Succession : familles recomposées, conjoint survivant et nouvelles règles

La succession dans les familles recomposées : un équilibre complexe
La question successorale dans les familles recomposées demeure une source fréquente de contentieux. Lorsque coexistent un conjoint survivant, des enfants communs et des enfants issus d’une précédente union, la répartition de l’héritage doit respecter à la fois les droits légaux, les libéralités consenties et la réserve héréditaire.
Un arrêt de la Cour de cassation du 17 janvier 2024 (pourvoi n° 21-20.520) illustre cette problématique. Dans cette affaire, le défunt avait légué à son épouse la pleine propriété de ses liquidités et valeurs ainsi que l’usufruit de tous ses biens meubles et immeubles. Son fils né d’un premier mariage estimait que ce partage portait atteinte à sa réserve héréditaire et a assigné le notaire en responsabilité.
La Cour d’appel avait rejeté sa demande, admettant le cumul entre droits légaux et legs. Mais la Cour de cassation a censuré cette décision, rappelant que les libéralités consenties au conjoint survivant doivent s’imputer sur ses droits légaux et ne peuvent pas s’y ajouter.
Les textes applicables au conjoint survivant
Deux articles du Code civil structurent le régime actuel :
- Article 757 A : lorsque le défunt laisse des enfants qui ne sont pas issus des deux époux, le conjoint survivant recueille un quart de la succession en pleine propriété.
- Article 758-6 : les libéralités reçues du défunt par le conjoint s’imputent sur ses droits successoraux légaux. Le conjoint peut réclamer un complément si les libéralités sont inférieures à ses droits, mais sans jamais dépasser la quotité disponible spéciale prévue par l’article 1094-1.
Ce mécanisme signifie que le conjoint survivant ne peut pas cumuler ses droits légaux avec les avantages reçus par testament. Les legs viennent en déduction de ses droits successoraux.
La jurisprudence confirmée en 2025
La règle d’imputation a été réaffirmée par un nouvel arrêt du 5 mars 2025 (Cass. 1re civ., n° 23-11.430). La Cour a précisé qu’en présence d’un enfant issu d’une précédente union, le conjoint survivant ne peut pas opter pour l’usufruit légal : il ne dispose que du quart en pleine propriété. Cette décision conforte l’articulation entre protection du conjoint et respect de la réserve des enfants non communs.
Les nouveautés fiscales et patrimoniales introduites en 2025
Les abattements et la périodicité des donations
La loi de finances pour 2025 n’a pas modifié les abattements successoraux. En revanche, elle a introduit des changements concernant les donations :
- L’abattement entre parents et enfants est relevé à 130 000 € (contre 100 000 € auparavant).
- L’abattement entre grands-parents et petits-enfants est fixé à 50 000 €.
- L’abattement entre époux et partenaires pacsés est porté à 100 000 €.
- Le délai de renouvellement est ramené à 10 ans, au lieu de 15 précédemment.
Ces ajustements facilitent la transmission anticipée de patrimoine par voie de donation.
Le droit du conjoint survivant renforcé
Les dispositions introduites en 2025 prévoient une meilleure sécurisation du conjoint survivant :
- confirmation de son droit d’usage du logement principal,
- clarification de ses droits selon la composition de la famille, notamment en présence ou non d’enfants communs.
Le nouveau statut du beau-parent
Une réforme de 2025 a introduit un statut juridique du beau-parent. Ce dispositif encadre davantage la place du beau-parent dans la succession et permet de faciliter la transmission vers les beaux-enfants. Jusqu’alors, ces derniers n’avaient aucun droit successoral direct. Cette mesure vise à adapter le droit aux réalités des familles recomposées.
Les successions internationales
Les transmissions de biens situés à l’étranger font désormais l’objet d’un crédit d’impôt anti-double imposition. La réforme de 2025 a également renforcé la coordination entre États européens pour une meilleure reconnaissance des décisions successorales.
Conséquences pratiques pour les familles recomposées
La combinaison des textes du Code civil, de la jurisprudence récente et des nouveautés législatives met en évidence plusieurs points clés :
- Les libéralités au conjoint survivant ne se cumulent pas avec ses droits légaux mais s’imputent sur ceux-ci.
- En présence d’enfants non communs, le conjoint survivant n’a droit qu’à un quart en pleine propriété.
- Les abattements de donation sont relevés et peuvent être utilisés plus fréquemment, tous les 10 ans.
- Le statut du beau-parent ouvre une nouvelle voie de transmission encadrée juridiquement.
- Les successions internationales bénéficient d’un mécanisme fiscal limitant les doubles impositions.
Conclusion
En 2025, le droit des successions évolue à la fois par la jurisprudence et par le législateur. Les familles recomposées, particulièrement concernées par la répartition entre conjoint et enfants de différentes unions, disposent désormais d’un cadre plus précis. Les notaires et praticiens du droit doivent intégrer ces nouveautés pour sécuriser les partages et limiter les sources de contentieux.
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Sources : Cour de Cassation, Service Public
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