Analyse du marché des Produits Structurés en France : croissance et risques

L'essor fulgurant des produits structurés en France
Le marché français des produits structurés connaît une croissance spectaculaire. Entre 2021 et 2023, les volumes commercialisés auprès de la clientèle non professionnelle ont presque doublé, passant de 23 à 42 milliards d'euros. Cette dynamique s'explique par l'arrivée d'un nouvel acteur étranger et l'expansion des producteurs historiques, notamment le leader du marché.
Les produits structurés sont principalement distribués via l'assurance-vie, représentant au moins 80 % des ventes. Cependant, la moitié de ces produits exclut le grand public de son marché cible, et 8 % sont réservés aux investisseurs avertis.
Sécurité et performance : un équilibre recherché
On observe une hausse constante des produits offrant une protection totale du capital à l'échéance, représentant plus d'un tiers des émissions en 2023. De même, la part des produits à risque modéré (SRI 1 à 3) a augmenté, atteignant 39 %. Dans un contexte de marchés haussiers, ces produits ont majoritairement enregistré des performances positives, avec un rendement annuel médian brut de 6 à 7 % entre 2021 et 2023. Toutefois, le risque de perte en capital en cas de retournement du marché ne doit pas être négligé.
Les produits structurés respectent les recommandations de l'ACPR et les règles de complexité de l'AMF. Hors produits à capital garanti, la majorité présente une complexité faible à modérée, bien qu'une légère augmentation des structurations sophistiquées soit observée. Les indices sous-jacents, souvent classiques (indices ou actions), incluent de moins en moins de mécanismes de décrément. Enfin, la thématique ESG marque un recul.
La cartographie du marché français des Produits Structurés
Au début de l'année 2024, le Pôle Commun de l'Autorité des Marchés Financiers (AMF) et de l'Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR) a entrepris une étude approfondie du marché français des produits structurés. Cette initiative vise à dresser une cartographie précise de ce secteur, en analysant les produits structurés proposés à travers les contrats d'assurance-vie et les comptes-titres, dans le cadre d'offres publiques. L'objectif principal est de quantifier les encours, les volumes de collecte annuels, d'identifier les circuits de commercialisation et de caractériser les produits eux-mêmes, notamment en termes de profil de risque et de sous-jacents.
L'étude se concentre sur un périmètre bien défini. Elle englobe les titres de créance (EMTN) et les fonds à formule qui sont commercialisés en France, sans distinction de la nationalité de la banque émettrice. En revanche, elle exclut explicitement les produits de bourse, tels que les certificats et les warrants, ainsi que les produits structurés réservés exclusivement aux investisseurs professionnels. De plus, l'analyse se focalise sur les producteurs de produits structurés, laissant de côté les distributeurs de ces produits.
La collecte des données a été réalisée auprès d'un échantillon significatif de 10 producteurs, représentant la majeure partie du marché français des produits structurés. Ces données ont été fournies par les producteurs eux-mêmes, sur une base déclarative. L'étude s'appuie donc principalement sur ces informations déclaratives, tout en faisant référence à d'autres sources lorsque cela est explicitement mentionné.
Le portrait robot du Produit Structuré offert aux épargnants français
Le marché français des produits structurés destinés aux épargnants présente des caractéristiques communes et distinctives. La majorité de ces produits sont structurés sous forme d'« autocall », offrant un remboursement automatique anticipé. Ce mécanisme s'active si le sous-jacent atteint une barrière prédéterminée lors d'une observation annuelle, générant ainsi un gain pour l'investisseur.
L'actif sous-jacent est généralement un indice d'actions ou une action individuelle. Bien que les indices traditionnels tels que le CAC 40 ou l'Eurostoxx 50 soient parfois utilisés, on observe une préférence croissante pour des indices plus récents, souvent développés sur mesure par les fournisseurs d'indices en collaboration avec les établissements producteurs. Ces indices peuvent intégrer un « décrément », c'est-à-dire une soustraction d'un pourcentage ou de points à l'indice de base, bien que cette pratique soit en régression depuis 2021.
À l'échéance, si aucun remboursement automatique n'a eu lieu, le produit expose l'épargnant à un risque de perte en capital. Tant que l'indice sous-jacent reste au-dessus d'une « barrière », l'investisseur récupère son capital initial (hors frais et fiscalité), bénéficiant d'une protection contre les baisses modérées du marché. Cependant, une chute de l'indice en dessous de cette barrière entraîne une perte en capital proportionnelle à la baisse, pouvant aller jusqu'à la perte totale de l'investissement.
Enfin, les produits structurés offrant une garantie en capital à l'échéance connaissent une recrudescence notable depuis 2022, profitant de la remontée des taux d'intérêt. Ils avaient presque disparu du marché au cours de la dernière décennie.
Sources : AMF, Direction des Emetteurs sur la base des documentations à caractère promotionnelles contrôlées par les services de l’AMF et les Comités produits hebdomadaires relatifs à la conformité de la Positon AMF 2010-05 ; SRP, France Market Overview 2023 9M
L'Évolution de la collecte annuelle des Produits Structurés en France (2021-2023)
Le marché français des produits structurés a connu une expansion notable de sa collecte annuelle entre 2021 et 2023. Durant cette période, le volume total de la collecte est passé de 23,2 milliards d'euros (Mds €) en 2021 à 41,8 Mds € en 2023, soit une augmentation significative de 41 %. Cette progression est directement liée à la remontée des taux d'intérêt, qui a rendu ces produits plus attractifs pour les investisseurs. Parallèlement à cette croissance en valeur, le nombre de produits structurés commercialisés a également presque doublé, témoignant d'une dynamique forte du marché.

