Les politiques monétaire et budgétaire peuvent amortir l’effet néfaste du conflit douanier (Swiss Life AM)

Un ralentissement économique en zone euro causé par les tensions commerciales
Les effets économiques des taxes douanières américaines devraient se faire ressentir en zone euro au 2nd semestre en particulier. Nous abaissons donc légèrement notre prévision de croissance pour 2025 et 2026. Outre une demande mondiale en repli, c’est surtout la forte incertitude globale qui pèse sur les investissements des entreprises et la consommation des ménages.
Des politiques budgétaires et de défense favorables à l’activité
Cependant, la politique budgétaire expansionniste de nombreux pays européens devrait porter la croissance. En plus de projets d’investissements en infrastructures (Allemagne et Italie), la hausse à venir des dépenses de défense sera également favorable.
Un retour de la croissance porté par l’inflation en baisse
Avec le repli de l’inflation, la politique monétaire peut se permettre d’être plus expansionniste. L’inflation baissant, les salaires réels devraient augmenter, portant à leur tour la consommation des ménages à moyen terme.
Une industrie sous pression malgré un PMI en amélioration
Jusqu’à présent, les enquêtes auprès des entreprises restent bonnes. Ainsi, le PMI du secteur manufacturier en avril signe un léger gain par rapport à mars, mais il reste en deçà du seuil d’expansion. Cela tient d’une part à une certaine anticipation des exportations américaines et de l’autre à une baisse des prix de l’énergie. Le premier aspect cité devrait toutefois s’inverser au
Un contexte désinflationniste favorable à une baisse des taux par la BCE
La pression inflationniste reflue et, en raison du repli de la demande mondiale et des prix de l’énergie, le renchérissement devrait diminuer en cours d’année. L’appréciation de l’euro atténue en outre la pression importée. C’est autant d’eau au moulin de la BCE pour continuer son cycle de baisse des taux. Elle devrait opérer trois réductions de 25 pb chacune en 2025.
Allemagne : une coalition stable mais des mesures économiques limitées
Nouvel exécutif, faible impact
Un accord gouvernemental sans impulsion économique immédiate
La CDU/CSU et le SPD se sont accordés sur un gouvernement de coalition. L’accord conclu comprend principalement des mesures incrémentales : de nombreux stimuli de politique économique restent vagues ou sont repoussés à 2026 voire plus tard. Allègements fiscaux, incitations à l’investissement et reflux des prix de l’énergie sont prévus, mais n’auront aucun effet à court terme.
Des contraintes budgétaires persistantes face aux incertitudes
La marge de manœuvre budgétaire reste limitée étant donné la conjoncture et les risques géopolitiques. Berlin reste engagée à respecter le pacte budgétaire européen, signifiant que malgré les exceptions de taille au frein à l’endettement, il ne faut pas tabler sur un renoncement fondamental à une politique financière axée sur la stabilité.
Des exportations affaiblies et une confiance des entreprises en recul
Les exportateurs vont souffrir des droits de douane américains récemment suspendus ainsi que de l’appréciation de l’euro. Les enquêtes auprès des entreprises traduisent donc un repli des attentes. L’indice ifo du climat des affaires recule légèrement, mais reste comparativement stable, considérant la mauvaise trajectoire des exportations. Cela indique une certaine solidité de la conjoncture allemande à un faible niveau. Le secteur tertiaire poursuit son évolution stable.
Une désinflation accélérée par la politique douanière et les prix de l’énergie
Faibles perspectives de croissance à court terme globalement, mais un modeste rebond à moyen terme est probable. L’effet désinflationniste de la politique douanière américaine et la baisse des prix de l’énergie va accélérer la normalisation de l’inflation. De plus, l’euro s’apprécie fortement depuis janvier, réduisant l’inflation importée des produits de l’énergie, des biens de consommation et d’investissement. A la clé, baisse des coûts pour les ménages et les entreprises.
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Une projection d’inflation révisée à la baisse pour 2025 et 2026
Au vu de ces évolutions, nous tablons sur une pression inflationniste plus faible sur la période de prévision et abaissons notre projection d’inflation à 2,1% en 2025 et à 2,0% en 2026.
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France : un tourisme dynamique et une consommation relancée par la baisse de l’épargne
Boom du tourisme
Une activité économique générale toujours sous pression
En ce début de 2e trimestre, les PMI de l’industrie, des services et du secteur de la construction stagnent tous sous le seuil d’expansion des 50 points.
