Perspectives économiques et financières - Septembre 2024 (Swiss Life AM)
Etats-Unis : les chiffres de l’emploi devraient raviver les craintes de récession ces prochains mois
Europe : l’industrie fléchit sur fond de problèmes cycliques et pour partie structurels
Chine : le soutien des pouvoirs publics au secteur immobilier en difficulté restera limité
L’objectif du durcissement de politique monétaire des banques centrales à partir du printemps 2022 était double : juguler la pression inflationniste immédiate et ancrer les prévisions d’inflation à long terme. Ces dernières se reflètent dans les prix de marché dans les pays débiteurs d’obligations indexées sur l’inflation. Juste avant l’offensive russe en Ukraine, le point mort d’inflation pour les dix prochaines années était proche de l’objectif d’inflation de la Fed et de la Banque de France (sur mandat de la BCE). Après une forte hausse, les prévisions d’inflation se sont entre-temps normalisées.
États-Unis : le débat sur la récession vit
Les mauvais chiffres de l’emploi américain ont déclenché début août de vives craintes de récession, entraînant une brève vague de vente sur les marchés (voir notre « Flash Comment » du 8 août). L’inquiétude s’est apaisée depuis, notamment sur fond de données économiques favorables. En juillet, les ventes au détail ont mieux progressé que prévu, et le PMI S&P Global des services s’est inscrit nettement en territoire positif en août, pour le troisième mois de rang. Toutefois,nous estimons que les craintes de récession vont connaître quelques accès périodiques. Le ralentissement attendu de l’économie américaine s’est produit, et nous prévoyons une nouvelle hausse du taux de chômage. De 4,3% aujourd’hui, il devrait atteindre 4,7% fin 2025, soit une ampleur que n’attend ni la Fed (4,1% fin 2025) ni le consensus (4,2% en moyenne annuelle 2025). La croissance plus faible de la consommation pousse les entreprises à privilégier l’efficacité. Elles embauchent moins et les prestataires signalent dans le PMI d’août, malgré une bonne situation, un emploi en repli. Les enquêtes révèlent que les ménages sont de plus en plus inquiets de l’état du marché de l’emploi. En vue de contrer le risque d’une spirale négative qui pourrait effectivement se muer en récession, le président de la Fed a ouvert la porte à une première baisse de taux en septembre.
En juillet, les chiffres de l’inflation ont montré que le fort repli des deux mois précédents était une valeur aberrante. Coûts du logement et primes d’assurance auto sont remontés, deux éléments qui devraient connaître une nette détente au plus tard en 2025. L’inflation de services cycliques traduit une faible dynamique, ce qui devrait donner le feu vert à la Fed pour normaliser sa politique monétaire.
Zone euro : L’industrie fléchit
La production industrielle dans la zone euro demeure inférieure à son niveau pré-covid. Les données des enquêtes font aussi état d’une morosité ambiante dans l’industrie, p. ex. à travers de PMI faibles. Cette faiblesse persistante est imputable à des facteurs cycliques d’une part. Les entreprises continuent de s’affairer à écouler les stocks excessifs accumulés pendant le boom de la demande qui a suivi la pandémie. À cela vient s’ajouter la faible demande des consommateurs chinois, particulièrement sensible pour l’Allemagne. En outre, le rebond des dépenses de consommation reste timide et pèse également sur la demande intérieure de production industrielle. Enfin, les taux élevés viennent alourdir les dépenses et les investissements. Nous estimons que ces difficultés cycliques vont se résorber dans un futur proche et alimenter au moins une stabilisation de la production industrielle dans la zone euro. Cependant, au vu de la faiblesse persistante du secondaire, la question de difficultés structurelles du secteur se pose. À l’instar du reste de l’économie, il est concerné par le vieillissement de la population active. Au sein du secteur, on assiste également à un report vers des produits hautement spécialisés. Selon nous, cette évolution devrait en premier lieu réduire le volume, mais pas la création de valeur.
