Rebond des marchés actions US malgré la Fed (Arkéa AM)

Analyses de marchés
marchés US rebond juin 2025

Le premier semestre 2025 s’achève finalement sur une nette hausse des marchés actions américains. Bien que le S&P 500 et le Nasdaq sous-performent encore leurs homologues américains depuis le début de l’année, ils enregistrent tout de même une forte progression sur le mois (+5 % et 6,6 % respectivement). L’optimisme apparent des investisseurs a d’ailleurs pu être renforcé par l’officialisation de la trêve commerciale sino-américaine ainsi que par la signature d’un cessez-le-feu, aussi fragile soit-il, entre l’Iran et Israël. Pour autant, les effets macroéconomiques des mesures commerciales prises par la Maison-Blanche ne se sont pas encore manifestés. Et le Président de la Fed, Jerome Powell, ne semble pas s’y tromper en optant pour la prudence. Les signes de modérations de la demande sont présents mais ténus tandis que, du côté des prix, l’inflation reste contenue.

Des tensions tarifaires susceptibles de raviver l’inflation et d’affaiblir le dollar

La donne pourrait toutefois changer alors que le Président de la Fed s’attend à ce que les prix accélèrent au cours des mois à venir. Même en faisant l’hypothèse, assez consensuelle parmi les prévisionnistes, d’un maintien des droits de douane autour de leurs niveaux actuels, le rebond de l’inflation pourrait être conséquent. Par ailleurs, le sursis tarifaire accordé par D. Trump arrivera rapidement à échéance. À partir du 9 juillet, le Président américain pourrait ainsi imposer plus massivement encore les importations de nombre de ses partenaires commerciaux, jusqu’à 50 % pour l’Union Européenne. Au-delà des échéances commerciales, le sujet de la dette américaine pourrait aussi redevenir un sujet de préoccupation majeure, alors que D. Trump souhaite que son projet de loi (One Big Beautiful Big Act) soit adopté avant le 4 juillet. Si ces éléments d’incertitudes n’ont pas empêché un rebond des actions, ils entravent en revanche fortement le dollar. Le billet vert réalise ainsi, au premier semestre 2025, sa pire performance depuis 50 ans, avec une chute de presque 11 % face à un panier de devises.

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En Europe, une reprise économique absente malgré une inflation stabilisée

De l’autre côté de l’Atlantique, en Europe, la situation économique reste morose alors que les pays se préparent aux retombées économiques de la guerre commerciale. La stabilisation de l’inflation permet néanmoins à la BCE d’entrevoir la fin prochaine de son cycle de baisse des taux. Au niveau budgétaire, la nouvelle donne géopolitique oblige les membres de l’OTAN, et notamment l’Allemagne, à revoir nettement à la hausse leurs ambitions militaires. Dans un contexte budgétaire déjà détérioré, la perspective d’une hausse des besoins de financement limite la détente des rendements obligataires souverains.

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Aux États-Unis, la demande interne s’essouffle face aux craintes sur l’emploi

Les données publiées en juin témoignent d’une demande interne en perte de vitesse, alors que la guerre commerciale préoccupe les ménages. Les chiffres de consommation du premier trimestre ont été révisés à la baisse tandis que les dépenses de consommation reculent en mai. Ce repli traduit, en partie au moins, un contrecoup après des dépenses particulièrement dynamiques en mars sur fond d’anticipations des droits de douane. En parallèle, la confiance des consommateurs reste dégradée, sur fond de craintes sur le marché du travail, et malgré une légère révision à la baisse des anticipations d’inflation des ménages à un an (à 5 ans, elles restent historiquement élevées). Ce climat des affaires peu porteur se ressent également du côté des entreprises. L’enquête ISM décrit une contraction de l’activité du secteur des services en mai, une première depuis juin 2024 qui reflète une contraction des nouvelles affaires mais aussi une forme d’attentisme dans un climat d’incertitudes persistant.

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Une inflation toujours modérée malgré l’épuisement des stocks d’amortissement

Si la guerre commerciale entreprise par Donald Trump semble d’ores et déjà peser sur la demande, les pressions inflationnistes demeurent limitées. En mai, l’indice des prix des dépenses personnelles enregistre une hausse mensuelle de 0,1 %, portant sa croissance annuelle à 2,3 %. Corrigée des prix de l’énergie et de l’alimentation, l’inflation affiche une hausse un peu plus importante que prévu (+0,2 % sur un mois) mais qui ne traduit pas encore l’accélération attendue des prix. Une hausse de l’inflation au cours des mois à venir reste en effet à craindre, alors que les stocks des entreprises accumulés avant les droits de douane devraient s’épuiser prochainement. Jerome Powell a ainsi estimé que les effets inflationnistes de la guerre commerciale devraient intervenir dès cet été, potentiellement dès juin.

