Non coté : quelles stratégies pour créer de la valeur sur le long terme ? Avidan Geissmann (Apax by Seven2) et Hervé de Roquefeuil (123IM)

Après deux années marquées par une forte contraction des transactions dans le private equity, les premiers signes de reprise se confirment en 2025. Hervé de Roquefeuil, Directeur Commercial d'123 IM et Avidan Geissmann, Managing Director chez Apax by Seven2, analysent les dynamiques à l’œuvre dans le non coté, entre regain d’activité sur les opérations de capital-investissement et afflux de capitaux vers la dette privée.
Des signes de reprise dans le private equity après deux années compliquées
Après deux années assez compliquées dans le Private Equity. Est-ce qu'il y a des signes de reprise ?
Avidan Geissmann : Oui, il y a des signes de reprise, plus de transactions. En fait, les signes compliqués, ils sont dus à pas mal d'éléments exogènes, notamment de l'économie. On va parler du Covid, on va parler de la guerre en Ukraine, de l'inflation qui a augmenté, évidemment la fin des taux à zéro, etc. Et du coup, on a connu une baisse au niveau du nombre de transactions. Et cette baisse a plutôt impacté les gros fonds Large Cap, beaucoup moins les fonds Small et Mid. Et notamment chez nous, chez Seven2, on a fait quatre acquisitions l'année dernière, cinq sorties, donc on a connu une activité très dense en 2024 et ça continue en 2025 avec deux nouvelles acquisitions dans les cabinets en gestion de patrimoine qu'on aime beaucoup. On peut les citer, Olifan en février et HRK Lunis, qui est un gros cabinet allemand, là tout récemment, qu'on a annoncé et qui se fera au deuxième semestre de l'année.
Une forte dynamique sur la dette privée au premier trimestre 2025
Dans la dette privée, qui est complémentaire du Private Equity, comment ça se passe ? Quelle est la tendance ?
Hervé de Roquefeuil : Sur la dette privée, il y a un engouement qui est très fort depuis plusieurs années. Rien que sur le premier trimestre 2025, on est déjà à plus de 23 milliards collectés au niveau européen sur la dette privée. Donc, il y a un vrai engouement. Ça s'explique par plusieurs choses. Déjà, il y a un contexte de marché, comme l'a évoqué Avidan. Aujourd'hui, il y a des réglementations bancaires qui sont plus strictes. Donc, il y a un besoin de trouver des sources de financement alternatives, notamment pour les fonds qui font du LBO. Les banques ne prêtent plus l'intégralité du besoin, donc il faut aller s'adosser à des fonds de dette privée pour pouvoir finaliser le besoin d'acquisition. C'est le premier point. Le deuxième point, c'est qu'il y a aussi aujourd'hui un contexte, notamment pour les investisseurs privés, qui viennent sur la classe d'actifs du non coté, qui n'ont pas forcément envie d'aller sur de l'equity, donc la version action, même si elle a beaucoup de qualités, etc., mais elle peut présenter un risque important. Quand vous êtes primo-accédant dans la classe d'actifs, vous voulez plutôt rentrer par la fenêtre obligataire. Effectivement, la dette privée a cet avantage d'être un petit peu plus protectrice. Il y a un rendement qui va être un petit peu plus faible, on va dire, et c'est là où on est très complémentaires avec Apax. Proposer des rendements un petit peu plus faibles, un coupon, parce que souvent, les véhicules versent des coupons semestriels. Et enfin, sur des maturités qui sont globalement plus courtes, puisqu'aujourd'hui, on arrive à trouver sur la dette privée des maturités entre 5 à 6 ans, là où sur des fonds de Private Equity traditionnels, on est plutôt entre 8 et 10 ans. Dans une jolie allocation diversifiée pour les investisseurs privés qui, de plus en plus, s'intéressent à la classe d'actifs.
Voir aussi : Comment sélectionner les meilleurs fonds de dette privée ?
Une stratégie sectorielle pour créer de la valeur chez Seven2
Voyons maintenant comment on crée de la valeur sur le long terme. Comment l'un et l'autre vous faites ? C'est notre sujet. Avidan, parlez-nous tout d'abord de votre approche. Sur quoi repose-t-elle et en quoi contribue-t-elle à cette création de valeur ?
AG : Juste un point important, c'est que les meilleurs millésimes sont les millésimes juste après les crises. Voilà, je dis ça pour le millésime 2025.
Ça veut dire qu'il n'y aura pas de crise là ?
