L’inflation US renforce les prévisions de baisse des taux (Edmond de Rothschild AM)
Contexte global et anticipations de la Fed
- Les taux d’emprunt d’Etat aux Etats-Unis ont fortement baissé, actant d’une évolution des anticipations de baisses des taux de la Fed. Deux baisses sont désormais attendues pour 2024.
- En amont de l’ouverture de la saison de publications des résultats et après une forte performance des actifs risqués, nous restons investis avec un positionnement proche de la neutralité.
- Nous conservons notre vue positive sur la duration, le ralentissement de l’inflation et de la croissance économique aux Etats-Unis justifiant le mouvement actuel sur les taux.
L'incertitude politique en France suite aux élections législatives
Les résultats des élections en France ont surpris la plupart des investisseurs, aucun des trois blocs n’arrivant à avoir une majorité. La probabilité de formation d’un gouvernement de coalition ou technocratique augmente, mais il sera difficile à mettre en place et à conserver sur la durée. En attendant, le gouvernement actuel reste en place pour gérer les affaires courantes.
Audition de Jérôme Powell et données d'inflation aux États-Unis
En début de semaine, M. Powell a été auditionné au Sénat et à la Chambre des représentants. Il est resté prudent, reconnaissant que les données d’inflation sont sur un chemin plus favorable, tout en soulignant qu’il faudra du temps pour atteindre la cible des 2%. Il a aussi rappelé la dualité du mandat de la Fed entre inflation et emploi, alors que le taux de chômage remonte depuis plusieurs mois. Il n’a ainsi pas donné d’indication sur le calendrier des prochaines baisses des taux, rappelant qu’il fallait d’autres confirmations de la trajectoire baissière de l’inflation pour pouvoir intervenir. Ainsi, la publication du chiffre d’inflation du mois de juin inférieure aux attentes, a été considérée comme le signal favorable permettant à la Fed de baisser les taux au mois de septembre. En effet, l’inflation totale sur un an est sortie à +3%, contre +3,1% attendu et +3,3% en mai et l’inflation sous-jacente +3,3% (+3,4% attendu et en mai). Le détail et les chiffres mensuels évoluent aussi dans le bon sens. Le prix des biens est encore en contraction sur un mois, ainsi que le CPI « Supercore » (2ème mois consécutif) qui avait tiré l’inflation à la hausse au cours du premier trimestre 2024. De plus, la composante immobilière montre aussi une inflexion à la baisse pour la première fois depuis février.
Impact de l'inflation sur les taux et rotation sectorielle aux États-Unis
En réaction à ce chiffre, les taux d’emprunt d’Etat ont fortement baissé, actant d’une évolution sur les anticipations de baisses des taux de la Fed. Deux baisses sont désormais attendues pour 2024. Sur les actions, une forte rotation de style et sectorielle s’est mise en place aux Etats-Unis. Les méga-capitalisations ont largement sous-performé les petites et moyennes capitalisations et les secteurs liés aux taux (utilities, telecoms, santé) ont profité des taux plus bas.
Intervention de la BoJ pour soutenir le yen
Dans le même temps, la banque centrale du Japon (BoJ) est intervenue sur les marchés des changes pour soutenir sa devise. Son intervention, couplée à la faiblesse du dollar à la suite des chiffres d’inflation, a fait bondir le yen de plus de 2% contre le dollar.
Stratégie d'investissement : positionnement neutre et vue positive sur la duration
En amont de l’ouverture de la saison de publications des résultats et après une forte performance des actifs risqués, nous restons investis avec un positionnement proche de la neutralité. Nous conservons aussi notre vue positive sur la duration, le ralentissement de l’inflation et de la croissance économique aux Etats-Unis justifiant le mouvement actuel sur les taux.
Actions européennes : performance positive des marchés européens malgré l'incertitude politique
Les marchés européens affichent une performance positive cette semaine. En attendant le début de la saison de publication du deuxième trimestre (T2), on remarque un léger regain de l’appétit pour le risque en faveur des marchés actions. L’indice de volatilité de la zone euro, le VIX, demeure à des niveaux historiquement bas, légèrement au-dessus de 13. La détente sur les taux, liée à la diminution du risque politique en Europe, est l'un des principaux moteurs. Toutefois, rappelons que bien qu'il ait diminué, le spread entre le 10 ans français et allemand reste aux alentours de 65pb, soit toujours environ +15pb de plus par rapport à la période avant la dissolution de l’assemblée nationale. Preuve que, dans l’attente de la formation d’un nouveau gouvernement, le risque persiste. Plusieurs agences de notation ont d’ailleurs alerté sur une potentielle dégradation de la notation française selon la trajectoire budgétaire suivie. En outre, les chiffres d'inflation aux États-Unis, bien en deçà des attentes, ont également contribué à cette détente. Toujours sous pression, le CAC40 sous-performe ses homologues européens mais parvient à légèrement progresser.
