Revenir à l’esprit du Girardin : comprendre avant de recommander

Fiscalité
Franck Ladrière
Comprendre Fiscalité Girardin

Quand la défiscalisation devient un produit financier comme un autre, elle perd son âme. Le Girardin n’a pas été créé pour enrichir des monteurs, mais pour développer les territoires ultramarins. Encore faut-il que les conseillers en patrimoine en aient bien conscience avant de le recommander.

Le rappel nécessaire : quand la loi fixe les limites du jeu

La loi (articles 199 undecies B et C du CGI) impose depuis toujours aux monteurs de programmes de rétrocéder entre 56 % et 70 % de l’avantage fiscal généré aux exploitants ultramarins.

Autrement dit, il ne reste que 30 % à 44 % de cet avantage pour couvrir les frais de structuration et assurer la rentabilité du montage.

Résultat : pour l’investisseur métropolitain, le gain réel proposé n’excède souvent pas 10 à 14 %, au mieux, pour des dispositifs pourtant vendus comme « optimisés » et quand il est supérieur, cela devient suspect, et pourtant…

C’est là le cœur du malentendu : beaucoup continuent à raisonner en rendement financier alors que le Girardin, dans son esprit d’origine (1986), est un outil d’aide au développement productif ultramarin, pas une « niche » à performance.

Une demande qui explose… mais un gisement d’opérations qui s’épuise

En 2025, la demande des contribuables pour des solutions de réduction d’impôt n’a jamais été aussi forte.

Mais dans le même temps, le volume de projets Girardin réellement disponibles et conformes se réduit année après année, sous l’effet combiné :

  • des restrictions législatives successives ;
  • des contrôles renforcés de l’administration ;
  • et d’une concurrence accrue entre monteurs qui tend à pousser certains acteurs à rogner sur la qualité des opérations proposées.

Les CGP doivent rester particulièrement vigilants : un dispositif rare et encadré attire inévitablement son lot d’offres « borderline » ou de présentations incomplètes, où la réalité économique du projet ultramarin passe au second plan derrière la promesse fiscale.

Recommander sans discernement, c’est exposer ses clients et sa propre responsabilité à des risques juridiques et fiscaux désormais très concrets.

Plus que jamais, il faut privilégier les opérateurs historiquement établis, juridiquement sécurisés et capables de prouver la traçabilité et la réelle utilité productive des investissements proposés.

Pour les conseillers en patrimoine : comprendre avant de recommander

La responsabilité des conseillers est aujourd’hui immense. Ils ne peuvent plus se contenter de comparer des taux de rendement ou des promesses fiscales : ils doivent comprendre les écarts fondamentaux entre les variantes du Girardin, leurs objectifs réels et leurs conséquences concrètes sur le terrain.

Avant de recommander, il faut s’interroger lucidement sur

  • Ce que finance réellement chaque dispositif ;
  • Si l’investissement est utile à l’entreprise bénéficiaire ou s’il ne fait que nourrir un schéma financier sans substance ;
  • À qui profite effectivement l’opération ;
  • Et surtout, quelle trace durable elle laisse sur le territoire aidé.

Quand la dérive financière détruit le sens du dispositif

Les récents scandales ont achevé de ternir l’image de la défiscalisation outre-mer :

Dans le logement, l’affaire CAPIOM, encore à un stade préliminaire, a illustré les dérives et les conséquences potentiellement désastreuses d’une défiscalisation industrialisée au détriment de la rigueur juridique et de la solidité économique des projets ;

Dans le secteur industriel, le rapport de l’Inspection générale des finances publié en juillet 2023 a mis en lumière des montages impliquant des chauffe-eaux solaires importés de Chine ou de Grèce, dont l’éligibilité au dispositif était déjà très contestable. Ces dérives ont conduit le législateur à supprimer purement et simplement cette catégorie d’investissements dans la loi de finances pour 2024.

Lire aussi : Les garanties de bonne fin fiscale en Girardin industriel

Ces dérives ont un point commun : une approche purement financière, déconnectée de la réalité productive des territoires. Un rappel essentiel, à l’heure où trop d’offres séduisantes sur le papier s’éloignent de la vocation première du dispositif : soutenir l’économie réelle ultramarine.

Girardin Agricole : l’autre voie

Face à ces excès, le Girardin Agricole a tracé depuis 2011 une voie radicalement différente, centrée sur l’utilité, la traçabilité et la durabilité.

C’est aujourd’hui un modèle d’économie solidaire et maîtrisée, qui prouve qu’il est encore possible de réconcilier la fiscalité avec l’utilité réelle et de redonner à la défiscalisation sa vocation première : servir le développement productif.

En 2026, il fêtera 15 années de déploiement au service de la filière agricole guyanaise, avec un bilan unique dans l’histoire du dispositif :

  • Un cadre juridique robuste, exclusivement en SAS, adossé à des aménagements fonciers temporaires (pistes agricoles, canaux de drainage) ;
  • Une répartition équilibrée et transparente de l’avantage fiscal, conforme à la loi et respectueuse des intérêts des contribuables et utile aux agriculteurs bénéficiaires ;
  • Une sécurité juridique totale, confirmée par Bercy et jamais remise en cause en 15 ans.

Mais surtout, une philosophie radicalement différente :

L’investissement n’est pas une fin en soi, c’est un moyen d’accompagner la professionnalisation des exploitants et de structurer durablement la filière.

Lire aussi : Girardin Agricole, un engagement cityen pour soutenir l'agriculture guyanaise

Une méthodologie disruptive au service du développement local

Le Girardin Agricole s’est construit sur une méthodologie opposée aux logiques de produits financiers :

  • Suivi annuel sur site des exploitations aidées ;
  • Collecte de données économiques pour mesurer l’efficacité réelle des investissements ;
  • Formation et accompagnement des agriculteurs dans la gestion de leurs infrastructures ;
  • Contrôle pédagogique et traçabilité complète des fonds et des travaux réalisés.

C’est cette discipline méthodologique et ce souci de démontrer l’utilité concrète des programmes qui en font aujourd’hui le modèle le plus éthique et le plus pérenne de la défiscalisation ultramarine.

Lire aussi : Du Girardin industriel au Girardin agricole

Conclusion : redonner du sens à la défiscalisation

La défiscalisation n’a d’avenir que si elle retrouve son sens premier : celui d’un outil au service de la production, pas de la spéculation.

Le Girardin Agricole en a fait la preuve : 15 ans de résultats, plus de 1200 projets aidés avec succès, des exploitants mieux structurés, une filière renforcée.

Il reste beaucoup à faire, mais la voie est tracée, celle de l’efficacité productive et de la transparence.

Par Franck Ladrière, FL Audit & Expertise

Lire aussi : Quand défiscaliser, c’est aider : le pari gagnant du Girardin agricole

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