Entre enjeux géopolitiques et guerre commerciale annoncée, 2025 s’annonce volatile

Analyses de marchés
perspectives marchés 2025

Avec Alexandre Hezez, stratégiste chez Richelieu Gestion, Stéphane Vonthron, Directeur Distribution France chez Natixis IM, Gustavo Horenstein, Gérant chez Dorval AM, Frédéric Leroux, Responsable de l'équipe Cross Asset chez Carmignac et Nicolas Goetzmann, Responsable de la recherche et de la stratégie macroéconomique chez Financière de la Cité.

Croissance américaine : un potentiel de résilience au-delà des attentes

Alexandre Hezez : Aux États-Unis, nous anticipons une croissance plus élevée que les autres économies développées et largement au-dessus de son potentiel de croissance, malgré un environnement monétaire encore restrictif compensé par la résilience du marché du travail, les bilans solides des ménages et des entreprises, et bien évidemment, Donald Trump.

Inflation et programme Trump : quelles conséquences pour l’économie américaine ?

Frédéric Leroux : La désinflation est là depuis un peu plus de 2 ans, et pourtant sur cette période, les taux obligataires, notamment aux États-Unis, ont monté. Ça crée des problèmes de valorisation. La deuxième grande incertitude, c'est l'élection de Trump. Est-ce qu'il va mettre en œuvre son programme inflationniste pour lequel il a pourtant été élu, je baisse les impôts, j'augmente les barrières douanières et je réduis l'immigration en créant de l'inflation salariale ? Ou est-ce qu'il va plutôt mettre en œuvre le programme qu'il a en tête avec Musk, à savoir réduire les dépenses de l'État, le rendre plus efficace et donc rendre l'économie américaine encore plus efficace ?

Lire aussi : Trump 2.0, quels impacts pour les marchés ?

Europe : économie et espoir d’une relance monétaire

Gustavo Horenstein : Depuis l'élection de Donald Trump début novembre, il y a un mélange d'excitation et d'inquiétude chez les investisseurs. Le triomphe de l'Amérique d'un point de vue économique et surtout boursier semble total. La victoire du mouvement MAGA de Donald Trump avec son cortège de droits de douane renforce cette impression. Il faudra cependant attendre de voir la nouvelle administration à l'œuvre pour faire des prévisions raisonnables. C'est ce que fait d'ailleurs la Réserve Fédérale qui pourrait suivre une longue période de pause afin d'en savoir plus sur la politique économique.

Actions américaines : des opportunités dans un contexte de surperformance

Stéphane Vonthron : Chez Natixis IM, on aborde l'année 2025 sous plusieurs angles. D'abord, la question de la performance des actions américaines. C'est vrai qu'on a toujours le débat sur la valorisation entre les marchés développés européens et américains. Est-ce qu'on a une poursuite de la surperformance des actifs américains ? On aura plutôt tendance à penser oui et notamment via l'élection de Donald Trump qui justement va continuer à suralimenter cette croissance. Alors on peut se poser la question de la pertinence de le faire à ce moment du cycle mais néanmoins c'est ce qui va se produire et donc justement de continuer à capitaliser sur ces thèmes. Et pour autant, on pense qu'il y a encore de la valeur à aller chercher sur ces thèmes, malgré de très bonnes performances. Attention à ne pas confondre prix et valorisation, ne pas confondre performances passées et perspectives de croissance.

Lire aussi : Les marchés américains auront dominé l’année 2024

Zone euro : une reprise conditionnée par des mesures budgétaires et monétaires

Gustavo Horenstein : Du côté de l'Europe, la déprime s'installe avec une croissance atone que seule la banque centrale européenne est susceptible de stabiliser. Nous n'attendons pas de miracle de l'activité en Europe, mais nous pensons que le pessimisme est excessif pour 2025 et c'est pourquoi le thème des bancaires garde sa pertinence selon nous.

Alexandre Hezez : La zone euro reste entre le marteau et l'enclume, entre le risque d'une guerre commerciale, des enjeux géopolitiques et politiques. Seule une baisse des taux massifs peut permettre à la zone de reprendre le chemin de la croissance. La visibilité sur les marchés européens reste délicate et nous attendons encore un catalyseur. Le décalage entre les politiques monétaires des deux zones pourrait accentuer encore la pression sur l'euro.

