Accord commercial États-Unis–Royaume-Uni, un compromis ambitieux mais limité

Une annonce très orchestrée pour un texte encore flou
Le jeudi 8 mai, les États-Unis et le Royaume-Uni ont signé un accord présenté comme « historique » par Donald Trump et Keir Starmer. Dans une mise en scène inhabituelle, le président américain a dévoilé le compromis depuis le bureau Ovale, en liaison avec le Premier ministre britannique. Tous deux ont salué un « jour fantastique », évoquant même le 80e anniversaire de la Victoire en Europe pour souligner la portée symbolique de l’annonce.
Pourtant, les contours de l’accord restent partiels et parfois imprécis. Il ne s’agit pas d’un traité de libre-échange en bonne et due forme, mais plutôt d’un ensemble de conditions tarifaires temporaires, établissant un cadre de discussions plus approfondies à venir.
Une baisse ciblée des droits de douane sur l’automobile et les métaux
L’un des principaux points de l’accord concerne les droits de douane sur les véhicules britanniques. Ceux-ci, qui atteignaient 27,5 % avec les surtaxes instaurées par Donald Trump, sont ramenés à 10 %, dans la limite de 100 000 unités par an. Un quota que le Royaume-Uni approchait déjà en volume d’exportation en 2024, selon Downing Street.
Le secteur sidérurgique britannique bénéficie également de cette détente commerciale. Les droits de douane sur l’acier et l’aluminium sont supprimés, ce qui permet aux entreprises concernées de maintenir leur accès au marché américain. Le Royaume-Uni exporte 9 % de sa production d’acier vers les États-Unis, ce qui confère un soulagement réel à une industrie en tension.
Une ouverture agricole réciproque sous conditions strictes
L’accord prévoit aussi une ouverture partielle des marchés agricoles. Londres accorde un quota sans droits de douane de 13 000 tonnes pour le bœuf américain. De son côté, Washington n’a pas précisé le volume des importations britanniques autorisées, mais les autorités américaines ont promis une hausse « exponentielle » des exportations agricoles, notamment de bœuf et d’éthanol.
Le gouvernement britannique a tenu à rassurer ses agriculteurs. Aucune entorse ne sera faite aux normes sanitaires en vigueur, excluant notamment le bœuf aux hormones et le poulet lavé au chlore. Ces garanties restent cruciales au regard des réticences historiques de la population britannique sur ce sujet.
Un traitement préférentiel dans un contexte tarifaire toujours incertain
La signature de cet accord intervient alors qu’une surtaxe générale de 10 % sur les importations vers les États-Unis reste maintenue. Donald Trump l’avait annoncée le 2 avril et a confirmé son maintien, estimant qu’elle représentait un niveau « bas » pour protéger l’économie américaine.
Londres obtient cependant une clause de traitement préférentiel en cas de nouvelles hausses tarifaires sectorielles, notamment sur les produits pharmaceutiques. Ce secteur est stratégique pour le Royaume-Uni, qui abrite deux géants du secteur, AstraZeneca et GSK. Des discussions supplémentaires sont d’ailleurs prévues sur ce sujet.
Une dimension politique forte malgré des résultats limités
Pour Donald Trump, cette signature constitue la première trêve formelle depuis le lancement de sa guerre douanière mondiale. Il a assuré que d’autres accords similaires suivraient, tout en soulignant que ce premier compromis prouvait que « l’Amérique est ouverte aux affaires ». La Bourse de New York a accueilli favorablement la nouvelle, avec une progression notable des principaux indices.
Du côté britannique, Keir Starmer présente cet accord comme le fruit d’une stratégie de conciliation, dans un contexte post-Brexit où le Royaume-Uni cherche à affirmer son autonomie commerciale. Le Premier ministre insiste sur le fait que ce compromis n’a franchi « aucune ligne rouge », et qu’il constitue un socle pour renforcer les relations transatlantiques sans renoncer aux standards européens.
Un accord qualifié de « modeste » par les économistes
Malgré l’enthousiasme affiché, plusieurs analystes relativisent la portée de l’accord. Pour Josh Lipsky, du think tank Atlantic Council, cet accord avec Londres était la « moisson la plus facile » pour Washington, du fait d’un commerce bilatéral déjà équilibré. Il estime que l’impact économique sera limité et que les négociations futures avec des pays comme le Japon ou l’Inde seront nettement plus complexes.
Jonathan Portes, économiste au King’s College de Londres, parle d’une « opération de limitation des dégâts », qui soulage certaines filières mais ne constitue pas un levier de croissance significatif. Paul Ashworth, de Capital Economics, note que malgré l’annonce d’un accord « total », les droits de douane restent aujourd’hui plus élevés qu’avant le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche.
Sources : AFP, Le Monde, Ouest France
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