Un secteur touristique en plein essor malgré le contexte troublé
Dans cet environnement économique troublé, le secteur du tourisme en France rayonne. Les chiffres disponibles concernant les nuitées en hôtel de touristes étrangers annoncent un cru 2025 record.
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Une consommation soutenue par la politique monétaire et la baisse de l’épargne
Le commerce de détail profite aussi de la demande florissante. De plus, la consommation privée est portée par l’assouplissement de la politique monétaire de la Banque centrale européenne. Et c’est précisément dans l’Hexagone que les produits d’épargne des ménages rémunérés baissent nettement, faisant reculer le coût d’opportunité de la consommation. La propension inhabituelle des Français à épargner devrait donc appartenir au passé. Nous avons déjà évoqué le fait que le retour à un taux d’épargne moyen à long terme pouvait libérer une réserve de pouvoir d’achat à hauteur d’environ 2 % du PIB tricolore.
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Des incertitudes budgétaires qui freinent l’investissement
Outre l’incertitude en matière de politique commerciale, le débat sur le budget nuit au comportement d’investissement des entreprises. L’objectif de réduction du déficit public à 4,6 % du PIB en 2026 avec un effet fiscal neutre, tout en augmentant les dépenses de défense, est un cas d’école de quadrature du cercle.
Une inflation en recul et des anticipations durablement abaissées
Cet été, l’inflation française va stagner sous 1 %. Notre avis, à savoir un effet de baisse de prix induit par le conflit douanier et les tendances désinflationnistes chinoises sur les économies européennes, est de plus en plus apte à recueillir la majorité. Cela se reflète dans le repli de la prévision du consensus en 2025 concernant les attentes à long terme du marché des obligations indexées sur l’inflation. Le taux d’inflation moyen anticipé ces dix prochaines années est de 1,9 %, soit 0,4 % de moins qu’il y a un an.
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Italie : un climat plus incertain pour les exportations face aux tensions commerciales
Un ciel un peu plus sombre
En février, les PMI italiens ont progressé dans le sillage de l’euphorie autour du paquet fiscal allemand, mais ont reculé en mars, surtout dans l’industrie. En effet, la guerre commerciale déclarée par Washington s’est intensifiée.
Une exposition aux exportations qui rend l’Italie vulnérable
Indisponibles à la clôture de la rédaction, les chiffres d’avril devraient être en dégradation considérant l’orientation exportatrice de l’Italie. A l'instar du Japon, de l'Allemagne et de l'Autriche, les exportations vers les États-Unis représentaient environ 3,4 % du PIB en 2024.
Des secteurs partiellement protégés mais des menaces ciblées
A l’inverse de ces pays, l’Italie reste moins exposée aux taxes sectorielles sur les véhicules, l’acier et l’aluminium. En effet, les produits de ces secteurs ne constituent que 8 % de toutes les exportations vers les États-Unis. La menace de taxes sur les produits pharmaceutiques (part de 15 %) serait déjà bien plus problématique.
Une révision à la baisse des perspectives de croissance
L’essentiel des exportations vers Washington (73 %) est constitué de produits actuellement soumis à des droits de douane de 10 %. En raison de ce taux de base plus élevé que prévu et de l’appréciation surprise de l’euro, nous abaissons légèrement notre prévision de croissance pour 2025.
Espagne : une croissance qui résiste grâce au tourisme et à l’emploi
Au-dessus de la moyenne
Une confiance des entreprises toujours au-dessus de la moyenne
En mars également, la confiance des entreprises espagnoles reste supérieure à la moyenne de la zone euro. Certes, le tertiaire en est le principal moteur, mais le moral des entreprises industrielles depuis le début de l’année a glissé légèrement en deçà du seuil d’expansion.
Une faible exposition aux États-Unis qui limite l’impact commercial
Une situation probablement imputable au commerce extérieur espagnol qui, comparé à celui d’autres pays européens, affiche une faible exposition aux États-Unis, avec des exportations de seulement quelque 1,4 % du PIB. À l’instar de l’Italie, le pays de Cervantès est moins touché par les taxes sectorielles (aluminium, acier et véhicules) et la majorité de ses exportations est pour l’heure frappée du taux global de 10 %.
