Démembrement et PER : attention à la confusion


Différence entre souscription et clause bénéficiaire d’un PER assurance
Non, il n’est pas possible de souscrire un PER assurance en démembrement contrairement à un contrat d’assurance vie. Mais oui, il est possible de démembrer une clause bénéficiaire d’un PER Assurance. Il ne faut donc pas confondre souscription et clause bénéficiaire. Et la distinction est capitale. Mais est-il utile de démembrer la clause bénéficiaire d’un PER Assurance ? Nous vous l’expliquons au sein de cet article, et démontrons la nécessité de désigner comme seul bénéficiaire des capitaux décès d’un PER en cas de décès après 70 ans, le conjoint survivant pour éviter le matraquage fiscal et préférer de désigner les autres héritiers (notamment enfants) comme bénéficiaire des contrats d’assurance vie.
L’impossible souscription démembrée d’un PER
À la différence de l’assurance-vie ou du contrat de capitalisation, la souscription démembrée d’un PER est exclue, car :
• il s’agit d’un contrat retraite
• ayant pour finalité de préparer sa retraite
• dont le contrat est personnel… : « l'acquisition et la jouissance de droits viagers personnels ou le versement d'un capital… Le plan prévoit la possibilité pour le titulaire d'acquérir une rente viagère… » (art. L224-1 CMF) «Le titulaire du plan d'épargne retraite individuel doit être âgé de dix-huit ans au moins à la date de l'ouverture de ce plan.» (art. L224-28 CMF
• … et destiné à une seule personne : le titulaire, ce qui exclut toute co titularité ou co souscription d’un PER
• Il n’existe aucune base légale ou réglementaire permettant un démembrement de la qualité de titulaire du PER, et de pouvoir séparer la jouissance des fonds / intérêts (usufruitier), et la propriété des sommes investies (nue-propriété).
Le PER est une enveloppe personnelle, ne pouvant donc pas donner lieu à un démembrement à la souscription, ni à l’adhésion, que ce soit sur le PER bancaire ou assurantielle. Toute tentative de souscription en démembrement du plan épargne retraite est juridiquement invalide et commercialement refusée par les assureurs.
Les avantages fiscaux du démembrement de la clause bénéficiaire d’un PER assurance
Le démembrement ne peut concerner, pour le PER assurance, que les capitaux décès issus d’une clause bénéficiaire démembrée d’un PER assurance.
Cela permet :
• De désigner par exemple le conjoint survivant comme bénéficiaire des capitaux décès en usufruit pour tout ou partie, les enfants en nue-propriété;
• De limiter le frottement fiscal à la seule nue-propriété, l’usufruit revenant au conjoint survivant étant totalement exonéré.
• De permettre au nu-propriétaire de devenir plein propriétaire des capitaux au décès de l’usufruitier, sans taxation (art. 1133 du CGI).
• De prévoir la mise en place d’un quasi usufruit sur la quote part des capitaux décès revenant au conjoint usufruitier afin de lui donner les pleins pouvoirs de gestion et d’utilisation des fonds objet de son usufruit. Dit autrement, lui permettre de retrouver toutes les prérogatives d’un plein propriétaire, le nue-propriétaire bénéficiant alors d’une créance de restitution pour le montant des capitaux décès remis au quasi usufruitier, à faire valoir sur la succession du quasi usufruitier à son décès, diminuant d’autant l’actif taxable aux droits des successions.
• D’organiser une transmission différée, avec reconstitution d’une créance de restitution ;
• De bénéficier de l’exonération totale au profit du conjoint (article 990 I, al. 3) et de l’abattement de 152 500 € par enfant si décès avant 70 ans pour le PER, sous réserve de les désigner comme bénéficiaire de tout ou partie des capitaux en pleine propriété (cf article précédent « Assurance vie et clause bénéficiaire démembrée » Club Patrimoine).
Le démembrement de la clause bénéficiaire d’un PER ne produit donc aucun effet économique ni juridique tant que le contrat n’est pas dénoué par le décès de l’assuré.
Quasi usufruit et organisation de la succession du PER assurance
Pendant la vie du contrat, le conjoint désigné bénéficiaire en usufruit n’a aucun droit sur les capitaux décès : il n’est qu’un bénéficiaire en devenir.
Ce n’est qu’au décès du titulaire que :
• Les capitaux décès seront versées au(x) bénéficiaire(s) désigné(s);
• Et qu’un quasi-usufruit pourra être mis en place avec l’accord des nus-propriétaires sur ces capitaux décès afin de permettre la remise de la pleine propriété des capitaux décès à l’usufruitier désigné.
