« La solidité de nos SCPI résulte de leur grande diversification » Romain Calbert, ATLAND Voisin, Jérémy Schorr et Vincent Danis

Pierre Papier
Romain Calbert, ATLAND Voisin, Jérémy Schorr et Vincent Danis, club patrimoine

À l'occasion de Patrimonia 2024, Romain Calbert, Directeur des partenariats d'ATLAND Voisin, a répondu aux questions de Vincent Danis, Président de Savinianne, et de Jérémy Schorr, Directeur commercial de Primaliance. Comment Épargne Pierre se porte-t-elle dans un marché des SCPI chahuté ? Quelles catégories et classes d’actifs privilégier ? Comment ATLAND Voisin est-il structuré pour identifier des opportunités avec Épargne Pierre Europe ?Un mot de présentation d'ATLAND Voisin. Que pouvons-nous en retenir ? Quels sont les fondamentaux ?

ATLAND Voisin, un acteur historique de la SCPI

Romain Calbert : Nous sommes un acteur historique de la SCPI. Nous gérons des SCPI depuis 1968 avec 3 véhicules. Immo Placement existe depuis plus de 50 ans. Les CGP nous connaissent pour nos deux autres véhicules, Épargne Pierre, investie 100 % en France, qui a plus de 10 ans. Et Épargne Pierre Europe, lancée fin 2022, 100 % zone euro hors France.

Jérémy Schorr : Aujourd'hui, Épargne Pierre est une des plus grandes SCPI de par sa capitalisation sur le marché. Quel est le secret de votre stabilité dans un marché où les grandes capitalisations ont beaucoup souffert en termes de valorisation ?

RC : Vous faites référence aux baisses de valorisation que nous avons pu connaître sur certaines SCPI de la place, notamment des grosses SCPI historiques. C'est vrai qu'Epargne Pierre répond aux caractéristiques de la grosse SCPI historique, avec quasiment 3 Mds€ en termes de capitalisation. Plusieurs aspects permettent sa résilience. Le premier élément, c'est sa diversification. C'est une SCPI qui a investi historiquement sur du bureau, mais également du commerce, des entrepôts, de l'hôtellerie de plein air, des bâtiments de santé également et beaucoup en région, qui sont globalement des actifs qui offraient un rendement supérieur. Des actifs où la prime de risque demeure. Dans ce contexte de hausse des taux, il y a eu forcément une prime de risque supplémentaire recherchée sur l'immobilier. Or, nos actifs offraient déjà une prime de risque supplémentaire. Ça, c'est le premier élément. Le deuxième, nous avons beaucoup de petits actifs en portefeuille. Épargne Pierre, c'est quasiment 3 Mds€ de capitalisation. Mais c'est plus de 500 actifs, plus de 1 000 locataires. Or, dans le contexte actuel où il y a moins de capitaux en circulation, les gros actifs souffrent beaucoup plus. Puisqu'il y a encore des acheteurs sur les petits actifs. Nous allons dire jusqu'à 10, 15, 20 M€. Au-delà, ça devient  plus compliqué. Il y a moins d'acheteurs, donc forcément moins d'acheteurs, plus de vendeurs, donc une baisse des prix sur ces gros actifs.

Lire aussi : Bulletins du 2ème trimestre 2024 : nos SCPI Épargne Pierre et Épargne Pierre Europe consolident leurs places sur le marché

C'est une question de taille d'actif, pas de catégorie ?

RC : Tout à fait. Un dernier aspect important, c'est qu'une typologie de bureau souffre particulièrement. C'est le bureau en Ile-de-France, gros actifs monolocataires. Pourquoi souffrent-ils ? Ils ont été achetés chers sur des rendements faibles, donc avec un impact colossal lié à la hausse des taux. En plus , il y a un autre aspect davantage structurel. Le marché du bureau en Ile-de-France, en tout cas dans certaines zones d'Ile-de-France, ou il y a une situation de sur-offre. Autrement dit, beaucoup de vacances immobilières, donc des actifs pénalisés sur ce point également. Aucun de vos bureaux ne souffre. Pourquoi ? Parce qu'ils ne sont pas en Ile-de-France. Historiquement, nous sommes très présents en région. Nous avons 2/3 de notre patrimoine en région. Et même en Ile-de-France, nous avons beaucoup de petits actifs qui résistent davantage. Pour la raison que j'évoquais : le petit actif est encore très liquide. Il y a de la demande sur le petit actif, à la fois à la location et à la vente.

