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Analyses de marchés

J.P. Morgan AM : perspectives des actions internationales

12
May
2023

Synthèse

La hausse des taux d'intérêt a fait émerger de nouveaux signes de tension dans le système financier et l'économie réelle devrait également en pâtir. Les marchés actions sont atones depuis un an, mais certaines mauvaises nouvelles sont déjà intégrées dans les cours. Il faut néanmoins se préparer à l’apparition de nouvelles problématiques à mesure que l'impact de la hausse des taux se répercutera à l’échelle mondiale.

Jusqu'à présent, les bénéfices des entreprises ont très bien résisté après une hausse extraordinaire en 2021. De nombreuses entreprises enregistrent toutefois une baisse de leurs marges et nous prévoyons des bénéfices très faibles en 2023. A l’inverse, les marchés émergents pourraient évoluer à contre-courant et profiter du rebond de la croissance chinoise.

Nos investisseurs se disent légèrement prudents vis-à-vis des perspectives des marchés actions. À long terme, les valorisations semblent aujourd'hui très raisonnables dans la plupart des régions et des secteurs. Et cela n’est pas négligeable. Mais 2023 sera certainement une année plus difficile en raison de l'impact progressif du resserrement de la politique monétaire. Nous avons une préférence pour les actions de bonne qualité. Nous apprécions certaines entreprises industrielles qui connaissent une année plus difficile mais qui conservent de bonnes perspectives à long terme (les plus sûres d’entre elles semblent désormais onéreuses). Les investisseurs vont probablement continuer à bouder les entreprises dont les bilans sont tendus et/ou celles qui ne sont pas encore rentables.


Bilan des derniers mois

Selon un vieil adage du marché, lorsque la Réserve fédérale commence à relever les taux d'intérêt, « quelque chose passe à travers le pare-brise ». Depuis le début du cycle de resserrement actuel, les dégâts sont certes importants mais ils sont globalement limités aux marchés financiers. Les sociétés d'acquisition à vocation spéciale (SPAC), les « actions mèmes », les valeurs de « croissance à tout prix » et les crypto-monnaies ont tous subi des pertes spectaculaires, mais cela n’a pas empêché l'économie réelle de continuer sur sa lancée, à un rythme toutefois beaucoup plus lent.

Pourtant, la récente crise du secteur des banques régionales américaines menace de remettre en cause cette tendance. À l'heure où nous écrivons ces lignes, deux grandes institutions ont fait faillite à une vitesse stupéfiante et l'impact sur l'ensemble du secteur bancaire régional sera très négatif. Ces événements vont probablement entraîner une baisse des marges bénéficiaires, une augmentation des levées de capitaux et un renforcement de la réglementation.

Les banques régionales sont bien entendu une composante importante du système financier et le resserrement des conditions de prêt pourrait nuire à un large éventail d'entreprises. L'immobilier commercial (qui est largement financé par les banques régionales) ainsi que les segments du capital-investissement et de la dette seront probablement les premières victimes de la remontée des taux d'intérêt.

Mais la situation n’est pas aussi catastrophique qu’il n'y paraît. La reprise de l'économie chinoise, qui va profiter de l’abandon récent des politiques très restrictives de lutte contre la pandémie, devrait stimuler les bénéfices des entreprises présentes sur ce marché. L'assouplissement du discours officiel à l'égard des entreprises technologiques - qui ont fait l'objet d'un traitement scrupuleux par les autorités - pourrait également améliorer le sentiment des investisseurs à l'égard des actions chinoises.

Après une année chaotique sur les bourses mondiales, les valorisations ne semblent pas très élevées dans la plupart des régions. Ces ratios de valorisation ne nous renseignent guère sur les performances au cours des douze prochains mois, mais ils sont importants pour les investisseurs à plus long terme. Les multiples des marchés européens et asiatiques, mais aussi dans de nombreux secteurs du marché américain, laissent présager des performances raisonnables pour les investisseurs qui sauront se montrer patients.

