI qui collectent, nous serons tout à fait vigilants sur le volet français, sur lequel nous avons encore une faiblesse dans la somme de transactions constatable sur le marché. Nous avons transacté 5 Mds€ au premier semestre de 2024. Sur le volet allemand, c'est 25 Mds. C'est 32 sur le Royaume-Uni. C'est 75 en Europe. Donc la France reste aphone. Soyons prudents. Achetons avec maîtrise lorsque nous investissons. Soyons beaucoup plus opportunistes et beaucoup plus offensifs à l'acquisition. Et le mot "opportuniste" est à retenir sur le volet européen. Ça, c'est lorsque les flux rentrent. Effectivement, il y a le volet cession. Certaines sociétés de gestion et étant trentenaires nous avons des fonds qui ont un peu plus pâti que d'autres, d'un certain nombre de sorties. Et, il faut bien les gérer et simplement trouver un bon équilibre entre les entrées et les sorties. Si d'aventure, il y avait à vendre des actifs, ne pas les vendre de manière précipitée parce que le marché ne s'y prête pas. Donc prudence à l'acquisition. Distingo France, Europe. Et puis attention en cas de vente, vendre sur un marché porteur.
VT : Et aujourd'hui, il y a des vraies questions sur les valorisations.
Et à ce jour, vous avez pour combien en attente de sortie ?
MN : Nous avons deux SCPI historiques, Novapierre 1 et Novapierre Résidentiel, qui pâtissent d'un sujet de liquidité lié au fait que nous avons hérité d'expositions institutionnelles. Donc, nous les avons un peu mis de côté, dans la gamme commerciale avec nos partenaires, conseillers en gestion du patrimoine. Et nous traitons cette liquidité-là. En millions d'euros, nous allons céder quelques 30 ou 40 Ms€ sur ces deux fonds ce qui est tout à fait mesurable sur des actifs parisiens et hors actifs de bureau. Et nous avons réadressé une gamme plus présente, quasiment exonérée d'exposition institutionnelle et qui ne souffre d'aucun sujet de liquidité sur Paref Hexa, Paref Prima et Paref Evo. Paref Prima, parce qu'il y a une nouvelle nomination.
JR : Pas mal de sociétés de gestion communiquent sur des rendements assez élevés sur les SCPI lors que historiquement, nous savons que tout ça finit par se normaliser. Comment voyez-vous chez PAREF l'évolution de ces rendements dans le moyen terme ?
MN : Alors, il y a de la surenchère. Bien sûr, c'est le bon terme. Je comprends l'épargnant qui a choisi les SCPI ces dernières années parce qu'il observait des craintes sur le marché, renforcées aussi par quelques articles de presse et qui disait finalement, je fais quoi de mon épargne dans un contexte où je peux positionner à court terme à 3, 4, 5 % et où j'ai des SCPI qui vont servir du 6, du 7 ou du 8. C'est une vision tout à fait court-termiste. La SCPI est, rappelons le, un produit de long terme. L'immobilier n'est pas une classe d'actifs liquide. Nous avons trop longtemps cru que c'était liquide. Ça ne l'est pas. Et nous nous inscrivons dans le long terme sur la SCPI. Et aujourd'hui, il y a un effet d'aubaine à la création de nouveaux fonds à laquelle nous n'avions pas cédé et qui consisterait à dire, je lance un nouveau fonds pendant un an ou deux, je vais faire une performance tout à fait extraordinaire, je vais drainer énormément de flux de collecte. Oui, mais cette SCPI va aussi devoir s'inscrire dans la durée, s'inscrire sur les 15, 20 prochaines années, va devoir affronter les cycles et donc va avoir un temps de stabilité. Nous n'allons pas nous interdire de lancer des SCPI en période de creux. Non.En revanche, le rôle d'une société de gestion, et c'est ce que nous pensons, c'est aussi de s'occuper de l'associé qui nous a fait confiance il y a 10 ans. Nos taux de distribution sont à la hausse sur nos fonds existants depuis plus de 5 ans. Parce que notre mission première, c'est l'associé qui nous a fait confiance. Nous avons fait le choix de ne lancer aucune nouvelle SCPI en 2024 et de nous concentrer sur la performance de nos fonds et de continuer ce mouvement de hausse que nous avons depuis 5 ans maintenant.
VT : Les SCPI ne sont pas des produits de taux. C'est ce que vous dites.
MN : Pas un produit de taux.
AC : Vous parliez d'opportunité et d'opportunisme. Revenons sur ce point.
N'y a-t-il pas une course à l'opportunité entre tous les gestionnaires de SCPI et donc la contrainte de la gestion de SCPI plus prudente, bon père de famille ?
