15' Insight – Partie 2 : "Bull-market et bulle cohabitent sur les marchés" Avec Gilles Etcheberrigaray et Igor de Maack
VT : Quel bilan tiré du premier trimestre de cette année sur les marchés boursiers ? Donne-t-il le ton pour la suite ? A-t-on véritablement un bull market sur les marchés actions ? C'est la deuxième partie de ce 15' Insight avec toujours Igor de Maack et Gilles Etcheberrigaray. Rien que pour le CAC 40. On vole de record en record à plus de 8 000 points, on a même dépassé les 8 200 points. Igor, qu'est-ce qui a surtout tiré la hausse au T1 ?
IdM : C'est toujours un petit peu les mêmes, les usual suspects pourrait-on dire ? En gros, tous les secteurs ont quasiment progressé donc c'est un peu la nouveauté par rapport à l'année dernière et les dernières années mais il y a encore des écarts. On n'a pas totalement comblé les écarts entre les secteurs type le luxe, si on regarde la performance de LVMH et les banques BNP Paribas par exemple, si on regarde aux Etats-Unis c'est encore plus criant puisqu'on a notre métronome de performance boursière sur les technos, Nvidia. Mais on a quand même un S&P 500 qui fait aussi bien, voire mieux.
VT : C'est moins déséquilibré.
IdM : Oui parce que c'était beaucoup plus déséquilibré par le passé. Il y a toujours des écarts mais ils ne se creusent plus. On peut dire que la hausse a entraîné d'abord plus d'investisseurs de manière plus large sur plus de secteurs. Après, il ne faut pas oublier que la question, c'est bull market ou bulle market ? Un marché taureau qui avance ou est-ce qu'il y a des zones de bulles ? Ça dépend aussi de ce qu'on va voir sur la politique monétaire parce qu'on actualise les profits avec les taux d'intérêt. Aujourd'hui, je pense qu'en regardant les niveaux de valorisation, on est toujours, en tout cas en Europe, dans l'épure de la moyenne des 10 dernières années. Ce qui compte, c'est quand même la progression des bénéfices sur les 2 prochaines années.
VT : Justement, Gilles, on est dans une bulle ou dans un bull market ?
GE : On a un peu les deux à la fois. Je dirais d'une part, on a une bulle sur la techno, les valorisations Nvidia et les 4 qui restent puisqu'il y en a 3 comme Tesla, on l'a vu hier, qui ont quitté la scène. Sur ce segment-là, pour nous, on est dans une bulle. Sur le reste du segment, le problème, c'est qu'on a un peu le meilleur des deux mondes. On a une croissance nominale extrêmement élevée, surtout aux États-Unis, mais même l'Europe est exportatrice aux Etats-Unis, donc on a des valeurs qui en profitent. D'autre part on a une stabilité des taux et donc on a à la fois de la croissance et des taux stables. Quelque part, la question qui se pose pour le T2 et le T3 : est-ce qu'on va voir la même combinaison qui se maintient ? C'est ça qui va déterminer la poursuite du bull market sachant que le risque qu'on a sur l'intelligence artificielle, on est plutôt dans une bulle là aussi, on va savoir combien de temps elle va durer. En tout cas on a un bull market en ce moment.
VT : Igor, dans ces conditions que fait l'investisseur que vous êtes ?
IdM : Pour reprendre les propos de Gilles sur l'intelligence artificielle, quand est-ce qu'il y a une bulle ? C'est quand la valorisation d'un secteur, d'une technologie, dépasse "son poids macroéconomique" de manière disproportionnée. Nous avons regardé quel était le poids des dépenses informatiques dans le PIB américain, quel était son niveau de croissance, on "symbolise" ça par les dépenses info-tech, l'IT. On est toujours depuis 2020 à 5-6 % du PIB. On a toujours une croissance qui est égale à la croissance nominale, donc à peu près 5 %. Donc, on parle beaucoup d'intelligence artificielle. Comme d'habitude, les marchés anticipent, donc ils voient quelque chose de disruptif, pour reprendre un anglicisme. Mais en fait, macroéconomiquement, on ne voit rien aujourd'hui de particulier. C'est un peu gênant parce que dans les années 2000, internet, qui lui a été vraiment une disruption technologique, les dépenses étaient plutôt autour de 10-15 % en termes de croissance, donc 2 à 3 fois plus que le PIB. Donc vous voyez, là où je rejoins Gilles, il faut faire attention quand il y a vraiment une dichotomie entre la valorisation et la création de valeur ajoutée au PIB. Donc pas de bulles dans les marchés européens, pas de bulles, on en parlera peut-être au Japon, mais une certaine survalorisation d'un secteur qui aujourd'hui est un peu le love money de tous les investisseurs.
VT : Je repose ma question. Comment est-ce que vous investissez dans ces conditions ?
IdM : On reste investi sur les marchés actions, on temporise en termes de timing parce qu'on a bien vu qu'on était sur un plateau, on vient de faire des performances à 2 chiffres sur les indices, donc toujours sur des titres qui ont quand même un couple valorisation-croissance attractif.
VT : Gilles, vos préférences du moment ?
GE : Nous, c'est très simple, on évite tout ce qui est lié à la techno et l'IA et on arrive sur des secteurs qui étaient en souffrance, mais qui donnent l'impression de revenir : l'énergie, les foncières européennes, le Japon, les mines d'or, tout ce qui était...
VT : Tout ce qui est value un petit peu.
GE : Tout ce qui est value, tout ce qui rattrape. C'est ce qu'on joue aujourd'hui, on joue une stagnation, mais un maintien de l'IA à un certain niveau, et le rattrapage de tout ce qui a été en souffrance pendant les 2 dernières années par rapport à cette surperformance.
VT : Bien, c'est tout pour la deuxième partie de ce 15'Insight. À suivre, l'or qui vole de record en record. On va parler aussi du Nikkei justement ou encore du Bitcoin. Que penser de tout ce qui flambe en ce moment ? Restez, avec nous.
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