Une dynamique économique soutenue malgré la baisse des commandes industrielles
Certes, le PMI des commandes reçues par les entreprises industrielles espagnoles recule depuis janvier, côté exportation également. Toutefois, la croissance espagnole devrait – cette année encore – être supérieure à la moyenne européenne, portée par un solide secteur du tourisme et un marché du travail robuste.
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Suisse : une activité économique contrastée entre demande intérieure forte et pression extérieure
Des souvenirs de 2015
Un indicateur économique au plus haut malgré le marasme industriel
Au 1er trimestre, l’indice à haute fréquence du Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO) relatif à l’activité économique a retrouvé son plus haut niveau en près de quatre ans. Une observation étonnante considérant le marasme régnant dans l’industrie MEM.
Les conditions cadres économiques affichent une dichotomie. Les entreprises tournées vers le marché domestique et celles de la construction profitent de la politique monétaire expansionniste de la BNS et d’une solide demande des ménages. Les branches tournées vers l’exportation souffrent des mesures protectionnistes. Une dichotomie qui va se renforcer ces prochains mois.
Malgré une incertitude considérable liée aux taxes douanières américaines, nous ne révisons pour l’heure qu’à la marge notre prévision de croissance. Une chose est sûre : l’activité d’investissement des entreprises souffre du flou de la politique économique.
Un pouvoir d’achat soutenu par la vigueur du franc, comme en 2015
Le choc négatif de la demande étrangère va se heurter à son alter ego positif de la demande intérieure. Comme en 2015 lors du choc du franc, l’appréciation de la devise helvète a entraîné une hausse considérable du pouvoir d’achat des ménages suisses. Il y a dix ans, les dépenses réelles des consommations des ménages avaient progressé de plus de 2 % à chaque trimestre en comparaison avec 2014. Cela avait empêché, à la surprise générale, le basculement de l’économie suisse dans la récession.
Un consensus sur les effets désinflationnistes du conflit douanier
L’analyse concluant que le conflit douanier a des effets désinflationnistes pour l’Europe fait largement consensus. La baisse des prix de l’énergie se traduit déjà dans les chiffres d’inflation d’avril, alors que le franc fort amenuise les prix des biens importés. Les efforts des fournisseurs asiatiques pour trouver de nouveaux débouchés tempèrent également la dynamique des prix en Europe à moyen terme.
Royaume-Uni : des perspectives de croissance affaiblies et un assouplissement monétaire attendu
Les récents événements de politique intérieure comme extérieure nous ont amené à abaisser notre prévision de croissance du PIB britannique pour 2025 et 2026.
Une discipline budgétaire renforcée sans hausse immédiate des impôts
Dans son discours de printemps, Rachel Reeves a fait part d’une restriction des dépenses publiques, mais sans augmentation d’impôts. Des coupes nécessaires pour rééquilibrer dépense publique et recettes fiscales.
En effet, les charges d’intérêts et la croissance plus faible que prévu ont réduit à néant la marge de manœuvre de 9,9 mia. GBP inscrite au budget d’automne 2024. Les mesures annoncées permettent de retrouver cette latitude, mais elle est très serrée.
Autre risque, les prévisions optimistes de croissance de la part de l’Office for Budget Responsibility (OBR) : si le garant des finances publiques a divisé par deux sa prévision pour le PIB en 2025, ses pronostics pour les années suivantes restent bien supérieurs à ceux du consensus. Il y aura probablement une pression à abaisser à nouveau ces projections lors du budget d’automne 2025 en raison du conflit douanier.
Une pression fiscale toujours présente malgré des droits de douane limités
Bien que les taxes douanières américaines sur les produits britanniques (10 %) soient moindres que prévu, la Grande-Bretagne n’est pas mieux lotie après avoir réduit également à 10 % les taxes sur les biens provenant de l’UEM. Des hausses d’impôts cet automne ne sont donc pas à exclure.
Une inflation inférieure aux attentes qui ouvre la voie à une baisse des taux
À 2,6 % en mars, l’inflation est inférieure aux attentes, principalement du fait du repli des prix de l’énergie, en forte baisse sur fond de craintes mondiales de récession. L’inflation devrait continuer à reculer cette année, d’une part en raison du repli de la demande mondiale et d’autre part grâce à la baisse des prix de l’énergie. Une situation qui devrait permettre à la Banque d’Angleterre de baisser les taux. Nous attendons quatre réductions en 2025.
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Source : Swiss Life AM Conjoncture Mai 2025
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