Vincent Danis : Il y a l'actif, mais il y a aussi le passif. Vous n'avez pas de part en attente de retrait, ce qui, pour une SCPI de la génération d'Epargne Pierre, est presque une anomalie. Comment l'expliquez-vous ?

RC : Ce n'est pas une anomalie. Pourquoi ? Nous avons un passif très sain, c'est-à-dire que nous avons très peu d'institutionnels au capital. Donc, nous n'avons pas eu ce mouvement de sortie massif qu'ont pu connaître certains de nos confrères. Nous avons beaucoup de petits porteurs qui détiennent Épargne Pierre et qui ne veulent pas en sortir parce qu' ils n'ont pas de raison de sortir. Le rendement continue d'être bon entre 5 et 5, 30. Les autres aussi peuvent dire ça. Un aspect très différenciant : ces acteurs qui souffrent avaient et ont toujours beaucoup d'institutionnels au capital, ces institutionnels qui ont dû mettre leur part en vente et le rendement, souvent, ces gros acteurs avaient un rendement qui s'était beaucoup tassé, ce qui n'est pas notre cas. Épargne Pierre, c'est le même rendement. C'est le même dividende en euros depuis quasiment 5 ans.

JS : En parlant du rendement, Épargne Pierre  était pendant longtemps une des SCPI qui offrait les meilleurs rendements du marché. La donne a un petit peu changé ces deux dernières années. Il y a plus d'une vingtaine SCPI qui ont des rendements supérieurs à 6 %. Vous êtes situés en dessous de ces rendements là et pourtant, vous attirez toujours autant de collecte.

Comment faites-vous pour continuer à maintenir cette dynamique ?

RC : Comme vous le savez, le rendement va de pair avec le risque. Or, Épargne Pierre offre un couple rendement-risque très bon, un rendement qui reste bon entre 5,20 et 5,30 alors bien entendu inférieur au rendement que certaines SCPI proposent, notamment des nouvelles. Néanmoins, c'est un risque extrêmement faible. Comment mesurer le risque sur une SCPI ? Par plusieurs points. Le premier, la mutualisation. Je l'évoquais. Épargne Pierre, c'est plus de 500 actifs, plus de 1 000 locataires, donc une granularité très forte. Très peu de dettes. Épargne Pierre, c'est 10 % de taux d'endettement. Un taux d'endettement extrêmement faible. Nous n'avons pas cette problématique de mur de la dette qui peut se présenter. Et de fait, nous sommes sur une SCPI qui est dérisquée. Et donc, vous avez un couple rendement-risque sur Épargne Pierre qui est très bon.

Voir aussi : Épargne Pierre résiste grâce à la granularité de son patrimoine

VD : Au 30 juin, l'OAT 10 ans était à 3,40. Les taux ont baissé depuis. Que pouvons-nous en attendre pour les expertises au 31 décembre et la valorisation d'Épargne Pierre ?

RC : Alors, nous avons refait des expertises à mi-année. Elles sont stables par rapport à celles que nous avions au 31 décembre. Ce que pouvons attendre de la baisse des taux, déjà, elle est réelle. Elle est pour l'instant légère. Et dans l'immobilier, il y a un vrai phénomène d'inertie. Finalement, la baisse des taux n'impacte pas immédiatement les valorisations immobilières. Donc, à ce stade, c'est compliqué. C'est encore trop récent. 50 points de base en deux fois de la BCE, c'est encore un peu juste. Et nous ne pouvons pas nous attendre  un effet immédiat sur les valorisations, sur les expertises au 31 décembre 2024. Vous ne le ressentez pas encore.

JS : Le bureau est une classe d'actifs qui souffre un peu et dont nous parlons beaucoup ces derniers temps. Et vous venez d'acheter pour Épargne Pierre Europe deux actifs de bureaux à Dublin.

Est-ce judicieux et pertinent aujourd'hui d'acheter du bureau ?

RC :  Le premier élément à avoir en tête, c'est que certains bureaux souffrent. Toute la classe bureau ne souffre pas. L'exemple typique, c'est les coeurs de ville. Par exemple, le coeur de Paris où le taux de vacance est très faible. C'est le cas dans beaucoup de grosses métropoles. Et typiquement, à Dublin, nous achetons deux bureaux dans le centre, l'équivalent du quartier central des affaires à Dublin, avec des décotes de prix fortes.

C'est toujours le cas aujourd'hui.

