Trump Président : Quelles conséquences pour l'économie ?
Suite aux élections américaines, Club Patrimoine vous propose l'analyse de 4 gérants pour faire le point sur les conséquences de ces élections sur les marchés.
Perspectives économiques : optimisme des investisseurs
Eric Lafrenière, gérant chez Sunny Asset Management
Le pire scénario pour le marché a été évité, celui d'une élection indécise avec contestation. Le peuple américain a parlé et décidé d'octroyer un soutien fort au Président Trump et au Parti Républicain. Avec une importante majorité des grands électeurs, le vote populaire et le contrôle du Sénat, même s'il est encore trop tôt pour l'annoncer, sans doute aussi le contrôle de la Chambre des Représentants.
Les marchés ont fortement apprécié la levée de cette incertitude et les actifs à risque ont fortement progressé, propulsant les trois principaux indices à des niveaux records. Le Russel 2000 a affiché une performance de +5,84 % sur la séance. Comme attendu, le dollar a fortement progressé, atteignant sa plus forte hausse depuis mars 2020 selon le Bloomberg Dollar Index. Les taux sont également tendus.
À travers ces mouvements, les investisseurs expriment leur optimisme quant aux perspectives économiques de cette nouvelle administration, s'attendent à des politiques pro-entreprise. Ils espèrent que la réduction de la régulation, des baisses d'impôts et un environnement plus propice aux affaires permettront de stimuler à la fois la croissance des ventes et l'augmentation de la rentabilité des entreprises.
Sans surprise, les financières ont fortement progressé avec les perspectives d'une mise en place de Bâle III qui s'éloigne. Les valeurs plus cycliques et les small caps ont très bien performé, ce qui nous conforte dans notre allocation chez Sunny.
Il faut désormais laisser les choses se poser et voir un peu dans les prochaines semaines comment cette administration va prendre forme.
Quelques points d'attention. Dans les semaines précédant l'élection, nous avions pu constater à travers les indicateurs de confiance des entreprises et des consommateurs une certaine inquiétude relative à l'élection. Maintenant que celle-ci est derrière nous, est-ce que cela se traduira par une réaccélération de l'économie américaine ?
Il faudra également regarder l'impact sur l'inflation et les perspectives d'assouplissement de la politique monétaire aux États-Unis, en particulier en 2025. Je vais conclure en posant une question. Si nous parlons d'un point de vue purement économique et financier, pouvons-nous parler du début d'un nouvel âge dehors des États-Unis ? Le temps nous le dira.
Une accélération du protectionnisme
Julien Quistrebert, gérant chez Tailor AM
Victoire éclatante du Parti Républicain, avec Donald Trump qui devient le nouveau président des États-Unis, marque, je ne dirais pas un tournant, mais une accélération de la politique protectionniste américaine qui se concrétisera à différents niveaux. D'un point de vue économique, nous restons dans la même lignée, America first, nous soutenons les investissements et nous voulons faire des États-Unis le leader économique encore plus fort au niveau mondial, au détriment notamment de la Chine, nous pensons à l'illustration des droits de douane envisagés de près de 60 % qui seront de manière progressive.
D'un point de vue plus intérieur, le gros sujet ce sera certainement la Fed qui va se retrouver dans une position un peu plus délicate avec certainement une remontée de l'inflation, la politique qui va être menée par le nouveau Président et qui devra jongler entre une politique budgétaire très agressive et l'évolution des taux d'intérêt.
L'Europe évidemment, position plus complexe, nous le voyons aujourd'hui, le gouvernement allemand en difficulté, le front de l'Est avec l'Ukraine et puis la guerre commerciale à venir qui va certainement créer des difficultés. Du point de vue de l'investisseur, le sujet est assez simple, focus sur les actions américaines puisque c'est là que la croissance va se faire et nous l'avons vu hier, l'indice qui pourrait monter, c'est le Russel 2000. Donc c'est tout le tissu industriel américain qui sera le premier bénéficiaire.
L'Europe, c'est bien évidemment pour les entreprises qui veulent exporter vers les États-Unis.