MN : Il y a une course effective et ça rejoint le propos que nous avions, c'est à dire que c'est un marché très challengé. C'est un marché sur lequel l'effet d'aubaine est à portée de tous, c'est-à-dire que lorsque nous sommes PAREF, nous gérons 3 Mds d'actifs, nous aurions pu saisir cet effet d'aubaine, de lancer un nouveau fonds par effet d'opportunisme et d'opportunité de manière à capter des flux de manière massive. Je reviens sur ce propos très important. Pourquoi n'avons-nous pas saisi cet effet d'aubaine ? Parce que nous considérons que rendre service à l'épargnant que vous avez conseillé il y a 10 ans, c'est de continuer à faire performer son fonds. C'est de ne pas rediriger les flux de manière opportuniste. Et c'est d'être responsable en tant que société de gestion de celui qui nous a fait confiance. Monsieur Michu, qui vit non loin d'ici, qui nous a confié son épargne. C'est notre responsabilité première. Mais ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas beaucoup de travail à avoir. Il y a un travail à avoir sur les fonds. Il y a un travail de saisie d'opportunités mais immobilières au-delà du positionnement produit.
VT : Jérôme, il nous reste deux minutes environ.
Vous avez récemment changé le nom de votre SCPI star, Novapierre Allemagne, qui est devenue, Paref Prima. Qu'est-ce qui se cache derrière ce changement de nom ? Comment cela va-t-il impacter les clients déjà investis et peut-être même les futurs clients en termes de stratégie ?
MN : Ce n'est pas le seul changement de dénomination. Nous avons trois nouvelles dénominations dans la gamme de PAREF Gestion. Paref Hexa succède à Interpierre France. Paref Prima, issue de la fusion de Novapierre Allemagne 1 et Novapierre Allemagne 2 et Paref Evo, qui succède à Interpierre Europe Centrale. Ça va bien plus loin que le changement de dénominations. Ce sont de vraies opérations votées par nos associés en juin lors des assemblées générales et qui relèvent de changements de stratégie d'adaptation dans les stratégies d'investissement. Ça rejoint et ça boucle notre propos. Si nous avons une responsabilité dans le temps long, nous devons adapter nos stratégies dans le temps long. La stratégie qui marchait il y a 30 ans pour Interpierre France, dont nous sommes déjà à la troisième vie, ne marchera peut-être pas demain. Et lorsque nous nous apercevons que nous pouvons élargir les classes d'actifs cibles, que nous pouvons aller sur le territoire européen, dans le cas de Paref Evo, nous devons le faire. Nous avons porté au vote de nos associés lors des assemblée générales ces choix, et qui sont illustrés, qui sont caractérisés par un changement de dénomination, mais qui n'en est que la signature. Aujourd'hui, Paref Hexa, c'est notre véhicule français, SRI 2, locatifs diversifiés en France avec 30 % de locataires étatiques, 78 % de locataires liés à la sécurité, à l'énergie et j'en passe. Paref Prima, c'est donc l'ex Novapierre Allemagne qui a absorbé Novapierre Allemagne 2,1 Md de capitalisation, 30 % d'Europe intégrée.
JR : C'est pas trop un milliard ? Certains se sont posés la question de la taille critique des SCPI. Ne faut-il pas composer avec beaucoup ?
MN : C'est-à-dire qu'Hexa fait 250 Ms € de capitalisation. Prima, 1 Md, c'est vraiment le cœur de portefeuille. Puis nous avons la jeune dernière Paref Evo pour mettre un peu plus de dynamisme, qui a été lancée en 2021, qui ne fait que 40 Ms € de capitalisation et qui peut capter son marché.
VT : Toute dernière question, Antoine.
AC : Que conseilleriez-vous à vos parents s'ils vous disaient qu'est-ce que qu'est-ce que je fais ? Le contexte est compliqué. Les taux baissent. Les taux ont monté très, très vite. Ils vont peut être baisser très, très vite.
Que dois-je faire aujourd'hui avec mon argent ?
MN : Alors d'abord, je ne suis pas conseiller en gestion de patrimoine. Et si je l'étais, je ne conseillerais pas mes parents. Mais ça, c'est tout à fait éthique. Ce que je leur répondrais, et c'est ce que nous, en tant que professionnels de l'immobilier, c'est d'avoir la tête froide. Les cycles, nous en avons traversé. Nous en traverserons. Et il ne faut pas agir irrationnellement, rapidement et par effet d'aubaine. Gardons la tête froide. Réimplantons l'immobilier comme un actif non liquide et de long terme. C'est ce que nous essayons de traduire au sein de PAREF Gestion. Je tiendrais ce conseil.
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