Nicolas Goetzmann : Paradoxalement, la zone euro est aujourd'hui dans une situation où, en gros, elle n'a pas connu de croissance depuis environ 5 ans. Pour être plus précis, depuis la première hausse de taux en juillet 2022 de la part de la Banque Centrale Européenne, on a à peu près zéro croissance dans les deux grands pays, c'est-à-dire en France, on est vraiment à zéro. En Allemagne, on est un petit peu en négatif. Et donc à partir de là, on peut peut-être entrevoir 2025 comme potentiellement une année de reprise, notamment parce que la Banque Centrale Européenne semble prendre acte du caractère récessif de sa politique actuelle et pourrait baisser ses taux de façon assez importante au cours de l'année 2025, ce qui permettra de baisser largement la pression sur la zone euro. Le deuxième point, c'est qu'on a un gouvernement allemand qui devrait être élu en février, avec sans doute une prise de pouvoir à partir du mois d'avril, avec la possibilité de voir une relance budgétaire, notamment en termes d'investissement en Allemagne. Et on a également la possibilité de voir des prix de l'énergie qui arriveraient dans une tendance baissière, ce qui nous fait une configuration où, même si la zone euro est vraiment dans une situation d'une fragilité extrême, plusieurs points qui permettent d'entrevoir éventuellement une fin de crise et au moins le début d'une reprise. Mais tout cela est évidemment conditionné à, principalement, une Banque Centrale Européenne qui, enfin, prend en compte la question de la croissance.

Stéphane Vonthron : Eh bien, on a proposé largement des taux courts sur le marché européen. Ça a été une bonne solution d'allocation. Avec la baisse des taux entamée sur les marchés européens, c'est vrai que se pose la question de diversifier, de prolonger. Avec nos amis d'Ostrum, on propose d'aller un tout petit peu plus loin sur la courbe, de dégrader légèrement la note moyenne et donc d'intervenir sur du crossover, du BBB, le bas de l'investment grade, du BB, le haut du high yield pour aller chercher ce petit supplément d'âme en termes de rendement mais tout en conservant une forme de lisibilité suffisante dans un contexte de ralentissement économique global.

Chine : stimulation de la consommation et enjeux commerciaux

Alexandre Hezez : La Chine de son côté n'a plus le choix. Elle doit vigoureusement stimuler la consommation et accroître la demande intérieure dans toutes les directions. Nous pensons que ce sera le cas en 2025.

Gustavo Horenstein : En Asie, la politique économique chinoise vise à la stabilisation de la croissance, en attendant les premiers coups de canon de la nouvelle guerre commerciale avec les États-Unis.

Frédéric Leroux : Et la troisième grosse incertitude, c'est est-ce qu'au mois de mars, on aura effectivement de la part de M. Xi des décisions très fortes en Chine en faveur du consommateur ? Là aussi, si c'était le cas, on aurait un facteur inflationniste marqué. Dans le temps qu'on n'a pas un début de réponse à ces questions, le programme de Trump, ce que va faire ou pas faire la Chine, c'est très, très difficile pour nous de mettre en œuvre tout de suite une politique d'investissement pour l'ensemble de l'année. Donc, on fait un barbell, on conserve nos belles valeurs de croissance, et notamment la technologie, et on ajoute à ça, graduellement, des expositions à des géographies plus cycliques, plus favorables à l'inflation.

Prudence et stratégie diversifiée pour 2025

Alexandre Hezez : Nos perspectives restent modérément optimistes en termes macroéconomiques et financiers, mais la volatilité va s'accroître en 2025, liée principalement à la rhétorique de Donald Trump avec le risque d'une surenchère dans la guerre commerciale, et surtout aux craintes d'un retour de l'inflation tout au long de l'année. Une autre vague inflationniste serait très difficile à endiguer, à l'image des années 70, et serait très dommageable pour les marchés.

Gustavo Horenstein : En conformité avec ce narratif, l'écart de valorisation entre les États-Unis et le reste du monde est un record historique, et l'Amérique qui prend tout interroge sur sa durabilité. L'histoire longue et ce que nous savons du fonctionnement des marchés financiers nous indique qu'il faut toujours privilégier la diversification internationale avec un équilibre entre les grandes zones géographiques.

Lire aussi : Bourse américaine, une 3ᵉ année performante pour 2025 ?

À découvrir
Graph du jour

Chaque jour, nous sélectionnons pour vous, professionnels de la gestion d'actifs, une actualité chiffrée précieuse à vos analyses de marchés. Statistiques, études, infographies dans divers domaines : épargne, immobilier, économie, finances, etc. Ne manquez pas l'info visuelle quotidienne !

Voir tous nos graphs
Agenda

Ne loupez aucun événement de nos partenaires : webinars, roadshow, formations, etc. en vous inscrivant en ligne.

Voir notre agenda
Les fonds de nos partenaires