Nous pensons par ailleurs que la capacité à diversifier les portefeuilles en réduisant la part du marché actions américaines contribuera aux performances globales des poches actions. Cette tendance commence à s’observer depuis peu, mais elle a été totalement absente pendant la majeure partie des 15 dernières années.

Dans l'ensemble, nos gérants de portefeuille sont neutres ou légèrement prudents vis-à-vis du potentiel de performance des actions. Nous avons une préférence très nette pour les investissements de qualité. Ce n'est pas le moment de faire des compromis car de nombreuses surprises pourraient se révéler très déplaisantes. Des modèles économiques solides, prévisibles et rentables, des équipes de direction aguerries, des bilans prudents et bien financés - autant de caractéristiques que nos investisseurs trouvent particulièrement intéressantes à ce stade du cycle économique et de marché. Mais après une année marquée par des performances dégradées, certaines des valeurs les plus défensives sont déjà onéreuses, ce qui oblige à s’affranchir des choix les plus évidents pour identifier des sources de performance attractives.


Les bénéfices mondiaux résistent, mais des risques subsistent

Il n’est pas inutile de rappeler à quel point la rentabilité a été forte dans la quasi-totalité des régions et des secteurs d'activité. L’essor économique extraordinaire déclenché par les politiques budgétaire et monétaire accommodantes visant à lutter contre le COVID-19 a entraîné une augmentation de près de 60 % des bénéfices des entreprises l’échelle mondiale en 2021. Les bénéfices ont donc atteint des niveaux record, 30 % supérieurs à ceux datant d’avant la récession de 2020. Si les chiffre d'affaires ont augmenté à une bonne cadence, les marges bénéficiaires nettes ont fait encore mieux, avec une progression de 12 % aux États-Unis, par exemple, contre un pic inférieur à 10 % avant la pandémie.

Depuis le début de la phase post-pandémie, les bénéfices ont plutôt bien résisté car les entreprises ont pu augmenter leurs prix et maintenir la croissance de leurs chiffres d'affaires mais ces marges bénéficiaires exceptionnelles ont commencé à diminuer. Les bénéfices du quatrième trimestre aux États-Unis ont baissé de 4 % malgré des chiffres d'affaires en hausse de 5 %, et nous prévoyons une érosion continue des marges bénéficiaires tout au long de l'année 2023. Les rachats d'actions seront utiles (comme toujours), mais dans l'ensemble, nous prévoyons une baisse des bénéfices des entreprises américains d'environ 4 % sur l'ensemble de l'année (Graphique 1). Des risques baissiers entourent toutefois sur cette prévision, compte tenu du niveau exceptionnel des marges actuelles des entreprises. La persistance de l'inflation des salaires ainsi que l'augmentation des dépenses d'investissement et des coûts de financement pèseront sur les bénéfices cette année, alors même que les revenus continueront à augmenter.


La croissance des bénéfices s'essouffle après un boom spectaculaire


La situation est similaire dans d'autres régions, mais certains secteurs d’activité font de la résistance. Les sociétés technologiques cherchent désormais à sabrer dans leurs coûts, un exercice dont le potentiel est considérable après plusieurs années de croissance vertigineuse et d'embauches massives.

De plus, de nombreuses entreprises industrielles devraient pouvoir conserver un fort pouvoir de fixation des prix grâce à des carnets de commandes bien garnis et à l'impact des mesures de relance du gouvernement (comme la loi CHIPS et la loi relative à la science et la loi sur la réduction de l'inflation), dont l’effet ne s’est pas encore fait ressentir. Selon nous, les perspectives de bénéfices devraient être mitigées, mais pas catastrophiques.

Comme nous l'avons indiqué, nos portefeuilles sont composés d'entreprises de grande qualité qui devraient selon nous être en mesure de composer avec la détérioration de la conjoncture économique.

À l'inverse, nous restons à l’écart des entreprises dont le bilan est fragile. Les valeurs de croissance se trouvant en phase de démarrage et qui n'ont pas encore atteint leur seuil de rentabilité pourraient continuer à souffrir, en dépit de la baisse spectaculaire de leurs cours durant l'année écoulée.