Surperformance des secteurs exposés aux taux et sous-performance de l'énergie
On observe une surperformance des secteurs les plus exposés aux taux. En tête de liste figurent l’immobilier, les biens de consommation de base et les télécommunications. En bas de peloton, on retrouve le secteur de l’énergie, impacté par les pressions baissières sur le prix du Brent et la révision à la baisse des objectifs de BP, qui alerte sur la faiblesse des marges de raffinage. Le secteur de la technologie est également affecté, notamment par la contre-performance de Dassault Systèmes. L’éditeur de logiciels français a publié un avertissement sur ses résultats du fait de données préliminaires décevantes concernant le chiffre d’affaires du T2. Les résultats préliminaires estiment le chiffres d’affaires au deuxième trimestre à 1 495 millions d’euros, contre une guidance à 1 525 millions d’euros. Cette situation pousse le management à ajuster sa guidance de chiffres d’affaires en 2024, anticipant désormais une croissance entre +6 et +8 % à taux de change constant, contre +8 à +10 % précédemment. En cause, le report de certains contrats importants dans un contexte géopolitique tendu et un environnement de marché incertain. Le reste du secteur des logiciels a subi une correction en raison des craintes de contagion d’une demande atone.
Actualité des entreprises : Veolia et Verallia
Veolia a annoncé vendredi avoir conclu un accord avec les autorités marocaines de la concurrence pour la cession de Lydec. La finalisation de l’opération devrait avoir lieu d’ici fin 2024. La filiale réalise un chiffre d’affaires d’environ 700 millions d’euros et assure la gestion de la distribution d’eau potable, d’électricité, d’assainissement et d’éclairage public pour la ville de Casablanca et sa région. Le management indique que cette cession n’aura pas d’impact sur les objectifs financiers 2024. À ne pas confondre avec Verallia qui, dans l’industrie, se voit contraint de réviser à la baisse son objectif de résultat opérationnel en raison d’une reprise de l’activité « plus lente qu’anticipé ». L’entreprise pâtit des difficultés du secteur des bières et spiritueux, ce qui fait plonger son cours en bourse.
Actions américaines, vue d'ensemble du marché
Les marchés américains clôturent en demi-teinte. D’un côté, les chiffres encourageants de l’inflation continuent de pointer vers une baisse des taux de la Réserve Fédérale, ce qui a favorisé le segment des small caps. De l’autre, les grandes valeurs technologiques qui ont affiché de très bonnes performances depuis le début de l’année, se sont repliées. Dans ce contexte, la saison des résultats va débuter avec les annonces du secteur bancaire, notamment celles de JP Morgan, Wells Fargo, et Citigroup.
Performance exceptionnelle du Russell 2000
La journée de jeudi a été mémorable car malgré une baisse de près de 1 % du S&P 500, soit son premier jour de baisse depuis le 28 juin, près de 400 de ses actions ont enregistré une hausse.
Depuis 1979, une seule autre séance boursière a vu l'indice Russell 2000 gagner plus de 3 % alors que le S&P 500 était en baisse le même jour, en octobre 2008. Le Russell 2000, composé des petites entreprises, a battu le Nasdaq 100 de 5,8 points de pourcentage, soit sa meilleure performance depuis novembre 2020.
Les « Magnificent 7 » ont enregistré leur plus forte baisse depuis 2022, effaçant les 600 milliards de dollars de capitalisation boursière. À l'inverse, le secteur immobilier, qui était jusqu'alors le moins performant en 2024, a connu sa meilleure journée de l'année. Après un tel mouvement de rotation, une question se pose : sommes-nous à un tournant sur les marchés ?