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Une croissance molle en Europe, contrastée par un léger mieux en Allemagne

En Europe, l’enquête PMI de juin décrit encore une activité morose, marquée par une stagnation dans les services et une très faible expansion au sein de l’industrie. L’enquête indique en outre une faiblesse prolongée de l’activité en France, une atonie qui contraste avec un léger mieux du côté de l’Allemagne. Au sein de l’industrie manufacturière, l’enquête signale une reprise des commandes à l’export. Difficile toutefois de distinguer ce qui, dans ce rebond, tient d’une amélioration de la demande liée à la hausse des dépenses budgétaires européennes ou d’effets d’anticipation face aux droits de douane américains. Du côté des prix, l’inflation reste largement contenue, à 1,9 % sur un an en mai. Corrigée des prix de l’énergie et de l’alimentation, de son côté, l’inflation sous-jacente diminue à 2,3 % (après 2,7 %), son plus bas niveau depuis janvier 2022.

La hausse des dépenses militaires renforce les tensions budgétaires européennes

Au niveau budgétaire, les membres de l’OTAN se sont accordés sur une hausse massive des dépenses de défense et de sécurité, avec un objectif de 5 % à horizon 2035. Parmi ces 5 %, 3,5 % seront consacrés aux dépenses « pures » de défense et 1,5 % aux dépenses sécuritaires. L’OTAN élargit donc le champ des dépenses, relativement à l’objectif de 2 % en vigueur, qui ne concernait que les dépenses « pures ». Il est difficile de savoir quelle part de ces 1,5 % est déjà dépensée, mais même en considérant uniquement les 3,5 % de PIB consacrés à la défense, cela représente une augmentation considérable. En parallèle, le gouvernement allemand a annoncé une augmentation rapide des dépenses de défense, avec un objectif de 3,5 % du PIB à horizon 2029 (contre 2,4 % actuellement).

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En Chine, une embellie conjoncturelle portée par les plans de soutien à la consommation

La demande interne chinoise enregistre un regain inattendu en mai, alors que les ventes au détail enregistrent une progression annuelle de plus 6 %, au plus haut depuis décembre 2023. Cette embellie reflète toutefois les effets du programme de renouvellement d’équipements de biens de consommation (trade-in program), visible à travers la forte augmentation des ventes de produits électroniques ou électroménagers. La confiance des ménages demeure historiquement faible, tandis que le recul des importations et la déflation persistante témoignent d’une consommation en difficulté sur fond de crise immobilière prolongée. Les exportations ont déçu en mai (environ 5 % sur un an) mais demeurent l’un des facteurs de soutien de l’activité chinoise au cours du premier semestre. En deuxième partie d’année, l’essoufflement du trade-in program ainsi que le contrecoup de la guerre commerciale risque de conduire à un net coup de frein, sauf si Pékin déploie des plans de soutien budgétaire plus ambitieux.

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Une détente obligataire américaine alimentée par les discours prudents de la Fed

Les rendements obligataires américains s’inscrivent en nette baisse (-17 points de base pour le taux à 10 ans), alors que des données moins bonnes qu’attendues et les déclarations accommodantes de plusieurs membres de la Fed ont poussé les investisseurs à réviser à la baisse leurs anticipations concernant la trajectoire des taux Fed funds. La Réserve fédérale a pourtant opté pour la prudence lors de sa réunion du 17 juin. À cette occasion, la Fed a laissé ses taux directeurs inchangés, les maintenant dans la fourchette 4,25 %-4,5 % dans un contexte particulièrement incertain. Pour son Président, Jerome Powell, la patience est encore de mise alors qu’il estime que les tarifs douaniers devraient conduire à une hausse significative de l’inflation dans les mois à venir.

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La Fed maintient le cap mais reste divisée sur la suite du cycle

Les prévisions médianes des membres de la Fed ont d’ailleurs été revues en ce sens, avec moins de croissance à l’horizon et une inflation attendue à 3 % en 2025. Dans ce contexte, la trajectoire de baisse des taux dessinée par ces projections est un peu moins baissière, avec toujours 50 pb de baisse en 2025 mais seulement 25 pb en 2026 et 2027. Les membres de la Fed apparaissent toutefois divisés sur le marché à suivre : 7 membres sur les 19 qui composent le comité de politique monétaire sont favorables à un maintien des taux à leurs niveaux actuels en 2025 tandis que 10 prévoient deux baisses de taux ou plus cette année. Ces divisions transparaissent à travers les déclarations de plusieurs membres de la Fed. Une baisse des taux dès juillet pourrait ainsi être appropriée selon Christopher Waller et Michelle Bowman, en particulier si les données d’inflation continuent d’être modérées et que les négociations commerciales en cours n’aboutissent pas à une nouvelle hausse des droits de douane. Ces propos dissonants trouvent par ailleurs un écho particulier alors que D. Trump critique toujours ouvertement l’action de Jerome Powell.