L'infation pourrait repartir
Christian Bito, professeur de finance à l'ESSEC
Réveil en "Trumpette" hier, pas de contestation, le VIX était à 22 %, il dégringole à 16 %. Seule ombre au tableau des marchés pour le moment, la hausse des taux américains à 4,45 % sur le 10 ans. Les mesures qui seraient favorables aux actions US pénaliseraient les obligations.
Ainsi, l'inflation pourrait repartir poussée par la hausse des barrières douanières, la limitation de l'immigration, de main-d'œuvre à bas coût et la baisse des impôts envisagée accentuerait le déficit budgétaire, ce qui pèserait sur la dette.
Néanmoins, lors du premier mandat de Donald Trump, même s'il n'avait pas une totale latitude au niveau du Congrès pour une orientation de son action dans ces directions, l'inflation, qui était à 2,1 % fin 2016, terminait à 2,3 %. Et le déficit budgétaire était passé de 3,1% du PIB à 4,5 %.
En sens inverse, plusieurs facteurs limiteraient la poussée des prix.
1. La substitution. Le consommateur américain se porterait sur d'autres produits en cas de hausse de taxes. Dit simplement, si le vin français est trop cher, il boira de la bière.
2. La hausse des taxes douanières pourrait compenser la baisse de l'impôt sur les sociétés.
3. L'administration Trump souhaite diminuer le rôle de l'État fédéral, ce qui diminuerait les dépenses publiques.
4. La réglementation s'assouplirait, permettant aux entreprises d'accroître leur productivité, de compenser ainsi une partie des tensions salariales issues de l'attrition de la main-d'œuvre immigrée.
5. La volonté d'étendre les forages devrait faire baisser les cours du pétrole, composante importante des prix qui s'y répercutent.
Et enfin, 6. La Fed ne devrait pas modifier pour l'instant son orientation vers une politique plus accommodante. Elle est data-dépendante et non politique-dépendante. Le rythme des baisses de taux directeurs sera peut-être modulé. Mais est-ce vraiment une mauvaise nouvelle d'étaler dans le temps ces mesures de soutien, ces bonnes nouvelles à venir ?
La hausse de la Bourse américaine
Léonard Cohen, gérant chez Ginger Asset Management
Tout le monde connaît sa personnalité, son programme est connu. Il va le faire, il va le tenir, mais ce n'est pas une surprise. Et c'est ça qui est surprenant après le résultat, c'est que nous avons eu l'impression que le monde découvrait cette possibilité, que Trump gagne.
Les milieux d'affaires sont avec lui. Ce n'est pas pour rien que la bourse américaine a monté. En fin de compte, du côté américain, aucune surprise. Par contre, je m'étonne que le monde entier, et l'Europe en particulier, soit surpris de cette victoire et se mette à vendre à côté.
Tout est déjà connu. Une grande partie est anticipée dans les valorisations, mais face au choc épidermique de la découverte d'une si belle victoire de Trump, en tout cas dans son résultat, ce n'est pas un jugement, il y a eu des réactions épidermiques.
C'est un peu comme après le Brexit, les marchés ont fait -10 %. Et très vite, beaucoup d'investisseurs se sont mis à racheter des valeurs défensives, parce qu'il fallait de la protection. En fait, petit à petit, nous nous sommes aperçus, une nouvelle fois, que le pire est envisagé au moment de l'événement exogène, et progressivement, nous découvrons que la situation est moins noire qu'anticipée, parce que le pire avait été justement évoqué. Et donc, de voir la situation un peu meilleure qu'attendue permettait au marché de rebondir fortement.
Et à la fin de l'année 2016, c'étaient ceux qui avaient pris le plus de risques qui s'en étaient le mieux sortis dans cette année 2016 qui était si compliquée. C'est un peu mon impression.
Nos balises ne bougent absolument pas. Il n'y a pas de découverte par rapport à l'événement des élections américaines. Au contraire, tout est déjà connu et à chacun de s'adapter dans sa politique. Petit à petit, chacun va se rendre compte que la situation est moins dramatique qu'anticipée. Trump a un programme pro-cyclique d'abord, pro-américain bien sûr, mais beaucoup de choses sont déjà pricées.
C'est pour cela que nous restons optimistes aussi sur les actions européennes pour la suite et pour son futur mandat.
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