L'Europe peut-elle continuer à surperformer ?

En examinant le classement mondial des performances des différents marchés et secteurs lors de notre dernier Comité d’investissement trimestriel, nous avons été surpris de constater que les indices nationaux de la France, de l'Italie et de l'Espagne figuraient aux premières places sur l'année écoulée. Cela faisait en effet très longtemps que ça ne s’était pas produit. Au cours des 12 derniers mois, l'indice MSCI Europe a progressé de 8 % en dollars américains, contre une baisse de 7 % pour le S&P 500 et de 11 % pour l'indice MSCI Emerging Markets.

Après avoir subi des performances décevantes pendant de nombreuses années, les marchés européens peuvent-ils continuer à surperformer ? Notre recherche bottom-up suggère qu’ils pourraient encore enregistrer des gains relatifs et nos investisseurs basés en Europe se disent également optimistes.

Nos analystes pensent néanmoins que les marges bénéficiaires vont souffrir en Europe cette année. Mais grâce à l'impact positif d'entreprises à forte croissance comme AstraZeneca, LVMH et ASML, et à l’augmentation continue des bénéfices des grandes entreprises du secteur de l'énergie, nous pensons que les marges bénéficiaires européennes vont augmenter dans les années à venir. Nos gérants de portefeuille locaux estiment que la région est fortement sous-pondérée par les investisseurs et que les valorisations sont très raisonnables. Ils notent également que les entreprises européennes rachètent enfin leurs actions à un rythme comparable à celui de leurs homologues américaines.

Bien entendu, l'Europe n'a pas été épargnée ces dernières semaines par la nervosité à l'égard des valeurs bancaires. Credit Suisse, qui s'est débattue pendant des années avec une faible rentabilité et divers incidents et scandales, a été contrainte de solliciter l’aide du gouvernement et de fusionner rapidement avec UBS. Nous sommes convaincus que le reste du secteur bancaire est nettement solide après une longue période de durcissement de la réglementation et de vastes opérations de levée de capital.


La réouverture de la Chine entraîne un rebond des bénéfices sur les marchés émergents

2022 a été une année éprouvante tant pour les entreprises que les investisseurs présents sur les marchés émergents. Les bénéfices y ont chuté de 15 % (alors qu’ils ont fortement augmenté dans la plupart des pays développés) et l'indice MSCI Emerging Markets a cédé 15 %. Il a même chuté de 20 % sur les cinq dernières années.

Toutefois, la situation est peut-être en train de s’infléchir. L'économie chinoise, compte tenu de son influence, est désormais en pleine phase de reprise après l'abandon précipité, au début de l'année, des politiques très restrictives de lutte contre la pandémie. Ce changement de cap va selon nous entraîner un boom de la consommation, qui sera alimenté par près de 500 milliards de dollars d'épargne excédentaire accumulés pendant les confinements (Graphique 2). De nombreuses entreprises chinoises ont été contraintes de se restructurer au cours des dernières années et sont beaucoup mieux armées pour profiter de la reprise.


L’épargne excédentaire des ménages chinois a augmenté de plus de 3 000 milliards de RMB (500 milliards de dollars)

En dehors de la Chine, nous constatons une croissance vigoureuse sur les marchés émergents. Notre équipe de recherche prévoit une augmentation des bénéfices en Inde, en Indonésie et à Taïwan cette année. Les marchés émergents se sont certes révélés décevants pendant une longue période et les risques politiques habituels n'ont pas disparu. Mais comme la croissance des bénéfices est plus soutenue que dans les pays développés (une fois n’est pas coutume) et que les valorisations restent raisonnables malgré le récent rebond de la Chine, les investisseurs patients pourraient se voir récompensés cette année.

Le graphique 3 présente les opinions des membres de notre équipe à travers le monde. Dans l'ensemble, ils restent légèrement prudents et mettent l'accent sur les valeurs de qualité au sein de leurs portefeuilles. La technologie a ses partisans mais aussi ses détracteurs.

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