Turbulences en série pour le secteur bancaire (Auris Gestion)

Les marchés financiers ont terminé la semaine dans la tourmente, ébranlés par la montée des inquiétudes autour de la solidité du crédit bancaire américain. Deux banques régionales, Zions Bancorp et Western Alliance, ont indiqué avoir enregistré des pertes sur certains prêts – environ 50 millions de dollars au troisième trimestre 2025 pour Zions – en lien, pour certains, avec des fraudes présumées. Si ces cas semblent, pour l’heure, isolés, ils ravivent les inquiétudes quant à la qualité des bilans du secteur : d’autres établissements pourraient-ils receler de créances douteuses susceptibles de ne pas être honorées ? Ces révélations interviennent dans un climat déjà fragilisé par la faillite récente de First Brands et Tricolor, deux sociétés très endettées agissant dans le secteur automobile. Ces déboires avaient déjà ébranlé la confiance du marché avec notamment Jefferies et UBS qui s’étaient retrouvés pris dans la tempête. Dans ce contexte, les propos de Jamie Dimon, le PDG de JP Morgan, résonnent avec une acuité particulière : « Quand on voit un cafard, il y en a probablement d’autres. Tout le monde doit être averti », a-t-il prévenu récemment. Le message est clair : la prudence s’impose dans un marché du crédit privé en plein essor, désormais évalué à près de 2 000 milliards de dollars. JP Morgan, qui a elle-même encaissé une perte de 170 millions de dollars sur Tricolor, n’en reste pas moins active sur ce segment : la banque vient d’accorder, seule, un prêt record de 20 milliards de dollars au consortium en passe de racheter Electronic Arts — du jamais-vu depuis la crise financière de 2008. D’autres grands établissements tentent toutefois de rassurer. BlackRock a clairement écarté les craintes de contagion tandis que les dirigeants de Citigroup et Goldman Sachs soulignent la bonne qualité de leurs portefeuilles de crédit, la diversification des garanties et la limitation des concentrations de risques. Mais les craintes ne se cantonnent pas aux marchés : elles commencent à inquiéter jusqu’à la Réserve fédérale. Celle-ci surveille de près la situation, notamment la liquidité interbancaire, où plusieurs signaux de tension émergent : hausse du taux repo garanti (SOFR) et recours accru au mécanisme permanent de refinancement (Standing Repo Facility). Pour l’heure, les pertes déclarées restent limitées mais la prudence demeure de mise. Si les difficultés devaient s’étendre et rappeler les faillites bancaires de 2023, la Fed pourrait être amenée à renforcer ses dispositifs de soutien à la liquidité, en complément de l’arrêt prochain de la réduction de son bilan, évoqué par Jerome Powell la semaine dernière. Le président de la Fed a d’ailleurs laissé entendre que de nouvelles baisses de taux directeurs pourraient intervenir d’ici la fin de l’année, malgré les divergences persistantes au sein du comité sur la stratégie monétaire à adopter.
D’ailleurs, les banques américaines ne sont pas les seules dans le viseur. Ce matin, BNP Paribas a lourdement chuté en Bourse, perdant près de 8 %, après sa condamnation pour complicité d’exactions au Soudan, prononcée ce week-end. À ce stade, les dommages et intérêts s’élèvent à 20 millions de dollars au bénéfice de trois plaignants, mais la facture pourrait grimper si la décision était étendue à des milliers de réfugiés soudanais. BNP Paribas a confirmé son intention de faire appel mais au vu des montants en jeu, un règlement à l’amiable n’est pas à exclure et pourrait impacter les ratios de capitaux de la banque.
Sur une note plus favorable, les marchés saluent, ce matin, les signaux d’un dialogue renoué entre Washington et Pékin. Donald Trump a confirmé une rencontre avec Xi Jinping dans deux semaines, tandis que la Chine cherche à conforter sa trajectoire de croissance après un PIB du troisième trimestre légèrement en deçà des 5 %. Le 4e plénum du Parti communiste, qui s’ouvre aujourd’hui, pourrait donner une nouvelle impulsion à l’activité, notamment via un soutien accru à la demande intérieure.
En France, la situation politique se stabilise, ouvrant la voie à l’examen du budget 2026 par le Parlement. Les deux motions de censure contre le Premier ministre Sébastien Lecornu ont été rejetées, après notamment des concessions faites au Parti socialiste. Ce dernier a obtenu un assouplissement de la trajectoire budgétaire, le renoncement au 49.3 et la suspension « immédiate et complète » de la réforme des retraites jusqu’en 2027 — un surcoût estimé à 2,2 milliards d’euros, qui devra être compensé par des économies. Ce climat plus serein a favorisé un resserrement du spread OAT-Bund, désormais autour de 78 points de base, tandis que la dégradation surprise de la note française par S&P (de AA- à A+) n’a eu qu’un impact limité. La prudence reste toutefois de mise : l’adoption du budget 2026 pourrait s’avérer délicate.
Rédigé par Romane Ballin, Gérante Obligataire, Auris Gestion
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