Les garanties de bonne fin fiscale en Girardin industriel : analyse critique


Contexte et fonctionnement du dispositif fiscal Girardin
Depuis 2003, le dispositif fiscal Girardin permet aux contribuables français d’obtenir une réduction d’impôt supérieure à leur mise initiale en participant au financement d’investissements productifs dans les DOM-COM. En contrepartie, l’investissement doit respecter de strictes conditions d’éligibilité et d’exploitation sur cinq ans, sous peine de remise en cause de l’avantage fiscal par l’administration.
Pour sécuriser les contribuables face à ce risque, l’article 242 septies du Code Général des Impôts (CGI) encadre l’activité de monteurs avec un certain nombre d’obligations à respecter dont la souscription à une assurance contre les conséquences pécuniaires de leur responsabilité civile professionnelle pour la prise en charge des conséquences financières d’un éventuel redressement fiscal lié à une erreur de montage ou à un défaut d’exploitation conforme.
Le montant de cette garantie appelée par certains monteurs « garantie de bonne fin fiscale » est donc systématiquement constitué par cette assurance responsabilité civile professionnelle obligatoire, complétée par les fonds propres du monteur et, le cas échéant, d’un fonds de garantie dédié optionnel.
Points forts pour les investisseurs fiscaux
Dans le respect de la charte de déontologie que les monteurs se sont obligatoirement engagés à respecter pour l’exercice de leur activité, les contribuables bénéficient donc :
- D’une sécurisation de leur avantage fiscal : Le contribuable est obligatoirement protégé par le monteur contre la perte de l’avantage fiscal en cas de requalification par l’administration, ce qui est sécurisant notamment si le cadre juridique de souscription engage sa responsabilité solidaire et/ou l’investissement comporte des risques d’exploitation par nature ;
- D’un accompagnement juridique : Tous les monteurs ont l’obligation réglementaire de proposer une assistance juridique en cas de contrôle ou de contentieux fiscal, renforçant la sécurité pour le contribuable.
Limites et faiblesses
Comme l’a rappelé l’Inspection Générale des Finances (IGF) dans son rapport de juillet 2023 * :
- Engagement contractuel, non légal : La garantie de bonne fin fiscale est purement contractuelle. Elle ne bénéficie d’aucune reconnaissance légale ou réglementaire spécifique, ce qui expose l’investisseur à un risque de défaillance du monteur ou de l’assureur en cas de sinistre massif ;
- Exclusions et plafonds : Les contrats de garantie prévoient fréquemment des exclusions (fraude, fausse déclaration, non-respect volontaire des règles) et des plafonds d’indemnisation. En cas de sinistre d’ampleur (ex : défaut systémique), la couverture pourrait être insuffisante ;
- Dépendance à la solidité du monteur : La solvabilité et la réputation du monteur sont déterminantes. Un opérateur défaillant ou mal assuré ne pourra pas honorer ses engagements, laissant le contribuable sans recours effectif ;
- Effet sur la rentabilité : Le coût de la garantie pèse sur la rentabilité globale de l’opération, réduisant l’avantage fiscal net. Certains acteurs estiment néanmoins que cette sécurité justifie une rentabilité moindre notamment dans le secteur industriel, dont les risques d’exploitation sont plus risqués par nature ;
- Absence de contrôle externe : Il n’existe pas d’organe indépendant chargé de vérifier l’effectivité des garanties ni la bonne gestion des fonds de couverture. Le contribuable doit donc s’en remettre à la transparence du monteur et à la solidité de ses partenaires assureurs.
*« les garanties des monteurs fiscaux couvrant« l'ensemble des risques financiers et fiscaux relatifs à la défiscalisation Girardin afin que l'investisseur bénéficie de son avantage fiscal quoiqu'il arrive » apparaissent contestables juridiquement, notamment lorsqu’elles couvrent des redressements fiscaux résultant de manœuvres frauduleuses » -Rapport IGF de Juillet 2023 sur le Régime d’Aide Fiscale à l’Investissement Productif outremer (RAFIP) Annexe III – Page 12-13
Synthèse critique de la garantie de bonne fin fiscale
La garantie de bonne fin fiscale est devenue un argument commercial incontournable pour certains monteurs pour rassurer les contribuables face notamment aux risques du Girardin industriel, risque de redressement pourtant extrêmement faible et qui représente à peine 0,1% du volume des réductions d’impôt mises en place depuis 2003. Les monteurs proposant d’autres types de Girardin, logement social et agricole, qui ont obligatoirement souscrit les mêmes garanties que les monteurs en Girardin industriel, n’utilisent pourtant pas cet argument du fait des investissements aidés, moins risqués par nature et dont la structuration en SAS limite le risque financier des investisseurs à leur apport.
Cette garantie que les monteurs doivent obligatoirement souscrire pour exercer leur activité est positive en matière de sécurisation, mais ne saurait être considérée comme une protection absolue. Sa valeur dépend essentiellement de la solidité financière, de la rigueur opérationnelle et de la transparence du monteur, ainsi que de la qualité des contrats d’assurance sous-jacents.
En pratique, il appartient à chaque contribuable et à leur conseil habituel de procéder à une analyse approfondie des garanties proposées, de vérifier l’expertise et la capacité financière du monteur, et de s’assurer que la garantie couvre effectivement les risques identifiés, sans exclusions majeures ni plafonds trop restrictifs. Ainsi, pour le Girardin industriel, un cumul des garanties permettant un ratio de couverture de minimum 10% du total des réductions d’impôts mises en place dans l’année par le monteur semble largement suffisant. Pour le Girardin logement social ou agricole, le ratio de couverture peut être moins élevé.
Conclusion
Si la garantie de bonne fin fiscale imposée par le législateur aux monteurs pour l’exercice de leur activité réduit significativement le risque pour l’investisseur, elle ne le supprime pas totalement. Elle doit être considérée comme une sécurité utile mais non suffisante, et ne dispense pas d’une vigilance accrue dans le choix du monteur, du cadre juridico-financier à privilégier et de la nature des projets à aider au mieux des intérêts des investisseurs fiscaux.
Par Franck Ladrière
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