Le marché des produits structurés en France se caractérise par une concentration importante, avec un nombre limité de producteurs, une dizaine environ, qui sont tous des établissements financiers de premier plan. Parmi ces acteurs, les quatre premiers se partagent plus de 50 % du marché, soulignant la position dominante de quelques acteurs clés. Bien que la collecte en euros ait augmenté pour l'ensemble des établissements, il est à noter que deux d'entre eux ont enregistré une progression particulièrement marquée, contribuant de manière significative à la croissance globale du marché. Les données détaillées sur la collecte annuelle par établissement, tant en termes de montant (en Mds €) que de nombre de produits, sont présentées sous forme de graphiques en barres, permettant une visualisation claire de la répartition du marché.
Source : SRP et France Market Overview 2023 9M
La typologie des Produits Structurés : évolution de la complexité et protection du capital en France (2021-2023)
L'analyse de la typologie des produits structurés commercialisés en France révèle une répartition distincte en termes de protection du capital et de complexité. Environ un tiers de ces produits offrent une protection du capital à l'échéance, tandis que les deux tiers restants sont soumis aux directives de la Position AMF 2010-05, qui encadre leur niveau de complexité. Il est intéressant de noter qu'il n'existe pas de différence significative dans la manière dont les produits sont structurés, que ce soit pour ceux distribués via l'assurance-vie ou ceux proposés au public par le biais de comptes-titres.
En ce qui concerne les produits avec protection du capital, une observation importante concerne leur complexité. En termes d'encours, la majorité de ces produits correspondent aux 15 structurations usuelles définies par l'AMF, qui représentent un niveau de complexité faible à modéré. Cependant, cette proportion est en diminution depuis 2021, ce qui suggère une augmentation relative des produits plus complexes au sein de cette catégorie. Si l'on considère le nombre de produits commercialisés, la tendance s'inverse : une part plus importante des produits avec protection du capital est constituée de structurations plus sophistiquées. Cette différence pourrait indiquer que ces produits plus complexes ciblent un public d'investisseurs plus restreint.
Il est également important de prendre en compte que le taux de réponse des établissements sondés a été moins élevé en 2023, ce qui pourrait avoir une influence sur les tendances observées dans les données. Les informations présentées sont complétées par des graphiques qui illustrent les pourcentages des produits structurés respectant les 15 structurations usuelles de l'AMF, en distinguant les encours et le nombre de produits commercialisés pour les années 2021 à 2023.

Rendement des Produits Structurés : l'analyse des performances brutes (2021-2023)

L'analyse des rendements bruts des produits structurés ayant été clôturés entre 2021 et 2023 révèle une prédominance de performances positives. En effet, moins de 1 % de ces produits ont entraîné une perte en capital pour l'investisseur. Le rendement annuel médian pour cette période s'élève à 6,50 %. Il est important de noter que ce chiffre ne prend pas en compte les frais associés aux produits, et ne garantit pas de performances similaires dans des conditions de marché différentes.
Les performances observées varient significativement en fonction de l'indicateur SRI (Synthetic Risk and Reward Indicator). On constate une corrélation positive entre le niveau de risque, tel qu'indiqué par le SRI, et le rendement brut obtenu. Les produits présentant un SRI plus élevé ont généralement affiché des performances brutes supérieures.
Niveaux de risque des Produits Structurés fin 2023 : évolution et répartition
À la fin de l'année 2023, l'analyse des produits structurés révèle une répartition distincte en termes de niveaux de risque. Une part significative, représentant 41 % de ces produits, se situe dans la catégorie de risque faible à modéré (SRI 1-3). Cette caractéristique est souvent associée à la présence de garanties en capital, qui offrent une certaine protection aux investisseurs. À l'opposé, une majorité de 59 % des produits structurés présente un niveau de risque plus élevé (SRI 4-7). Ces produits sont généralement caractérisés par des sous-jacents plus volatils et l'absence de garantie en capital, ce qui expose les investisseurs à un risque de perte plus important. Une portion très limitée, inférieure à 5 %, concerne les actifs présentant un niveau de risque maximal.
La part des produits structurés classés dans la catégorie de risque faible à modéré (SRI 1-3) a connu une augmentation, passant de 9 % à 39 %. Cette progression est attribuée à un contexte économique marqué par des incertitudes, ainsi qu'à un environnement de taux d'intérêt qui favorise les rendements sans prise de risque excessive.
Résumé issu de l'étude complète de l'AMF & ACPR Mars 2024, mis à jour au 1er avril 2025
Contributeurs
Chaque jour, nous sélectionnons pour vous, professionnels de la gestion d'actifs, une actualité chiffrée précieuse à vos analyses de marchés. Statistiques, études, infographies dans divers domaines : épargne, immobilier, économie, finances, etc. Ne manquez pas l'info visuelle quotidienne !

Ne loupez aucun événement de nos partenaires : webinars, roadshow, formations, etc. en vous inscrivant en ligne.

