Pourquoi l’once d’or a enregistré sa plus forte chute depuis 2013

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Une correction brutale après une ascension historique

L’or a connu mardi une baisse spectaculaire de 6,3 %, passant de 4 356 à 4 125 dollars l’once en quelques heures. Il s’agit de la plus forte chute quotidienne depuis 2013. Cette correction intervient après une ascension exceptionnelle, marquée par un record historique à 4 381,5 dollars l’once la veille. Malgré ce décrochage, les cours de l’or progressent encore d’environ 60 % depuis le début de l’année, tandis que l’argent, qui a suivi une trajectoire similaire, a chuté de 8,7 %.

Pour de nombreux analystes, ce mouvement s’explique avant tout par des éléments techniques. « Les ventes techniques ont été le principal facteur en cause », souligne Suki Cooper, responsable de la recherche sur les matières premières chez Standard Chartered. « Les prix évoluaient en zone de surachat depuis le début du mois de septembre », précise-t-elle, tout en anticipant un rebond du métal jaune l’année prochaine.

Des prises de bénéfices après une envolée record

Après avoir repoussé ses records à plusieurs reprises, l’or semblait devoir marquer une pause. Vers 16 h 35 mardi, l’once perdait encore 5,18 % à 4 130,4 dollars. Cette baisse n’avait plus été observée depuis 2020, lors des premiers mois de la pandémie de Covid-19. Sur l’ensemble de l’année 2025, la performance du métal précieux reste toutefois remarquable, avec une hausse de 56,5 %.

Les prises de bénéfices ont joué un rôle central dans cette correction. De nombreux investisseurs ont choisi de sécuriser leurs gains après plusieurs mois de progression continue. Cette phase de respiration apparaît logique après une envolée aussi rapide, d’autant que la volatilité du marché aurifère s’est accentuée avec l’approche d’importants rendez-vous économiques.

L’attente du CPI américain et le rôle du dollar

Ce repli intervient à la veille de la publication du Consumer Price Index (CPI) américain, prévue le 24 octobre. Cet indicateur d’inflation est scruté de près par les marchés, car il pourrait influencer la prochaine décision de la Réserve fédérale américaine (Fed). Les investisseurs se montrent prudents et réduisent leur exposition aux actifs sensibles aux politiques monétaires, dont l’or fait partie.

La remontée du dollar américain a accentué la pression sur le métal jaune. L’indice DXY, qui mesure la performance du billet vert face à un panier de six devises, a progressé de 0,36 % pour atteindre 98,94 points. Ce renforcement du dollar renchérit mécaniquement le coût de l’or pour les acheteurs étrangers et réduit la demande mondiale.

Malgré un discours relativement accommodant de Jerome Powell, la nervosité reste présente. Les marchés spéculent sur une dernière série d’assouplissements monétaires d’ici la fin de 2025, mais l’incertitude demeure sur le calendrier précis des baisses de taux.

Un contexte géopolitique momentanément apaisé

Le recul du métal précieux s’explique aussi par un léger réchauffement des relations entre les États-Unis et la Chine. Donald Trump a annoncé une rencontre prochaine avec Xi Jinping destinée à aplanir leurs différends commerciaux. Cette perspective a réduit la demande pour les valeurs refuges, dont l’or.

Les discussions bilatérales devraient se poursuivre en Malaisie, avec l’objectif d’aboutir à une trêve commerciale d’ici le 10 novembre. Washington exige notamment l’arrêt des livraisons illégales de fentanyl et la reprise des achats de soja. Cette détente contribue à un regain d’appétit pour le risque sur les marchés financiers, au détriment de l’or et de l’argent.

Le soutien des banques centrales et la dynamique de long terme

Depuis deux ans, les banques centrales, notamment celles de Chine et des pays émergents, soutiennent la demande en or. À l’origine motivés par les sanctions occidentales et le gel des avoirs russes, ces achats s’inscrivent désormais dans une stratégie plus large de diversification des réserves. L’or reste ainsi un pilier des stratégies de réserve face aux incertitudes du système monétaire international.

Le début du cycle de baisse des taux de la Fed en septembre a également renforcé l’attrait du métal. Des taux plus bas favorisent traditionnellement l’or, actif sans rendement, en réduisant le coût d’opportunité par rapport aux obligations et actions.

Enfin, le shutdown qui paralyse une partie de l’administration américaine depuis 21 jours alimente l’incertitude. Bien que des négociations soient en cours pour rouvrir les services fédéraux, aucune avancée concrète n’a été observée, ce qui entretient un climat de prudence.

Une chute marquante mais une tendance toujours haussière

Sur le plan technique, la tendance de fond reste haussière malgré la violence du mouvement. Le premier support se situe à 4 100 dollars, puis à 4 059 dollars. En cas de cassure sous ces seuils, la moyenne mobile à 20 jours, autour de 4 000 dollars, pourrait constituer un dernier rempart. À l’inverse, un retour au-dessus de 4 200 dollars relancerait la dynamique vers 4 250 puis 4 300 dollars, avant de viser de nouveaux sommets.

Pour Goldman Sachs, l’or pourrait atteindre 4 900 dollars l’an prochain. De leur côté, les analystes de Barclays soulignent que la reprise actuelle est atypique : « L’or brille généralement lorsque les économies sont au bord de la récession. Or, cette fois, il progresse dans un contexte de croissance solide et de taux d’intérêt encore élevés. » La banque estime que ce mouvement pourrait traduire « un malaise vis-à-vis de l’ordre budgétaire et monétaire mondial ».

L’argent dans le sillage du métal jaune

La correction de l’or a entraîné l’argent dans son sillage. Ce métal, également considéré comme actif de réserve, a connu mardi une chute de 8,7 %, sa plus lourde depuis 2021. L’argent évolue désormais autour de 48 dollars l’once, après avoir brièvement atteint 47,89 dollars en séance.

Cette baisse, plus prononcée que celle de l’or, s’explique par la volatilité intrinsèque du marché de l’argent, dont les volumes de transaction sont plus faibles. Le repli reflète également la baisse de la demande industrielle, liée au ralentissement de la production dans plusieurs pays asiatiques. Les analystes estiment toutefois que la tendance de long terme reste positive, portée par l’essor des technologies vertes et la demande en panneaux solaires.

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Sources : BFM Bourse, Le Figaro, TradingSat, BDOR

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