Il conviendra de veiller à rédiger une convention de quasi usufruit dûment enregistrée auprès de l’administration fiscale afin de rendre opposable la créance de restitution due aux nus-propriétaires au moment de l’ouverture de la succession du quasi usufruit, avec revalorisation possible.
Cas pratique : Comparatif PER Assurance / Assurance vie et clause bénéficiaire démembrée
M. X, marié, 1 enfant, a versé 200 000 € de primes sur son contrat d’assurance-vie ou PER avant 70 ans qui ont généré 40 000 € d’intérêts (unités de compte), et 80 000 € de primes après 70 ans générant 15 000 € d’intérêts (unités de compte). La clause bénéficiaire est : « mon conjoint, non séparé de corps, pour l’usufruit, mon enfant pour la nue-propriété »…. Le montant des primes versées chaque année avant le décès était de 5 000 € par an et l’abattement de 100 000 € disponible en succession est déjà utilisé, notamment pour le calcul de fiscalité de la taxation des capitaux décès après 70 ans.
Objectif : Comparer le frottement fiscal au décès selon l’âge du souscripteur (décès 61-68-82 ans) et le produit souscrit (Assurance vie vs PER assurance) avec clause bénéficiaire démembrée pour le tout, et un conjoint survivant ayant le même âge que le souscripteur au moment du décès.

Lire aussi : Comment optimiser la clause bénéficiaire d’une assurance-vie ?
Tableau comparatif chiffré des frottements fiscaux
Transmission avant 70 ans : un avantage fiscal pour le PER assurance
Le PER assurance peut être plus avantageux fiscalement que l’assurance-vie si le décès intervient avant 70 ans, grâce à l’article 990 I et à l’assiette très réduite (primes versées la dernière année / (cf. BOFiP et rescrit fiscal de Benoît Berchebru décembre 2024), le frottement fiscal est parfois nul.
Idéal pour une transmission optimisée, en particulier si les bénéficiaires sont non conjoints ou hors ligne directe.
Et en prévoyant un quasi usufruit, cela permet à l’usufruitier de retrouver les pleins pouvoirs sur les capitaux transmis et de créancer une dette de restitution au profit des nus-propriétaires à faire valoir sur l’actif de succession du quasi usufruitier.
Le démembrement de la clause bénéficiaire d’un PER avant 70 ans peut donc apparaitre utile d’un point de vue civile et fiscale.
Lire aussi : L’intérêt de souscrire un contrat d’assurance-vie avant 70 ans
Transmission après 70 ans : l’assurance vie plus performante que le PER
Le PER devient fiscalement pénalisant : tous les capitaux décès sont soumis à 757 B (droits de succession classiques), sans le double compartiment AV (990 I et 757 B), ni l’exonération des intérêts.
Moins favorable que l’AV qui permet de gérer deux compartiments fiscaux et de faire jouer les exonérations 990 I puisque dans le cadre du PER, seul le date du décès est pris en compte pour déterminer la fiscalité applicable aux capitaux décès transmis et non la date et l’âge de l’assuré lors du versement de chaque primes.
Solution : désigner uniquement le conjoint survivant comme bénéficiaire en pleine propriété, ce qui permet une exonération totale (article 796-0 ter du CGI).
Tableau de synthèse concernant les capitaux décès transmis nets de fiscalité en démembrement, et des prélèvements sociaux répartis égalitairement entre l’US et le NP.
**les intérêts compris dans les capitaux décès issus d’un PER Assurance et qui n’ont jamais subi de prélèvements sociaux du vivant du souscripteur ne sont pas soumis aux prélèvements sociaux, quel que soit la qualité de bénéficiaire (conjoint ou autre).
Conclusion : stratégies patrimoniales et choix du bénéficiaire
Les chiffres le démontre : S’il peut être utile civilement de mettre en place une clause bénéficiaire démembrée au sein d’un PER assurance avant 70 ans et notamment avant d’atteindre l’âge de départ retraite, cela est moins vrai après 62-63 ans avec un impact négatif après 70 ans.
Il faut éviter de démembrer la clause bénéficiaire après 70 ans. Car la perte s’élève à 19 920 € via un PER assurance avec clause bénéficiaire démembrée comparé à l’assurance vie, et le taux d’efficacité de la transmission ressort à 86% contre 92% en assurance vie. Cet écarte s’explique notamment par la compartimentation fiscale des primes versées avant / après 70 ans en assurance vie et des régimes fiscaux spécifiques (990 I / 757 B), là où avec le PER, la totalité des capitaux décès (primes + intérêts) est taxée aux DMTG après abattement, l’exonération des prélèvements sociaux ne permettant pas d’effacer complément ce surplus de DMTG dus.
Par Benoît BERCHERBU, Directeur de l’Ingénierie Patrimoniale Groupe, Astoria Finance
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