AG : On est peut-être en dedans, mais en tout cas, on voit qu'il y a de belles perspectives, notamment plus de transactions. Nous, notre approche, elle est simple. Elle est sectorielle depuis toujours. On investit dans de la tech et dans des services B2B. Ça, on le fait depuis très longtemps. On est très spécialisés là-dedans. Et comment on va créer de la valeur ? Comme je vous l'ai dit, entre 2010 et 2020, vous aviez des taux à zéro. Donc, il suffisait d'investir sur le bon cheval. Vous aviez les valo qui montaient tout doucement. Le LBO, à proprement dit, ne coûtait pas très cher. Donc, forcément, avec ce levier-là, vous aviez de très belles sorties à 3, 4, 5 fois. Aujourd'hui, c'est plus compliqué de miser uniquement sur la croissance des multiples, donc sur la croissance de la valeur intrinsèque des sociétés. Donc, on va aller chercher à travailler la croissance des résultats de la société, de faire en sorte que cette petite PME ou cette moyenne ETI devienne une très grosse société internationale, etc.
Et comment on fait ? Nous, chez Seven2, et depuis longtemps, depuis 2000, on a commencé à structurer une équipe de création de valeur. Et cette équipe de création de valeur, elle est composée de 10 personnes qui sont salariées chez nous et qui vont se focaliser sur des verticales. La verticale sur l'intelligence artificielle ou la transformation digitale. Enfin, l'ancien nom, c'était la transformation digitale. Aujourd'hui, on parle plus d'implémentation d'intelligence artificielle. On va aller, évidemment, sur l'ESG, donc améliorer les feuilles de route sur toute la partie ESG. On va faire de la consolidation. On a des personnes qui sont dédiées à la négociation de la dette chez nous, avec des fonds ou avec les banques, pour faire de la consolidation de marché. On va aller sur l'amélioration opérationnelle, accompagner les dirigeants dans la structuration et la professionnalisation de leur société, pour faire en sorte qu'à un moment donné, le chiffre d'affaires, l'EBITDA, soient multipliés par 2, 3, 4, et finalement, on crée la valeur réellement comme ça.
Lire aussi :
L’Alliance stratégique entre Private Equity et intelligence artificielle
Private Equity et ESG : une union pérenne
Une sélection rigoureuse pour optimiser la performance en dette privée
Et alors dans la dette privée, Hervé, comment faites-vous pour créer de la valeur ? Quels sont les moteurs de performance ?
HDR : Nous, c'est un petit peu plus simple, j'ai envie de dire. Ce qui nous intéresse, c'est le pricing. Comment on va pricer notre obligation, comment on va pouvoir, au-delà — on en parlera juste après — comment on va sélectionner les actifs, mais surtout, voilà, s'assurer qu'on a un bon pricing, qu'on a un bon couple rendement/risque à offrir à nos investisseurs. Chez 123 IM, on a développé depuis 30 ans cette expertise en dette privée, principalement sur les taux fixes, donc qui permet de nous prémunir d'une baisse de taux qui s'annonce sur ces prochains mois. On arrive aujourd'hui à structurer des obligations à taux fixe, ce qui permet, encore une fois, de se prémunir d'une éventuelle baisse des taux.
Après, sur la sélection et comment on accompagne nos entreprises, on part du principe qu'il faut s'assurer, bien évidemment, que la boîte qu'on va financer est rentable, qu'elle va générer des cash-flows positifs pour être en mesure de nous payer nos coupons sur les prochaines années. On va surtout s'assurer qu'elle soit sur des secteurs d'activité qui vont encore exister demain. On est très forts sur le financement du secteur du tourisme, de la santé, qui sont, selon nous, depuis 30 ans, des secteurs sur lesquels il y aura toujours matière à aller créer de la valeur. Donc ça, c'est un point important : s'assurer que la boîte est sur un secteur qui va être pérenne sur le long terme. Et puis, de deux, un peu à l'instar de ce que vient de dire Avidan, malgré le fait qu'on soit en dette, on est là aussi au plus près de nos entrepreneurs pour les accompagner dans la création de valeur au quotidien, parce qu'effectivement, ça ne se fait plus par la croissance des multiples, mais vraiment par la croissance organique, la croissance du business, et c'est là où on est et on intervient. C'est pour ça qu'on coûte un peu cher par rapport à une dette traditionnelle, mais au-delà du financement, on apporte aussi toute une partie de conseil.
Lire aussi : Les leviers de création de valeur du private equity
Voir aussi : « En participant à la transformation des entreprises nous générons de la valeur »
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