Mouvements notables des actions individuelles
Le fabricant de voitures électriques Tesla a perdu plus de 8% sur la séance du jeudi après avoir annoncé l’intention de repousser son évènements robotaxi d’août à octobre afin de donner plus de temps aux équipes du projet. La chaîne de fast-food mexicaine Chipotle perd plus de 6% sur la semaine après une forte hausse de +28% depuis le début de l’année. En effet les investisseurs réagissent à la nouvelle selon laquelle Jack Hartung, CFO de longue date, démissionnera de ses fonctions d’ici 2025. Depuis qu’il a rejoint le groupe en 2002, il a aidé l’entreprise à gérer la cession de McDonald, a fait face au scandale sanitaire de 2015 et a participé à l’ascension de l’entreprise au rang de plus grande chaine de fast-casual aux USA en termes de ventes. Dans la tech, Google a déclaré qu’il n’était plus intéressé par le rachat de Hubspot, entraînant une chute de 12% du titre suite à l’annonce. Par ailleurs, la compagnie aérienne Delta Air Lines, qui a publié des prévisions de bénéfices en baisse pour le troisième trimestre, a vu son action perdre 4,9% lors de la séance de jeudi.
Introduction en Bourse du Pershing Square
En ce qui concerne les introductions en bourse, le fonds Pershing Square de Bill Ackman cherche à lever jusqu’à 25 milliards de dollars, cela en ferait le plus grand fonds fermé jamais coté aux États-Unis. L’introduction en bourse sera cotée à 50$ par action à la bourse de New York et fera plus que doubler la taille des actifs gérés par Ackman.
Marchés émergents, performance globale
L’indice MSCI EM a gagné 1,94% en dollars cette semaine (à la clôture des marchés jeudi). Tous les principaux indices des marchés émergents ont clotûré la semaine en hausse pour la deuxième fois consécutive. Les marchés les plus performants ont été le Mexique et Taïwan, respectivement en hausse de 6,28% et 5,16%. Le Brésil, la Corée, la Chine et l’Inde se sont également inscrits en hausse, de respectivement 2,88%, 1,17%, 1,16%, et 0,04%.
En Chine, inflation modérée, excédent commercial record et investissements dans l'innovation
En Chine, l’IPC de juin est ressorti à 0,2%, soit un niveau inférieur aux attentes. L’IPP est resté en territoire déflationniste à -0,8% en glissement annuel, en baisse de -1,4% par rapport au mois précédent. En juin, la croissance des exportations a été de 8,6% en glissement annuel contre 8,0% par rapport aux attentes, tandis que la croissance des importations a été de -2,3% contre 2,5% attendus, ce qui a porté l’excédent commercial à un niveau historique. Les exportations de véhicules de tourisme ont augmenté de 28% en glissement annuel. Le Conseil d’État a approuvé un plan visant à soutenir le développement de médicaments innovants. Le MIIT a publié des règles renforçant la réglementation des investissements dans les projets de fabrication de panneaux solaires photovoltaïques. BYD va investir 1 milliard de dollars en Turquie pour mettre en place une usine de véhicules électriques et hybrides rechargeables d’une capacité annuelle de 150 000 unités. Naura a annoncé de très bons résultats pour le deuxième trimestre 2024 et des prévisions de revenu net supérieures aux attentes.
En Corée du Sud, forte croissance des exportations et stabilité du taux de chômage
En Corée, les exportations ont bondi de 33,8% en glissement annuel au cours des 10 premiers jours de juillet. Le taux de chômage pour le mois de juin est resté stable à 2,8%, conformément aux attentes. La BoK a maintenu le taux de base à 3,5%. Le principal syndicat de Samsung Electronics a organisé une grève de trois jours. Le gouvernement a mis en place un nouveau programme de recyclage des batteries afin de rendre les véhicules électriques plus abordables. Hanwha Qcells a posé les premiers jalons d’un projet solaire de 267 MW dans le Colorado.
Taïwan : le boom des exportations et performances record de TSMC
À Taïwan, les exportations ont augmenté en juin de 23,48% en glissement annuel au lieu des 13,4% attendus, atteignant ainsi leur plus haut niveau depuis 28 mois. Apple aurait pour objectif d’expédier 10% d’iPhones en plus en 2024. Intel a dévoilé son nouveau GPU phare 4 nm fabriqué par TSMC. TSMC a brièvement dépassé la barre des 1 000 milliards de dollars de capitalisation boursière cette semaine après avoir enregistré des ventes supérieures aux prévisions en juin en raison d’une demande plus forte que prévu.
