Les actifs « prime » seront les grands gagnants de la reprise du marché immobilier (Ofi Invest AM)
Alors que la Banque Centrale Européenne (BCE) multiplie les baisses de taux directeurs depuis juin dernier, les marchés immobiliers n’ont, pour l’instant, pas fondamentalement acté ce changement de paradigme, car l’évolution des taux longs l’avait anticipé. Pour autant, si les opérations d’investissement ou de développement suivent des temps longs et ne reflètent donc pas instantanément les inflexions de tendance, les cycles tendent à se resynchroniser progressivement à la fois entre les pays et les différents produits immobiliers. Les valeurs vénales ne reculent plus et amorcent même un léger redémarrage depuis l’été dernier pour les meilleurs actifs dits « prime »situés au Royaume-Uni, en Allemagne et aux Pays-Bas, où les valeurs avaient enclenché leur baisse plus tôt. Les autres pays, la France par exemple, affichent d’ores et déjà des prix en stabilisation : les taux de rendement immobilier semblent stabilisés pour les actifs les plus vertueux et les mieux localisés, ceux-là même qui bénéficient en outre de loyers toujours orientés à la hausse.
Des marchés fortement polarisés géographiquement
Si les prix des actifs « prime » semblent avoir atteint leur point bas, ceux pour les biens localisés en dehors des meilleurs secteurs géographiques, en particulier les bureaux en périphérie, accusent encore des baisses sensibles en France. La crise sanitaire a en effet fondamentalement rebattu les cartes du marché des bureaux. L’essor du télétravail a nettement raccourci le temps passé sur site, et avec le flex office le lien au lieu de travail s’est totalement dématérialisé. Ces nouveaux usages ont permis de diminuer parfois considérablement les mètres carrés consommés par les entreprises et de questionner profondément la place du travail au bureau dans le quotidien des salariés. En outre, le départ progressif à la retraite des baby-boomers raréfie de fait la population active, et accentue la pression pour les entreprises d’attirer les meilleurs talents d’une génération aux aspirations nouvelles. La demande des entreprises se concentre donc vers les zones de marché les plus centrales et accessibles. En Ile-de-France par exemple, Paris cumule la moitié des transactions locatives de bureaux depuis le début de l’année, une première depuis 30 ans. Aux Pays Bas, les surfaces disponibles dans des plateformes logistiques situées dans des zones secondaires augmentent, tandis qu’elles trouvent rapidement preneurs dans les localisations établies. Les actifs se trouvant en périphérie des secteurs recherchés pâtissent ainsi d’une vacance chronique que les baisses parfois substantielles des valeurs locatives ne parviennent pas à résorber.
Nouvelle distribution des volumes d'investissement
Tous les segments immobiliers ne suscitent pas la même convoitise de la part des investisseurs. Les actifs logistiques, qu’il s’agisse d’entrepôts de grande taille ou de plus petite dits« du dernier kilomètre », en proche périphérie des grands bassins de consommation, attirent désormais une part croissante des volumes d’investissement. En France, les bureaux et la logistique ont totalisé chacun 35 % des engagements depuis le début de l’année 2024,tandis que la logistique domine les volumes en Allemagne, avec 39 % des montants alloués. Les besoins en stockage de produits à livrer se sont nettement renforcés, portés par le développement rapide du e-commerce, alors que la disponibilité foncière s’avère toujours plus restreinte(« zéro artificialisation nette des sols »en France, dispositifs comparables en Europe). Parallèlement, la demande est toujours plus soutenue. De même, le résidentiel, qui s’appuie sur des tendances démographiques et sociologiques de long terme, attise l’appétit des investisseurs, d’autant que les mises en chantier sont peu nombreuses, accentuant la rareté de nouveaux logements dans les marchés les plus tendus. Les investissements en résidentiel ont ainsi progressé de seulement 7 % depuis le début de l’année en France.
Des perspectives de croissance de loyers moins porteuses
Alors que les taux de rendement« prime » semblent retrouver un niveau acceptable pour les investisseurs, proches de 4,00 %-4,50 % pour les bureaux et de 4,25 %-4,75 % pour la logistique en Europe, dans un environnement de taux de financement qui renouent progressivement avec leurs moyennes de long terme, la dégradation du contexte économique pourrait bien réduire l’activité des entreprises et contraindre leur rentabilité. Les marchés locatifs pourraient ainsi perdre en dynamisme et entraîner un ralentissement de la hausse des loyers « prime », voire leur stabilisation. Pour autant, la demande devrait continuer à se concentrer majoritairement sur les meilleurs secteurs, là où l’offre, en particulier celle des biens neufs très recherchés par les utilisateurs, est la plus limitée. Ils devraient donc jouir d’une meilleure rentabilité sur le long terme car ils bénéficieront d’une re-compression plus forte de leur taux de rendement.
Dans ce contexte, les produits les plus performants seront, selon nos analyses, les bureaux et les plateformes logistiques acquis à des prix actuellement proches de leurs points bas, loués sur des périodes de moyen/long terme à des locataires de qualité, situés dans les meilleurs secteurs des marchés européens les plus profonds (Allemagne, France, Pays-Bas). De même, les biens dits d’hébergement, des logements classiques neufs et anciens aux résidences étudiantes, répondent à des besoins essentiels, dès lors qu’ils sont localisés dans les marchés où la demande s’exprime le plus fortement. L’acquisition de complexes hôteliers, qu’ils s’adressent aux voyageurs d’affaires ou au tourisme, viendra diversifier une allocation basée sur les tendances structurantes pour le marché immobilier.
Par Sébastien Chemouny, Directeur Ofi Invest Real Estate
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