RC : Oui, bien sûr, parce que dans le cadre de ces acquisitions, nous avons face à nous un vendeur contraint. Donc, ça nous permet de saisir une opportunité dans un quartier où il y a toujours beaucoup de demandes. Finalement, l'enjeu sur le bureau, c'est la demande locative. La demande locative reste bonne. Pourquoi ? C'est extrêmement central. Or, aujourd'hui, beaucoup d'entreprises, beaucoup d'utilisateurs recherchent cette centralité.

VD : Il pourrait y avoir des modifications fiscales aux Pays-Bas et en Belgique.
Quelles conséquences pour Épargne Pierre Europe et pour ses associés ?

RC : Question d'actualité sur laquelle  je ne peux pas me prononcer parce que nous n'avons pas une visibilité totale. Donc, il y a une pression, un lobbying de la part de l'ASPIM entre autres, auprès des pouvoirs publics, entre autres néerlandais, pour faciliter la vie des porteurs de parts, entre autres aux Pays-Bas. Nous, nous n'avons pas d'actifs en Belgique. Nous sommes uniquement présents aux Pays-Bas en plus de l'Irlande et l'Espagne.

JS : Sur les acquisitions avec Épargne Pierre Europe, vous vous diversifiez dans d'autres pays que la France. Comment faites-vous pour acheter ? Comment vient le sourcing ? Parce qu'on a tendance à dire que si on a des bureaux que en France, c'est peut-être le marché que l'on maîtrise le mieux. Comment faites-vous pour réaliser des investissements à l'étranger ? D'où vient le sourcing ?

RC : Le point à avoir en tête, Épargne Pierre est une SCPI 100% française. Nous avons lancé Épargne Pierre Europe fin 2022, qui, elle, investit à l'étranger. Mais il faut bien avoir en tête que nous gérions déjà des actifs immobiliers à l'étranger, notamment en Espagne. Et nous avions déjà la capacité de sourcer avec des personnes présentes dans ces pays, pour sourcer les actifs, avoir les relations avec les utilisateurs, les entreprises, les brokers, et pour trouver les actifs appropriés. L'idée est d'être présent localement dans ces pays pour avoir le meilleur sourcing possible.

VD : Épargne Pierre avait privilégié les investissements dans les petits actifs. Épargne Pierre Europe investit dans des actifs de taille plus importante.

Devons-nous considérer cette SCPI comme plus risquée ?

RC : Des plus gros actifs, pas forcément, puisque nous avons beaucoup de petits actifs également dans Épargne Pierre Europe. Nous avons des actifs de 3, 5, 8 M€. Alors, à Dublin, nous avons acheté des actifs de taille plus importante, supérieur à 20 M€ pour un actif. C'est le contexte de marché qui veut ça. Pourquoi ?  Nous sommes dans un contexte où il y a de moins en moins d'acheteurs sur les actifs avec des prix unitaires plus importants, ce qui était l'inverse il y a quelques années. Il y a quelques années, il y avait beaucoup de capitaux en circulation. Les institutionnels allaient sur l'immobilier tertiaire. Les SCPI collectaient beaucoup d'argent, allaient sur l'immobilier tertiaire. Aujourd'hui, le contexte actuel est radicalement différent. Nous remarquons autant sur les petits actif, Il y a davantage de concurrence. Autant, au-delà d'une certaine taille critique, 10, 15, 20 M€, il y a beaucoup moins d'acheteurs en face. Donc, nous arrivons à mieux négocier. Alors, avec un point à avoir en tête, Épargne Pierre Europe. fait un peu plus de 200 M€ de capitalisation. Nous n'irons jamais sur un actif de 40, 50 M€  pour l'instant. L'idée est d'aller sur des actifs un peu plus importants pour mieux négocier.

JS : Il y a beaucoup de concurrence aujourd'hui sur les SCPI européennes. C'est à la mode. Il y en a de plus en plus. Les épargnants sont attirés aussi par ce type de véhicule. Comment se situe Épargne Pierre Europe par rapport à ses concurrents ?

RC : Nous sommes très attentifs au marché. Nous voyons toutes ces sociétés de gestion, ces SCPI qui se créent. Alors nous essayons de rappeler à nos distributeurs et aux porteurs de parts que  l'enjeu sur un véhicule SCPI, c'est la stabilité du revenu. C'est une stabilité du revenu que nous offrons sur Épargne Pierre et que nous souhaitons  offrir sur Épargne Pierre Europe avec un rendement brut de fiscalité entre 6 et 6,5. Nous voulons avoir cette stabilité du revenu.

Lire aussi : SCPI, rendement et risque, notre grille de lecture

Voir aussi : Nous continuons la diversification du patrimoine de nos SCPI

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