"La biodiversité devient un facteur de risque incontournable dans l’analyse des entreprises" Yann Louin (Pictet AM)

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"La biodiversité devient un facteur de risque incontournable dans l’analyse des entreprises" Yann Louin (Pictet AM)

Fanny Berthon : Bonjour à toutes et à tous. Bienvenue sur Club Patrimoine. Aujourd'hui, un sujet passionnant avec Yann Louin, Directeur Commercial de Pictet. Bonjour Yann.

Yann Louin : Bonjour Fanny.

FB : Merci d'être avec nous. Je vais présenter Pictet. Vous avez lancé les premiers fonds environnementaux en 2000 et vous êtes leader en matière d'encours
sur les fonds classifiés article 9 avec 8,5 % de part de marché. Nous allons parler d'un sujet passionnant puisque vous nous avez déjà présenté le programme FinBio, mais nous allons revenir en détail sur les grandes caractéristiques de ce programme et nous verrons une méthodologie intéressante.

YL : Merci beaucoup Fanny. FinBio est un programme scientifique, initié par l'Institut de résilience de Stockholm en 2022 et conçu pour accompagner les acteurs financiers dans l'élaboration de stratégies qui visent à préserver le capital naturel et à enrayer la perte de biodiversité.
Donc Pictet AM participe à ce programme en tant que membre fondateur. C'est la seule société de gestion d'actifs présente au sein du programme. Nous apportons notre expertise en matière d'investissement et nous contribuons à la recherche scientifique qui se veut transdisciplinaire et qui a vocation à apporter des solutions pour le changement au sein du modèle financier.

FB : Pourquoi se concentrer sur la biodiversité ?

YL : Nous nous sommes concentrés principalement sur la biodiversité parce que la perte de biodiversité s'accélère partout dans le monde. Cela devient un facteur de risque très important dans l'analyse des entreprises, au même titre que le dérèglement climatique. Les investisseurs ont besoin d'éléments très concrets, très tangibles pour analyser cette perte de biodiversité et l'intégrer dans leur modèle de valorisation. Nous avons développé au sein du programme FinBio un modèle d'évaluation qui s'appelle ESI pour Earth System Impact et qui a vocation à porter une vision plus large et surtout multidimensionnelle de l'analyse de la perte de biodiversité.

FB : Parlez-nous en détail de ce programme, de la technologie qu'il y a derrière, de la technologie d'analyse de l'impact des entreprises sur la biodiversité.

YL : Le modèle ESI innove à plusieurs égards. D'une part, le modèle va prendre en compte les interactions entre les systèmes terrestres, c'est-à-dire que nous allons évaluer les changements qui impactent la santé planétaire au regard de trois grandes variables. D'une part, les émissions carbone, l'utilisation des sols et les prélèvements en eau. Et nous allons considérer les interactions entre ces trois facteurs qui sont très importantes avec la mise en place
de facteurs d'amplification parce que dans certaines zones et en fonction de l'implantation régionale des activités économiques, le prélèvement en eau peut avoir un impact beaucoup plus importante sur l'utilisation des sols et inversement, l'utilisation des sols peut avoir un impact beaucoup plus important sur les prélèvements en eau. Il est important d'avoir cette granularité dans notre étude et d'avoir cette capacité à appliquer des coefficients d'impact, ce qu'on appelle des coefficients ESI, pour chaque actif d'une entreprise régionalement, en fonction de la topographie des sols et en fonction des interactions entre les systèmes terrestres.
C'est très important et ça permet d'avoir une analyse qui soit à la fois multidimensionnelle, qui soit régionalisée, qui intègre des facteurs d'amplification considérés, avec un point de référence scientifique, que sont les limites planétaires. Nous analysons tous ces impacts au regard également de l'état actuel des systèmes terrestres. Cela nous permet d'avoir une analyse très précise de l'impact en termes de perte de biodiversité de chaque site d'exploitation d'une entreprise et donc de pouvoir utiliser cette base de données pour évaluer une entreprise, pour ajuster la valorisation d'une entreprise
et également comme base de discussion avec le conseil d'administration d'une entreprise.

FB : Comment cela se matérialise-t-il en matière de gestion ?

YL : À plusieurs niveaux, nous utilisons ces éléments. D'une part, dans la gestion de nos fonds thématiques. Nous avons une stratégie qui s'appelle Global Environmental Opportunities qui utilise le concept des limites planétaires comme base, comme premier filtre d'analyse des entreprises. Nous avons fait évoluer cette méthodologie avec l'apport du modèle ESI. Nous utilisons également le modèle ESI dans la stratégie Timber, la seule stratégie investie sur le thème du bois et aujourd'hui, 80 % de la biodiversité animale ou végétale résident dans les forêts. Ça aura un impact très important. Et puis, Pictet est un acteur très important en matière de gestion d'encours classifiés article 9. Aujourd'hui, nous avons, au-delà de la méthodologie, la capacité de faire pression sur les conseils d'administration pour faire adopter des résolutions, pour faire évoluer les pratiques des entreprises et c'est vrai que sur cette base de réflexion, nous pouvons alimenter nos discussions.

FB : Merci beaucoup pour ces précisions sur ce sujet ô combien important de la biodiversité. Merci beaucoup.

YL : Merci beaucoup Fanny.

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