Légère hausse de l’inflation globale en zone euro en juillet, passant de 2,5% à 2,6%. L’inflation sous-jacente reste inchangée à 2,9%. L’inflation de nombreux produits du panier de base a reculé, ce qui n’est pas le cas de l’habillement. En Italie, les prix de cet élément ont moins baissé qu’habituellement en juillet.
Allemagne : touchée, mais pas coulée
Indubitablement, l’industrie allemande est en proie à divers défis. Pendant la pandémie, la production a été limitée par les difficultés logistiques et la pénurie de personnel ; aujourd’hui, la faible demande joue un rôle bien plus incapacitant. Les entreprises jugent notamment les carnets de commandes à l’export insuffisamment remplis. Les inconvénients liés à la localisation comme le coût du travail et les impôts professionnels existent depuis longtemps. Toujours nettement supé-rieurs à ceux proposés aux États-Unis, les prix de l’énergie compliquent la concurrence depuis 2021. Bientôt,un vieillissement de la population active plus rapide qu’ailleurs déploiera pleinement ses effets. Selon nous, trois raisons étayent notre prévision de stabilisation de la production industrielle d’ordre cyclique. Primo, la production des secteurs gourmands en énergie repart à la hausse. Secundo, les permis de construire semblent rebondir et le secteur de la construction devrait être le premier à profiter de la baisse des taux. Tertio, la normalisation des stocks reste à l’origine d’une partie de la faible production. Toutefois, elle devrait bientôt prendre fin. Sur plan structurel, nous considérons comme trop pessimistes les mises en garde liées à la désindustrialisation. Certes, l’emploi manufacturier continue de reculer et le volume produit diminue depuis 2017,mais la création de valeur brute reste étonnamment constante. Ainsi, la quantité de biens produite est moindre, mais ceux-ci sont de meilleure qualité, comme en témoigne la progression de l’emploi dans les secteurs correspondants.
Comme prévu, l’inflation a légèrement progressé en juillet, passant de 2,2% à 2,3%. Nous estimons toutefois qu’en août, arrondie vers le bas, elle coïncidera avec l’objectif de 2% de la banque centrale. L’inflation côté services demeure en revanche tenace. L’inflation sous- jacente ne devrait donc pas revenir à 2% avant 2025.
France : Des records à perte de vue
L’espace d’une olympiade, la France a vécu un conte de fée. Les Jeux olympiques ont été une parfaite mise en scène de la créativité française. Même l’eau de la Seine était suffisamment propre pour que les athlètes s’y défient. Les analystes économiques et politiques en revanche évoluent dans des eaux bien plus troubles, en quête d’orientation. On ignore toujours quel camp représentera le ou la future locataire de Matignon que doit désigner Emmanuel Macron. Sans surprise, l’indice de l’incertitude économique en France mesuré par un groupe de recherche américain a fortement augmenté en juillet. La grand-messe sportive donne une lecture déformée des indicateurs économiques classiques. Le PMI de l’industrie a chuté en août, également en raison de forte baisse des commandes domestiques. Le même mois, le même indicateur, mais pour les services, a atteint son plus haut depuis mai 2022. Conséquence, la différence entre les deux secteurs n’a jamais été aussi marquée. De nouveaux records ont été battus dans les stades, mais aussi du côté des données conjoncturelles. L’Insee estime à 0,3% l’effet net des Jeux olympiques d’été sur la croissance du PIB lors du trimestre en cours. La croissance économique devrait également connaître des effets bénéfiques ces prochains trimestres, en provenance de la construction et de la consommation des ménages. La baisse des coûts de financement et la hausse des salaires réels sont à l’origine de cette tendance.
Les prévisions d’inflation des investisseurs (voir page 1) et des consommateurs sont à nouveau bien ancrées. D’après une enquête de la BCE, les ménages français anticipent un renchérissement moyen de 2,0% ces trois prochaines années. À court terme, il sera inférieur : nous prévoyons pour août une baisse sous les 2%, une première depuis trois ans.
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