Les notaires plaident pour une refonte de la SCI

Pierre Papier
refonte SCI

La Société Civile Immobilière (SCI) est l’un des outils les plus utilisés en France pour organiser la gestion et la transmission d’un patrimoine immobilier. Depuis sa modernisation en 1978, elle a séduit des centaines de milliers de familles, grâce à la souplesse de son fonctionnement et à une fiscalité longtemps avantageuse. Mais aujourd’hui, les notaires alertent : dans sa forme actuelle, la SCI comporte des limites qui peuvent se transformer en véritables pièges fiscaux et juridiques. À l’occasion de leur prochain Congrès bisannuel, qui se tiendra du 24 au 26 septembre à Montpellier, ils comptent proposer une réforme de fond pour rendre cet outil plus adapté aux réalités contemporaines.

Une popularité toujours affirmée de la SCI

La SCI connaît un succès qui ne se dément pas. Selon le Baromètre Infogreffe/CNGTC, 75 817 SCI ont été créées en 2024¹. Elle séduit les familles qui souhaitent acquérir un bien immobilier à plusieurs, mutualiser les frais de gestion, mais aussi préparer sa transmission à moindre coût.

Dans les années 1980 et 1990, son attractivité a été renforcée par la fiscalité liée à l’ISF, qui rendait intéressant le recours à ce type de structure pour limiter la taxation du patrimoine immobilier. La SCI s’est ainsi imposée comme un outil de référence du droit patrimonial français.

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Les limites de la SCI dans sa forme actuelle

Si elle reste populaire, la SCI montre aujourd’hui ses faiblesses. Les notaires soulignent qu’elle fige une situation patrimoniale au moment de sa constitution, sans s’adapter aux évolutions ultérieures. Or, la société a profondément changé depuis 40 ans.

  • Allongement de l’espérance de vie : les patrimoines restent figés plus longtemps, ce qui complique la gestion des biens à mesure que les générations se succèdent.
  • Recompositions familiales : divorces, remariages, familles recomposées rendent la répartition des parts sociales et l’exercice du pouvoir dans la société plus complexes.
  • Rigidité juridique : les statuts doivent être modifiés pour chaque évolution (décès, arrivée d’un nouvel associé, changement de stratégie), une opération coûteuse et lourde.
  • Effets fiscaux indésirables : dans certains cas, la SCI génère des « retours de manivelle fiscaux » avec une taxation plus lourde que prévu lors des transmissions.

Les notaires constatent ainsi que l’outil, censé simplifier la gestion et protéger le patrimoine familial, peut au contraire créer des blocages ou des tensions entre associés.

Les notaires plaident pour une réforme de la SCI

Face à ces constats, les notaires comptent formuler des propositions de réforme lors de leur Congrès bisannuel. Leur objectif est clair : corriger les pièges actuels de la SCI et en faire un outil réellement adapté aux familles d’aujourd’hui.

Parmi les pistes évoquées :

  • Assouplir les règles de fonctionnement pour faciliter la circulation du patrimoine.
  • Adapter les statuts-types afin de mieux prendre en compte les recompositions familiales.
  • Prévenir les effets fiscaux indésirables en aménageant certaines dispositions légales.

En agissant sur ces points, la SCI redeviendrait un outil de gestion et de transmission efficace, sans risque de pièges pour les familles.

Une réflexion inscrite dans un contexte plus large de réformes successorales

Les propositions des notaires s’inscrivent dans un climat de réforme patrimoniale plus général. Plusieurs projets législatifs visent déjà à simplifier les successions et les transmissions.

  • Une proposition de loi en cours d’examen cherche à faciliter la sortie de l’indivision successorale, en abaissant les seuils de majorité requis. Ces ajustements pourraient inspirer des évolutions similaires pour les SCI.
  • La loi de finances 2025 introduit de nouvelles dispositions, notamment des allègements ciblés pour les donations liées à la résidence principale ou à la rénovation énergétique. Ces mesures peuvent être articulées avec l’usage d’une SCI pour optimiser la transmission.
  • La fiscalité successorale fait l’objet d’une attention particulière : plusieurs évolutions visent à moderniser l’héritage et alléger la charge pour les familles.

Ce contexte montre que la réflexion autour de la SCI ne se limite pas à un cas isolé mais s’intègre dans un mouvement plus vaste de modernisation du droit patrimonial.

Les atouts de la SCI familiale en matière de succession

Malgré ses limites, la SCI reste un outil puissant lorsqu’il est bien utilisé. Elle présente plusieurs avantages concrets :

  • Transmission facilitée : la transmission de parts sociales est plus simple que celle d’un bien immobilier en direct.
  • Fiscalité avantageuse : il est possible de transmettre progressivement des parts en bénéficiant d’abattements renouvelables tous les 15 ans.
  • Décote sur la valeur : les parts de SCI sont souvent valorisées avec une décote par rapport à la valeur réelle du bien, ce qui réduit les droits de succession.
  • Démembrement des parts : en séparant l’usufruit et la nue-propriété, les parents peuvent garder le contrôle tout en préparant la transmission.

Ces leviers expliquent pourquoi les notaires sont sollicités chaque semaine pour créer de nouvelles SCI. Mais pour que ces atouts se concrétisent, la structure doit être adaptée et anticipée.

Les pièges à éviter

De nombreux praticiens alertent sur les risques d’un usage mal maîtrisé :

  • Un outil figé : sans modification régulière des statuts, la SCI peut devenir inadaptée aux évolutions familiales.
  • Un coût de gestion non négligeable : comptabilité, assemblées générales, formalités administratives impliquent des frais récurrents.
  • Une fausse bonne idée fiscale : dans certaines configurations, la SCI n’apporte pas d’avantage successoral et peut même alourdir la fiscalité.

Des notaires rappellent que plus de 70 % des détenteurs de SCI n’exploitent pas pleinement les stratégies fiscales disponibles, comme l’option pour l’impôt sur les sociétés ou les mécanismes d’apport-cession.

Vers une SCI rénovée et plus souple

La réforme envisagée par les notaires viserait à moderniser la SCI pour l’adapter aux besoins actuels des familles. Cela passerait par :

  • Des règles plus souples pour accompagner les recompositions familiales.
  • Des dispositifs fiscaux clarifiés pour éviter les mauvaises surprises.
  • Une meilleure articulation avec les évolutions législatives sur la succession et la fiscalité.

En parallèle, les bonnes pratiques demeurent indispensables : rédaction soignée des statuts, anticipation des transmissions, et accompagnement par un professionnel du droit.

Sources : Le Figaro, Boursorama

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