Vague républicaine : les marchés américains s'envolent, la Fed poursuit la baisse des taux. Avec Matthieu Lavillunière, SILEX

Analyses de marchés
Matthieu Lavillunière, SILEX, club patrimoine

Le point macroéconomique US de SILEX avec Matthieu Lavillunière

L'issue des élections américaines a été beaucoup plus tranchée que ce qui était attendu par les marchés et la plupart des observateurs. Les républicains se sont emparés de la Maison-Blanche, du Sénat et très probablement de la Chambre des représentants, ce qui leur donne une très grande marge de manœuvre pour appliquer leur programme au cours des deux prochaines années au moins.

Après deux semaines d'incertitude et de recul global des marchés actions, les cours sont brutalement ajustés à la hausse aux États-Unis. Les petites et moyennes capitalisations se sont distinguées. Ces valeurs sont en effet les plus exposées au marché domestique américain et sont idéalement positionnées pour profiter d'un programme America First reposant sur des droits de douane et des baisses d'impôts.

D'un point de vue sectoriel, l'industrie signe une très belle performance

En 2018 déjà, lors du premier mandat de Donald Trump, la mise en place de droits de douane, notamment sur l'acier et l'aluminium, avait largement bénéficié aux producteurs domestiques. Il y a fort à parier que le secteur profiterait aussi de hausses de droits de douane prévues par le nouveau président élu. La perspective de voir la nouvelle administration déréguler plusieurs secteurs apporte les valeurs, notamment de la finance et des énergies fossiles.

La tech, de son côté, achève également une très belle semaine. Il faut avoir en tête que le vice-président élu J. D. Vance est un ancien investisseur en capital-risque qui incarne bien la volonté des Républicains d'assouplir le cadre réglementaire entourant l'innovation, ce qui pourrait notamment profiter aux valeurs de taille moyenne de la tech aux États-Unis.

Le secteur de la consommation discrétionnaire s'est lui aussi envolé

Ce qui n'est pas étranger à la très belle semaine de Tesla, dont le PDG Elon Musk pourrait jouer un rôle important dans la nouvelle administration. Le secteur a également profité d'un ISM des services à 56,0, très supérieur aux attentes, qui reflètent la solidité de l'économie américaine.

Du côté moins positif, les secteurs sensibles aux taux d'intérêt, notamment les utilities et l'immobilier, ont fait les frais de taux longs qui ont bondi au niveau des 4,50% après les résultats de l'élection.

Dans ce contexte politique très chargé, a eu lieu en fin de semaine l'avant-dernière réunion de la Fed en 2024.
Les principales questions étaient la réaction de la Fed au retour de Donald Trump à la Maison-Blanche et y aurait-il des indications sur le rythme futur des baisses de taux. Concernant l'élection présidentielle, Jérôme Powell s'était forcé de ne pas se laisser entraîner dans des débats politiques. Il estime que l'élection n'aura aucun effet sur les décisions de la Fed à court terme. Et lorsqu'on lui a demandé s'il démissionnerait si Donald Trump l'exigeait, Jérôme Powell a opposé un non catégorique, ajoutant qu'il n'était pas permis par la loi que la nouvelle administration ne le renvoie avant la fin de son mandat à la mi-2026.

Tout ce que l'on peut dire, c'est que la Fed voulait marquer son territoire, car il y a fort à parier que Donald Trump cherchera à peser sur les décisions de la Banque centrale. En ce qui concerne le rythme des baisses de taux, Jérôme Powell a clairement indiqué que le moment n'est pas venu de revenir à la forward guidance consistant à donner à l'avance la trajectoire à venir. Ce n'est pas réellement une surprise compte tenu des incertitudes actuelles.

Il y a cependant plusieurs enseignements à tirer de son intervention. L'image d'ensemble est celle d'une économie solide qui se rapproche progressivement de l'équilibre entre croissance et inflation. Depuis la réunion de septembre de la Fed, la croissance a en effet été meilleure que prévu. Notamment, le chiffre du PIB du T3, donc du troisième trimestre, était de plus de 2,8%. Par ailleurs, les enquêtes sur l'activité économique montrent que l'activité accélère dans les services. De son côté, l'inflation est légèrement plus élevée que prévu également.
Elle est cependant très bien maîtrisée. Les derniers chiffres d'octobre de l'inflation PCI étaient notamment de 2,1%. Cette inflation qui revient progressivement à la normale est une très bonne nouvelle car elle pourrait permettre de tempérer le risque posé par le programme de Donald Trump qui apparaît clairement inflationniste, avec notamment une hausse des droits de douane, des baisses d'impôts et une réduction massive de l'immigration qui pourrait renchérir le coût du travail.

La Fed estime que le marché du travail est désormais moins tendu qu'avant la pandémie et qu'il n'est plus source d'oppression inflationniste. Compte tenu du rythme de gains de productivité, les hausses de salaire ne semblent pas menacer le retour à l'objectif d'inflation de 2%.

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