Comprendre le hit-ratio : la vraie mesure de performance des gérants d’actifs


Jeu, Set et Match !
Pour une fois, nous allons nous éloigner légèrement de l’actualité financière immédiate. Pas de statistiques macroéconomiques, pas de banques centrales, pas de résultats trimestriels et pas d’IA.
Nous allons parler d’autre chose, ou plutôt, parler des marchés à travers un détour, un angle inattendu, mais extraordinairement éclairant : une statistique sur Roger Federer qui a récemment fasciné des millions de personnes sur les réseaux. Elle est issue d’un discours tenu par Roger Federer lors d'une remise de diplôme à l'Université de Datmouth en juin 2024. Pas nouveau donc, mais il devient viral et reste si actuel...
Taux de réussite de Roger Federer comparé à celui des gérants actions américains

80% / 54%...
Federer a disputé 1 526 matchs en simple, gagné près de 80% d’entre eux, raflé 20 Grands Chelems et 103 titres. Une légende vivante. Mais voici le chiffre qui déroute tout le monde : sur toute sa carrière, Federer n’a gagné que 54% des points qu’il a joués. Oui : le plus élégant joueur de l’histoire a perdu presque un point sur deux. Et pourtant, il a dominé deux décennies de tennis mondial. Quand on lui demande comment c’est possible, il répond simplement : « Le point perdu n’a aucune importance. Le seul point qui compte, c’est le suivant. La perfection est impossible. » Et c’est là que le parallèle avec la gestion d’actifs devient, pour nous, une évidence.
Le « hit-ratio » : une leçon de performance asymétrique
L’intuition spontanée voudrait qu’un champion qui gagne 80% de ses matchs domine aussi la quasi-totalité des points. Ce serait logique. Ce serait rassurant. Mais ce n’est pas ainsi que fonctionne le sport de haut niveau.
De la même manière, l’intuition voudrait qu’un gérant qui surperforme durablement son indice ait 70%, 80% ou 90% de positions gagnantes. Là encore, ce n’est pas ainsi que fonctionne la finance.
Les grandes études académiques convergent :
• Cremers & Petajisto (Yale, 2009) : les gérants qui battent leur indice ont un hit-ratio entre 52% et 55% (par hit-ratio, l’on entend le pourcentage de titre en portefeuille qui surperforme l’indice de référence) ;
• Micheal Mauboussin (Morgan Stanley IM) : la surperformance vient d’un léger avantage statistique, amplifié par la discipline ;
• AQR Capital Management / Buffet’s Alpha : Buffett lui-même a un hit-ratio de 53% à 57% selon les périodes ;
• Hendrik Bessembinder (Arizona State University, 2017) : 4% des actions expliquent 100% de la création de richesse boursière depuis 1926. La performance est une affaire de dispersion, pas de perfection.
Autrement dit, le succès ne dépend pas de gagner la majorité écrasante des décisions, mais de gagner les bonnes, exactement comme Federer qui perd souvent des points, mais gagne quand cela compte.
Les gérants qui surperforment ne sont pas ceux qui ne se trompent jamais
Ce sont ceux qui :
• Coupent rapidement les erreurs ;
• « Laissent courir » les gagnants ;
• Gèrent leurs émotions ;
• Restent cohérents dans leur process lorsque les marchés testent leurs convictions ;
• Et maintiennent une présence disciplinée pour capter les rares tendances explosives qui façonnent la performance long terme.
Roger Federer dit : « Negative energy is wasted energy. Move on. Be relentless. » (L'énergie négative est de l'énergie gaspillée. Allez de l'avant. Soyez implacable). Pour ce grand champion, perdre un point n’a pas d’importance. Perdre son calme, oui.
En investissements, il est infiniment moins grave d’avoir une mauvaise idée que de mal réagir à une mauvaise idée.
Une métaphore essentielle pour l'investisseur moderne
Nous traversons un cycle marqué par :
• Une dispersion extrême des performances ;
• des rotations sectorielles rapides ;
• Des thématiques structurantes comme l’IA ;
• Des corrections ponctuelles mais violentes.
Dans un tel environnement, la tentation est forte de rechercher la perfection, de battre le marché sur chaque point. Mais la réalité, et la science des marchés, nous rappellent qu’il suffit d’un hit-rate légèrement supérieur à 50%, de quelques grandes convictions bien exécutées, et d’une gestion émotionnelle solide.
La différence entre un gérant moyen et un gérant performant n’est pas le taux de réussite : c’est la stabilité mentale entre deux erreurs, et la capacité à rester sur le court prêt à jouer le point suivant.
Conclusion : viser la constance, pas la perfection
Federer a construit une carrière légendaire en gagnant seulement 54% des points, mais 80% des matchs, parce qu’il gagnait les points décisifs.
Les gérants qui battent le marché ne gagnent pas « tout le temps ». Ils gagnent un peu plus souvent que les autres, et surtout mieux que les autres. L’objectif, en investissement comme au tennis, n’est pas d’être parfait. L’objectif est de rester dans le match, point après point, cycle après cycle.
Par Gérald Grant, Fundesys
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