En zone euro, la BCE se rapproche de la fin de son cycle d’assouplissement

Dans ce contexte, les investisseurs attendent, au 30 juin, 2 à 3 baisses de taux de 25 pb cette année et 50 pb de baisse supplémentaire l’année prochaine. En Zone euro, les marchés obligataires s’inscrivent en hausse (+11 bp pour le taux à 10 ans allemand), alors que la BCE s’approche de la fin de son cycle de baisse des taux et que le déploiement des plans budgétaires allemands conduit à une révision à la hausse des besoins de financement. Comme attendu, la BCE a décidé de procéder à une nouvelle baisse de ses taux directeurs de 25 pb, ramenant le taux de la facilité de dépôt à 2 %. La BCE a suggéré qu’elle était proche de la fin de son cycle d’assouplissement, en soulignant que l’inflation est désormais au niveau de sa cible de moyen terme (2 %) et qu’elle devrait y rester. Christine Lagarde a ajouté que la politique monétaire était désormais « bien positionnée ». Si elle note que le cycle de baisse des taux est proche de la fin, elle ne ferme pas non plus la porte à un nouvel assouplissement. Ces propos ont consolidé les investisseurs dans l’idée d’une nouvelle et dernière baisse des taux directeurs de 25 pb au quatrième trimestre 2025.

Wall Street sur des sommets historiques grâce à la détente monétaire

Les marchés actions américains s’inscrivent en nette hausse en juin (+5 % pour le S&P 500), retrouvant des plus hauts historiques. Ni les tensions au Moyen-Orient, ni l’approche de la date limite du sursis tarifaire de Donald Trump (le 9 juillet) n’ont suffi à gêner la progression des indices boursiers américains. Ces derniers ont, en outre, bénéficié de la perspective d’une politique monétaire plus accommodante et, plus largement, de la baisse des taux souverains. Ce faisant, le S&P 500 s’inscrit en progression de plus de 6 % depuis le début de l’année, réduisant un peu l’écart avec l’Europe. De son côté, l’Eurostoxx 50 recule quelque peu en juin mais reste en hausse de près de 9 % depuis le début de l’année. Exprimée en dollar, la surperformance des indices européens est toutefois largement plus importante : l’Eurostoxx 50 progresse ainsi de 26 % depuis le début de l’année.

Une nouvelle glissade du dollar, fragilisé par les doutes sur l’indépendance de la Fed

Le dollar s’inscrit à nouveau en nette baisse en juin (-2,5 % face à un panier de devises) et touche des plus bas depuis trois ans. En parallèle, l’euro enregistre une progression de presque 4 % face à la devise américaine. Le billet vert souffre de la baisse des taux américains mais aussi des doutes des investisseurs vis-à-vis de la politique commerciale américaine. Les doutes sur l’indépendance de la Fed peuvent également contribuer à ce mouvement.

Un pétrole volatil mais globalement stable malgré les tensions au Moyen-Orient

Le prix du pétrole a évolué en dent de scie en juin, au rythme des développements géopolitiques au Moyen-Orient. La guerre éclair entre l’Iran et Israël a conduit le prix du baril de Brent à frôler les 80 $, avant de se replier vers 68 $, un niveau toutefois inférieur à celui qui prévalait début juin (64 $ le baril). Malgré cette volatilité, la hausse des prix de l’or noir durant le conflit est restée relativement contenue, alors que l’Iran n’a finalement pas bloqué le détroit d’Ormuz, par lequel transite 1/5 des exportations mondiales d’hydrocarbures.

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L’influence croissante de Donald Trump sur la politique monétaire inquiète les marchés

Donald Trump n’a jamais fait mystère de son hostilité envers Jerome Powell, ainsi que de sa volonté de baisser les taux directeurs rapidement. Si la Maison-Blanche a finalement repoussé l’idée de limoger J. Powell (ce qui paraît, par ailleurs, légalement difficile), elle pourrait tout de même influencer la conduite de la politique monétaire par d’autres moyens. Le Wall Street Journal rapporte ainsi que D. Trump pourrait annoncer un successeur à J. Powell, dès septembre (alors que le mandat de ce dernier n’arrivera à terme qu’en mai 2026). En nommant une personne alignée sur ses vues, D. Trump pourrait influencer les attentes des investisseurs et affaiblir l’autorité de J. Powell. Ces rumeurs ravivent les craintes vis-à-vis de l’indépendance de la Fed, ce qui n’est pas de nature à renforcer l’attractivité des actifs financiers américains.

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Par Arkéa Asset Management, Marchés & Gestion, Juin 2025

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