Inde : le renforcement des liens diplomatiques et dynamisme des investissements étrangers
En Inde, le Premier ministre Narendra Modi s’est entretenu avec le président Vladimir Poutine lors de sa visite à Moscou afin de renforcer les liens dans les domaines de l’énergie, du commerce et de la défense. Les entrées nettes dans les plans d’actions purs pour le mois de juin se sont élevées à 4,9 milliards de dollars contre 4,2 milliards de dollars en mai. La SEBI envisage de modifier les règles relatives aux produits dérivés pour les particuliers. Le gouvernement de l’Uttar Pradesh a annoncé une baisse de la taxe sur les voitures hybrides. Havells va accroître sa capacité de fabrication de câbles en investissant 3,75 milliards d’INR. Adani Ports va investir 1,2 milliard de dollars dans un nouveau terminal de transbordement. Paytm a obtenu l’autorisation réglementaire d’investir 6 millions de dollars dans sa branche Paytm Payment Services. TCS a annoncé un trimestre supérieur au consensus, avec une reprise des embauches après trois trimestres de recul.
Au Brésil, l’IPCA de juin s’est établi à 4,23%, soit légèrement inférieur aux 4,32% attendus. Les ventes au détail ont augmenté de 8,1% en glissement annuel au mois de mai, un niveau supérieur aux attentes (4,4%). Petrobras a signé un accord-cadre avec Yara Brasil fertilizantes. Les députés ont approuvé le règlement de la réforme fiscale qui prévoit un plafond de TVA à 26,5%.
Au Mexique, l’IPC a crû de 4,98% en glissement annuel en juin, contre une hausse attendue de 4,87%. La croissance des salaires nominaux a été de 9,7% en juin. Les États-Unis ont renforcé les règles commerciales pour les exportations d’acier et d’aluminium en provenance du Mexique et importées de Chine.
Au Chili, Santander Chile a publié des résultats supérieurs aux attentes, grâce à la baisse de ses provisions.
En Argentine, le gouvernement a annoncé l’ouverture de l’espace aérien à la concurrence.
Dettes d'entreprise, crédit
Les données positives de l’inflation américaine – en forte baisse à 3% sur un an glissant et -0,1% sur un mois – ont largement contribué à la baisse des taux sans risque. Le taux à 10 ans américain a ainsi perdu 10 pb suite à cette annonce.
Parallèlement, les incertitudes concernant la formation d’un gouvernement français persistent, bien que la probabilité d’une coalition d’extrême gauche appliquant un programme fiscal dispendieux semble faible. L’écart OAT-Bund est ainsi revenu vers 65pb mais reste 15pb plus large qu’avant les élections. Au cours de la semaine, le taux à 10 ans américain a perdu 10pb atteignant désormais 4,20%, tandis que le taux à 10 ans allemand a perdu 5pb pour s’établir à 2,50% vendredi matin. Les probabilités de baisse des taux de la Fed s’accroissent, avec 2 voire 3 baisses d’ici la fin de l’année au regard du ralentissement économique outre-Atlantique. Dans la zone euro, deux baisses supplémentaires sont encore attendues d’ici la fin de l’année.
Avec l’atténuation du risque politique français, les marchés de crédit ont bien réagi, avec une baisse des primes notamment sur le Crossover, qui a gagné près de 10pb depuis vendredi dernier pour atteindre 286pb. Pendant ce temps, les obligations cash sont restées stables autour de 335pb de primes pour le haut rendement et aux alentours de 106pb pour les signatures de bonnes qualité. Le rendement global reste à 3,75% pour les bonnes notations et à 6,5% pour le haut rendement.
Les émetteurs français ont largement profité de cette accalmie pour placer de nouvelles dettes. Les assureurs ont émis des dettes subordonnées RT1 (Restricted Tier 1), notamment avec La Mondiale qui a placé 500 millions à 6,75% en PNC10 (Perpetual non call 10years), Groupama 600 millions à 6,5% en PNC10, et CNP Assurances 500 millions en T2 à 4,875% remboursable en 10 ans. Il convient également de mentionner l’émission de 650 millions de la banque grecque Piraeus, reclassée cette semaine en catégorie Investment Grade par Moody's, avec une obligation senior 2029 à 4,625%. Dans le segment du High Yield, de nouvelles émissions ont été enregistrées avec Zegona, Rossini, et Logicor, amenant le volume total des nouvelles émissions High Yield à plus de 55 milliards d’euros depuis le début de l’année. Cette nouvelle dynamique souligne ainsi la capacité des émetteurs à se refinancer et à éloigner le spectre du mur de maturité.
Du 05 au 11 juillet, le segment Investment Grade a gagné 0,4% et s’inscrit à +1,34% depuis le début de l’année. A noter cependant que les primes ont joué un véritable effet amortisseur sur la classe Investment Grade au cours de l’année car les taux seuls (indice souverain) en comparaison perdent près de -0,8% YTD. Plus court en sensibilité, le haut rendement ne gagne que +0,24% mais contribue à la performance à hauteur de +3,78% depuis le début de l’année.
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